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samedi, 09 mai 2015

André Müller und Ernst Jünger

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André Müller und Ernst Jünger

Tatsächlich eine Liebesgeschichte

Von Jörg Magenau

Ex: http://www.deutschlandradiokultur.de

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Für den "Zeit"-Journalisten André Müller war es ein Lebenstraum, den Schriftsteller Ernst Jünger zu interviewen. Mindestens fünf Mal trafen sich die beiden zwischen 1989 und 1996, drei Gespräche wurden aufgezeichnet. Die Originaltranskripte verraten viel über das väterliche Verhältnis Jüngers zu Müller.

Am Tag vor Ernst Jüngers 100. Geburtstag im März 1995 notierte André Müller:

"Jünger ist ein ganz unanalytischer Mensch, naiv wie ein Kind, unfähig zur Auswahl von Wichtigem, alles notierend auf verzweifelter Suche, in der unbewussten Hoffnung, andere mögen ihn (der sich nicht kennt) finden."

Vermutlich hat er damit Recht. Der Ernst Jünger, den Müller erlebte, ist weit weg vom Weltkriegs-Haudegen der "Stahlgewitter" und dem demokratiefeindlichen Theoretiker des "Arbeiters". Müller entdeckt das Kind im alten Mann. Und der Andere, den er ihm unterstellt, um gefunden zu werden, das könnte dann er selbst, Müller, sein.

André Müller war berühmt für seine Interviews in der "Zeit", die er stets konfrontativ, ja mit einer gewissen Verachtung dem Gesprächspartner gegenüber anlegte. Eigentlich ging es dabei immer nur um ihn selbst und um seinen Nihilismus und um die verzweifelte Suche nach Wahrheit. Nur drei von all seinen zahlreichen Gesprächspartnern hat er wirklich geachtet: Thomas Bernhard, Elfriede Jelinek und eben Ernst Jünger, den er hartnäckig umwarb, bis er endlich einwilligte. Bei Jünger war es sogar ein Liebesverhältnis, und Müller zögerte nicht, es genau so nach Wilflingen zu schreiben und sich ganz zu offenbaren: "Herr Jünger, ich liebe sie." So gelang es ihm, das Vertrauen des Alten zu gewinnen, der für ihn zu einer Vaterfigur werden sollte.

Originaltranskript mit Floskeln und Nichtigkeiten

Mindestens fünf Mal haben die beiden sich zwischen 1989 und 1996 getroffen. Drei dieser Gespräche wurden auf Tonband aufgezeichnet, doch nur das erste, geführt am Tag vor dem Mauerfall, ist dann stark bearbeitet und gekürzt in der "Zeit" erschienen. Jetzt kann man es zusammen mit den beiden anderen, vom Tag nach der Währungsunion 1990 und von einem Wintertag 1993, in voller Länge als Originaltranskription nachlesen, mit allen Floskeln und Nichtigkeiten, die ein Gespräch ja auch ausmachen. Das ist gerade im Falle Ernst Jüngers wichtig, für den das Gespräch – neben dem Traum – eine offene, neugierige Annäherung an Einsichten gewesen ist.

Herausgeber Christophe Fricker hat diese Dokumente belassen wie sie sind und sich auf Anmerkungen und einleitende, sehr hilfreiche Erläuterungen beschränkt. Dazu bietet der Band den Briefwechsel der beiden Gesprächspartner, Postkarten, und Mitschnitte von Jüngers Anrufen auf Müllers Anrufbeantworter. Herausgekommen ist ein Buch, mit dem man Ernst Jünger tatsächlich – und das ist schon eine Sensation – nahekommen kann, weil er sich in seiner Empfindsamkeit zeigt. Nebenbei erfährt man auch etwas über seine Verhältnisse zu Frauen und davon, dass er im Wald beim Spazierengehen laut schrie.

Es wird viel gelacht

"Gespräche über Schmerz, Tod und Verzweiflung" lautet der Untertitel. Das ist auch nicht falsch, und doch ist die Stimmung zumeist gelöst und heiter, es wird viel gelacht, Jüngers berüchtigtes, stakkatohaft-militärisches "Ha Ha!" durchzieht den Text wie ein grundierender Rhythmus. Müller berichtet, dass er, zunächst irritiert von diesem Lachen, mitzulachen versuchte, damit aber wiederum Jünger irritierte, weshalb er es dann unterließ. Der Tod jedenfalls, das ist bekannt, hat Jünger nicht geschreckt. Auch der Tod wurde von ihm als Freund begrüßt und mit einem Lachen quittiert. Komik entfalten die Gespräche auch deshalb, weil sich Müller sehr viel besser an viele Details aus Jüngers Leben zu erinnern scheint. Auf Ereignisse aus dem 1. Weltkrieg angesprochen, weiß Jünger nicht viel mehr zu sagen als: "Das ist lange her" oder "So, so, aha" oder "Wenn Sie das sagen" oder "Ha, ha." Die Gespräche produzieren bei aller Coolness, die beide zur Schau stellen, eine große Nähe und Wärme. Es ist tatsächlich eine Liebesgeschichte. Das macht dieses Buch zu einem berührenden Leseabenteuer.

Christophe Fricker (Hg.): Ernst Jünger – André Müller. Gespräche über Schmerz, Tod und Verzweiflung
Böhlau Verlag, Köln 2015
234 Seiten, 24,90 Euro

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lundi, 04 mai 2015

Sept films à voir ou à revoir sur la Guerre comme expérience intérieure

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Sept films à voir ou à revoir sur la Guerre comme expérience intérieure

Ex: http://cerclenonconforme.hautetfort.com

A propos de la guerre, Ernst Jünger écrivait : "Oui, le soldat, dans son rapport à la mort, dans le sacrifice de sa propre personne pour une idée, ignore à peu près tout des philosophes et de leurs valeurs. Mais en lui, en ses actes, la vie trouve une expression plus poignante et plus profonde qu'il n'est possible en aucun livre. Et toujours, de tout le non-sens d'un processus extérieur parfaitement insensé, ressort une vérité rayonnante : la mort pour une conviction est l'achèvement suprême. Elle est proclamation, acte, accomplissement, foi, amour, espérance et but ; elle est, en ce monde imparfait, quelque chose de parfait, la perfection sans ambages. " Il y a un siècle, la Première Guerre mondiale inaugurait le combat moderne en même temps qu'elle propulsait sur des centaines de théâtres d'opération des millions de jeunes âmes volontaires ou contraintes de vivre leur guerre "comme expérience intérieure". Des hommes, tel Ernst Jünger, héraut de l'aristocratie guerrière allemande, René Quinton ou Joseph Darnand, frères d'armes français, naquirent pour la seconde fois sous la tempête des Orages d'acier. Mais combien d'hommes marqués à jamais par l'indicible effroi de l'expérience du combat ? Eux qui clamèrent plus volontiers, non la Guerre notre mère mais la Guerre notre mort. Le thème de la guerre figure parmi les plus explorés du cinéma. Excellente occasion de découvrir ou redécouvrir, sous de nombreux aspects, de brillantes réalisations abordant plus généralement la perception psychologique des conflits.

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LES CHEMINS DANS LA NUIT

Titre original : Wege in der Nacht

Film allemand de Krzysztof Zanussi (1979)

1943, des soldats du Reich prennent possession d'une grande ferme polonaise. La chasse aux alentours est l'occupation favorite des officiers de la Wehrmacht, parmi lesquels deux universitaires, Friedrich et son cousin Hans-Albert. Friedrich se distingue de son cousin par sa passion pour l'art et la littérature. Il tombe bientôt amoureux d'Elzbieta, fille du baron propriétaire, qui est animée des mêmes goûts artistiques. Un amour nullement réciproque. Elzbieta juge Friedrich trop peu critique à l'égard de la barbarie de la guerre. Et patriote polonaise ardente, Elzbieta est bien décidée à utiliser l'amour de Friedrich pour aider l'action militaire des partisans polonais...

Pas tout à fait un film de guerre, la réalisation de Zanussi explore de manière admirable la collaboration par l'inaction. Si Friedrich n'est pas un national-socialiste convaincu, son inaction pour combattre le régime et son acceptation de la barbarie le transforment en complice actif. Et c'est toute la faiblesse morale du héros, présenté comme un personnage affable et sympathique mais obéissant aveugle à un régime qu'il ne cautionne pas, que souhaite mettre en exergue le réalisateur. Tourné en 1979, Zanussi, de nationalité polonaise, ne manque pas d'établir un parallèle fort avec l'intelligentsia polonaise, de même, complice du régime communiste par sa lâcheté. Le film, en outre servi par de brillants interprètes, est un petit bijou.

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EMPIRE DU SOLEIL

Titre original : Empire of the Sun

Film américain de Steven Spielberg (1987)

Shanghai en 1941, la zone anglaise de la ville connaît un destin singulier quand le reste de la Chine est occupée par l'armée japonaise. James Graham est le jeune fils d'un riche industriel britannique et mène une adolescence insouciante. Mais James est bientôt rattrapé par la guerre. L'aviation japonaise vient d'attaquer Pearl Harbour scellant la déclaration de guerre nippone aux forces alliées. L'armée impériale envahit la Concession internationale de Shanghai. Séparé de sa famille, le jeune garçon erre et découvre la peur et la mort avant de se retrouver prisonnier dans un camp dans lequel il doit apprendre à survivre. Ses rêves de révolte et de guerre perdent leur sens. Aidé par le prisonnier Basile, James n'a d'autre possibilité pour évader son esprit que de transformer sa détention en aventure extraordinaire...

Si le talent de Spielberg est largement surestimé, le présent film constitue l'une de ses meilleures réalisations avec Rencontres du troisième type.  Bien que non soldat, James est contraint de mener et vivre sa guerre sans fusil comme un parcours initiatique qui le révèlera et le conduira à l'âge adulte. L'image émouvante d'un antihéros qui se représente la guerre et la barbarie comme son nouveau terrain de jeu. Le film est une adaptation du récit semi-autobiographique de l'écrivain de science fiction James Graham Ballard. Une œuvre lyrique et envoutante.

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LE FAUBOURG OKRAINA

Titre original : Okraina

Film russe de Boris Barnet (1933)

1er août 1914, l'Allemagne mobilise et déclare la guerre à la Russie tsariste. Un vent patriotique souffle dans tout le pays, aussi sur le faubourg d'une petite ville menacée par l'avancée des troupes du Kaiser. Gresin, le fabricant attitré de bottes pour l'armée est le plus fervent patriote et enjoint tous les hommes en âge de combattre du quartier à monter au front. L'ouvrier Nikolaj Kadin est mobilisé et rejoint par son frère Son'ka qui se porte volontaire. Ces modestes ouvriers et paysans vont bientôt découvrir les horreurs des tranchées et la gestion irresponsable d'officiers généreux en chair à canon. A l'arrière du front, l'effervescence patriotique cède la place à la contestation d'un conflit engraissant les marchands de canons. Les thèses bolchéviques trouvent un terreau favorable à leur éclosion...

Certes, il s'agit d'un film de propagande stalinienne qui ne fait guère l'économie d'un certain nombre de poncifs. C'est le lot des films de propagande après tout... Barnet livre néanmoins ici une vision douce-amère de la guerre, éloignée de la grandiloquence d'autres productions bolcheviques. L'autre particularité du film réside également en une présentation de la perception du conflit par l'ensemble des classes sociales, limitant un point de vue uniquement prolétaire. Bref, une réalisation assez iconoclaste au sein du monolithisme du cinéma soviétique. A voir !

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FLANDRES

Film français  de Bruno Dumont (2005)

De nos jours en Flandre, Demester doit quitter son exploitation agricole, accompagné d'autres jeunes Flamands, pour être propulsé sur un théâtre d'opération lointain. Demester menait jusqu'alors une vie pauvre et simple. Il aime secrètement Barbe, son amie d'enfance avec laquelle il partage de longues ballades. Il aime Barbe malgré ses mœurs libres et ses amants, parmi lesquels Blondel qui la séduit. Attendant le retour de Demester, Blondel et leurs compagnons, Barbe s'ennuie au village. Quant à Demester, de nature aussi taciturne et morose que l'était son ciel de Flandre, il fait face à la guerre avec une parfaite tenue au feu et se mue en véritable guerrier. Une guerre dont il ne sortira pas indemne psychologiquement...

Afrique du Nord ? Moyen Orient ? Rocailleux et écrasé par un lourd et brûlant soleil, le théâtre d'opération défini par Dumont est imaginaire et filmé avec un ton glacé. Le film n'épargne rien au spectateur plongé au cœur d'un voyage au bout de l'enfer. Une descente aux enfers qui se poursuit après le retour du champ de bataille et maintient le spectateur dans une position inconfortable sublimée par d'interminables moments de silence. Bruno Dumont ne cesse d'étonner et de confirmer l'étendue de son incroyable talent. A voir absolument !

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LA HONTE

Titre original : Skammen

Film suédois d'Ingmar Bergman (1968)

Jan et Eva Rosenberg vivent reclus sur une île et vouent une passion inconditionnelle pour la musique dans un monde en proie à une guerre lointaine. Une panne de radio suivie d'autres incidents mineurs précipitent progressivement l'île dans le conflit. Les comportements de chacun se modifient radicalement. Jan se montre ainsi de plus en plus agressif envers Eva. Arrêtés tour à tour par les conquérants et les libérateurs, les amoureux sont relâchés sur ordre de leur ami, le colonel Jacobi. Eva s'offre au colonel bientôt fusillé sous leurs yeux. Les musiciens prennent la fuite en compagnie d'autres fugitifs en barque sur une mer jonchée de cadavres. Ils savent que, désormais, plus rien ne sera comme avant...

L'histoire de deux civils ordinaires plongés dans un conflit imaginaire aussi banal qu'insoutenable. Avec brio, le réalisateur démontre l'intrusion de la violence et les irréversibles bouleversements qu'elle engendre. Les deux individus sont littéralement pris au piège et otages d'un monde qui ne les concerne pas. Une anomalie dans la filmographie de Bergman qui parvient à montrer la guerre avec un indéniable talent conjugué à une parfaite psychologisation des protagonistes. Un chef d'œuvre !

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LA LIGNE ROUGE

Titre original : The Thin Red Line

Film américain de Terence Malick (1998)

1942, la bataille de Guadalcanal fait rage dans le Pacifique. Le cadre paradisiaque est trompeur. Au milieu de tribus amérindiennes otages d'un conflit étranger, soldats américains et nippons se livrent une lutte sans merci, dont aucun combattant ne sortira indemne. Au sein de la Charlie Company, le fantassin Witt, accusé d'avoir déserté, bénéficie de la clémence du sergent Welsh. Le chemin menant à l'objectif, la colline 210 défendue par un solide bunker, semble interminable et la préparation d'artillerie semble bien mince. De nombreux soldats gisent déjà au sol. Les survivants sont assoiffés. Il n'y a plus d'intendance... Le capitaine Staros refuse de poursuivre l'assaut commandé par sa hiérarchie, estimant qu'il s'agit d'une mission-suicide. Après de longues heures d'attente, une patrouille de sept hommes est chargée d'effectuer la reconnaissance des abords de la colline 210. Le G.I. Witt en fait partie...

Witt et ses compagnons d'armes étaient de simples civils peu auparavant. Qu'a-t-il bien pu s'opérer pour qu'ils se muent en bêtes de guerre ? Malick livre ici une formidable réalisation sur le vécu d'une troupe et mêle très habilement l'alternance de scènes d'effroyables combats avec de longs plans sur la faune et la flore insulaires et le quotidien d'indifférentes tribus autochtones plongées, malgré elles, dans l'une des plus sordides boucheries. Autre habileté : l'utilisation de la voix off pour accentuer le caractère tragique de la guerre. A voir absolument!

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SIGNES DE VIE

Titre original : Lebenszeichen

Film allemand de Werner Herzog (1967)

Pendant la Seconde Guerre mondiale, un jeune soldat du Reich, Stroszek, est blessé et envoyé en convalescence dans un dépôt de munitions dont il assure la garde sur l'île de Crète. Loin du tumulte de la bataille et réduit à l'inaction, le soldat occupe le temps en s'astreignant à d'inutiles tâches qu'il juge nécessaires à son équilibre psychique. Le conscrit pourrait mener une vie paisible dans cette forteresse que nul ne menace, en compagnie d'une jeune femme grecque dont il fait son épouse et deux autres camarades. Mais face à l'interminable attente, Stroszek sombre progressivement dans la folie et devient dangereux pour son entourage...

Premier long-métrage du génial Werner Herzog. Et c'est une réussite ! Stroszek, symbole du combattant déchu de sa guerre, orphelin de sa mort, que ses gestes dérisoires pour se maintenir parmi les guerriers attirent vers la déraison. Quel contraste entre la violence d'une guerre et le pacifique calme solaire de cette île du Dodécanèse où le temps semble s'être arrêté ! Herzog filme magnifiquement la lente dégradation des rapports entre ces êtes que la guerre a oubliée. Une œuvre oppressante !

Virgile / C.N.C.

Note du C.N.C.: Toute reproduction éventuelle de ce contenu doit mentionner la source

vendredi, 06 mars 2015

Ernst Jünger, il soldato che discuteva di mitragliatrici con Heidegger

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Ernst Jünger, il soldato che discuteva di mitragliatrici con Heidegger

Dalla sua avventurosa vita – quasi come ricordi del ragazzino di famiglia scappato di casa per arruolarsi nella Legione Straniera – da lì, sono riemerse le tracce di ferite. Nelle screpolature della sua pelle di vecchissimo, come tracciati di radici profonde, per la marchiatura del tempo, sono sbucati dal buio dei ricordi i segni cavallereschi, le tacche sulla carne. Nessuno per esempio aveva notato sull’avambraccio un segno secco. Forse occultato dalla rigenerazione della vita quotidiana, ieri, la morte glielo ha ripescato: disteso lungo il suo percorso raggrinzito di corpo morto. Dei suoi capelli bagnati nell’acqua gelida del fiume, bianchissimi fili, la rigidità cadaverica ha catturato l’impercettibile alito, un elmo che è quasi un’aureola. Una foto in bianco e nero restituisce il taglio all’altezza delle orecchie, a nuca nuda, in parallelo con gli alettoni aerodinamici del cappottone d’ordinanza. Le linee telefoniche raccontano già della “mobilitazione totale“ del governo, dei potentissimi professori, degli “amici francesi“, che sul grande morto – innamorato come tutti i morti del ricordo di tutto ciò che è vita – stanno “approntando il memoriale“. Tedesco e “parigino“ a un tempo, della sua avventurosa vita, per tutti i centodue anni portati in faccia al mondo per lui sempre più estraneo, Ernst Jünger porterà sulla bara il fasto di un’esistenza eccezionale, dentro la bara invece, trascinerà “l’addio al mondo“. Era anche un dandy: “La volontà regna sul mondo diventato materiale dell’oggettivazione incondizionata”. È stato “sublime” (glielo diceva un altro dandy). Disse, un giorno, a fondamento del suo destino: “Meglio un delinquente che un borghese”. Sublime bacchettatore di Hitler, che pure era stato suo sodale segreto nella “società di Thule”, schizzinoso rispetto alla pietas del demos, al fondatore del Terzo Reich, rinfacciava sempre l’eccessivo democraticismo, l’insopportabile volgarità plebea delle “camicie brune”. Qualcuno commissionò l’eliminazione di Jünger, Hitler che candidamente lo riconosceva “come un superiore in gradi”, un “vero capo”, lo salvò dai sicari.
Nella sua essenza di testimone, nel suo essere stato passeggero dei battelli a vapore e del Concorde, nel suo essere stato tutto quel che Ernst Jünger è stato, hippy e notabile prussiano, entomologo e romanziere, arrivando adesso all’Oriente Eterno, chiuderà la sua estrema scommessa. Al cospetto dell’Onnipotente, certamente, da algido chirurgo del Nulla qual è, l’orologiaio del Nichilismo sta portando sulle sue spalle di grande morto, l’immagine a lui più profondamente vera, la sua forma, e dunque la divisa. Dell’habitus militare, Jünger ha offerto l’esempio assoluto. Scrittore, infaticabile diarista, interlocutore e protagonista in quell’officina di vampe che fu la Rivoluzione Conservatrice, Jünger non chiude solo un capitolo nella storia della letteratura, ma brucia con la sua morte l’ultimo modo possibile di essere “uo­mo d’arme”. Arrivando davanti a Dio, infatti, davanti al Dio lungamente cercato nelle sua passeggiate quotidiane nel piccolo cimitero del suo villaggio, la sua anima si specchia levigata nella ruvida stoffa grigioverde del soldato. È morto il soldato dunque, l’ultimo vero soldato planetario, erede di Ludovico Ariosto e di Ercole Saviniano Cirano de Bergerac. Innamorato del sogno cavalleresco, ad Alberto Moravia, in un’intervista-dialogo confidò: “Nella guerra nucleare i due giocatori faranno saltare in aria la scacchiera”, e non si capì bene se il cruccio nucleare fosse, per il vecchio Jünger, più un fastidioso ostacolo per la guerra o per la pace. Ritenuto a torto purificato nel dopoguerra, ma forse fortunatamente non troppo purificato, nelle lunghe passeggiate con Martin Heidegger e Carl Schmitt, dopo i primi quindici minuti di conversazione metafisica, arrivati a un altopiano, si lasciavano prendere la mano da altre curiosità, tipo: “Secondo voi, una mitragliatrice collocata qui, quale inclinazione di tiro potrebbe avere?”. Combattente volontario delle due guerre mondiali, di due sconfitte, della prima ne ricordava “di Londra, Parigi e Mosca, lo straordinario entusiasmo della gioventù, l’ebbrezza”, della seconda intuì da subito l’ambiguità: “O ci sarà una rivoluzione, o sarà una lunghissima guerra di trincea, come nel 1914-1918”. Nato a Heidelberg nel 1895, Ernst Jünger è stato decorato due volte con la Croce di Ferro, la più alta onorificenza a cui ogni galantuomo belligerante avrebbe potuto aspirare. La prima l’ebbe dalle mani dell’Imperatore, la seconda, invece, l’ha ricevuta dal suo maldestro allievo, per aver salvato dei dissennati che si erano spinti troppo avanti nella trincea nemica per scattare delle fotografie. Disse: “Fui comunque divertito dall’idea di ricevere la Croce di Ferro per la seconda volta”. Era anche un dandy.

Pietrangelo Buttafuoco

Il 17 febbraio di 17 anni fa moriva Ernst Jünger.

jeudi, 19 février 2015

Notes on Nihilism

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Notes on Nihilism

By Greg Johnson 

Ex: http://www.counter-currents.com

It is often said that nihilism is one of the leading characteristics of the modern age, but what is nihilism? Nihilism means something like the “death” of God, the denial of objective meaning and value, the erasure of moral distinctions and hierarchies, the dissolution of a common world into individual perspectives, and the dissolution of a common culture into subjective “given preferences.” 

Nietzsche defines nihilism as the devaluation of the highest values, the core values, of a civilization. On that account, to understand nihilism we must, therefore, grasp: (1) the nature of values, (2) the role of values in life, (3) the nature of the claim that values make upon us, and (4) how it is possible for values to lose their claim upon us. I propose that we answer these questions through an examination of four thinkers: Giambattista Vico (1668–1744), Søren Kierkegaard (1813–1855), Friedrich Nietzsche (1844–1900), and Ernst Jünger (1895–1998).

Nietzsche on Life and Values

Nietzsche called the ultimate constituent of the world Will to Power. This is a highly anthropomorphized name for something that is neither a will (for there is no agent behind it that wills) nor is it “to power” (for it is not directed toward the goal of power, or any other goal). Will to Power is Nietzsche’s name for chaos, which he conceived of as a virtual infinity of points of force charging and discharging entirely without pattern or purpose.

Chaos somehow gives rise to life, life to consciousness, and consciousness to self-consciousness. Self-consciousness, however, presents a problem for life, because self-conscious beings demand reasons for continuing to live; they demand meaning and purpose in life. And this is a demand that chaos cannot meet. In a world of chaos, all options are equal. Nothing is any better or any worse than anything else. No option is preferable to any other. Choosing is not preferable to not choosing. Action, therefore, is fundamentally irrational. There is no reason to get out of bed in the morning. There is no reason to prefer continued existence to non-existence. Nothing matters. Nothing makes a difference. This is a condition so terrifying to self-conscious beings that they are annihilated when they encounter it directly.

Life, however, goes on. It preserves itself behind the back of consciousness by manufacturing values. These manufactured values are fictions which consciousness mistakenly thinks it discovers as objective facts. Fictional though they may be, values change everything. Once values are created, some things show up as better than others; some actions show up as better than others; some things show up as goals to be pursued; others show up as evils to be avoided. Life takes on meaning, purpose, and structure. Things begin to make a difference. One suddenly has a reason to get out of bed in the morning. Life can go on. The truth of chaos is a truth that kills. But the lie of values is a lie that we can live with. It is a necessary lie, a noble lie.

For Nietzsche, nihilism results when the core values of a culture cease being believed. There are two types of nihilism: passive and active. The passive nihilist deeply identifies with the core values of his civilization. Thus be experiences their loss as demoralizing and devitalizing. The active nihilist primarily experienced the reigning values as impediments to the freedom of his desires and imagination. Therefore, he experiences their downfall as liberating. For Nietzsche, the age of nihilism will be terminated by a particular kind of active nihilism: setting up and imposing new core values for a new civilization.

Vico & Cassirer

At this point, I wish to add an aside on the accounts of the origins of language, myth, and culture offered by Giambattista Vico (1668–1744) and Ernst Cassirer (1874–1945), for I think that these naturalistic accounts are broadly compatible with Nietzsche’s account of the origins of values and they supplement it nicely by describing the concrete embodiment of values in language, myth, and culture. Vico and Cassirer give essentially the same account of the origin of language and myth, for both hold that the first words were proper names of gods, and around these names grew up mythologies and languages which formed the cores of cultures.

Vico-223x300.jpgVico offers a wonderful myth to illustrate the origins of language and myth. After the biblical flood, when the Earth was drying out and slowly re-populating, the sons and grandsons of Noah went back to nature, becoming very much like the Natural Man described in Rousseau’s Discourse on the Origins of Inequality. They lost all arts and sciences, organized families and communities, myth and religion, and even the use of language. And, because they also lost personal cleanliness and wallowed in their own urine and feces, Vico claimed—in accordance with an old wives’ tale then current in his hometown of Naples—they grew to a gigantic stature. Thus Vico offers us a picture of giants, devoid of language and culture, without families or cities, wandering alone in a vast forest that covered the drying Earth, occasionally bumping into one another and fornicating and then going their separate ways.

Eventually, though, evaporation from the drying Earth brewed up huge thunderstorms—thunderstorms greater than any seen before or since, thunderstorms that blanketed the entire Earth, and from the storm came a flash of lightning that lighted up the entire world and a mighty clap of thunder that shook it to its foundations, and the giants cried out in their terror a single word: “Jove.”

Jove was the first word. It is a proper name. And what it names is a terrifying force of nature. But when this force is named Jove and personified, something remarkable happens. The storm is no longer such a terrifying mystery. Rather, it is the product of a deity who has his reasons for sending it. The storm suddenly becomes intelligible. Furthermore, if we can discover the reasons behind the storm, then perhaps we can avoid riling Jove up. Or, if we can find his price, we can bribe him. Either way, we gain some control over our world. Myth and language, then, are man’s first attempts to master and understand an otherwise chaotic, inscrutable, and terrifying world.

But note that the origins of language and myth are pre-rational or irrational. They are not deliberately constructed, but spontaneous and automatic reactions to environmental stimuli. Nobody sat down and created languages and myths as conventions. Rather, the existence of conventions already presupposes the existence of a common language and a common community which can discuss and agree upon the adoption of certain conventions.

But if language and myth, culture and values are pre-rational fictions, then what kind of claim can they make upon us? What would motivate us to believe and follow them? What is the source of their authority and allure? For an answer to these questions, we turn to Kierkegaard.

Kierkegaard on the Claim of Values

Kierkegaard_4480.jpegSøren Kierkegaard was the first self-proclaimed “existentialist.” Kierkegaard, like many skeptics and fideists, reverses the traditional philosophical valorization of theory over practice. Kierkegaard holds that it is practical, engaged activity, not disengaged theoretical reflection, that gives us access to the true and the good. We learn what is true and what is good through being socialized into a community and culture, and the process of socialization is primarily a practical matter.

We learn by doing—by doing as others do around us, by imitating authoritative persons and following their commands. We learn what is true and what is good by apprenticeship in the concrete institutions and practices of a society, and the true and the good are accessible to us only so long as we participate in these concrete institutions and practices and recognize their authority.

In short, the primary locus of values is culture. The primary means of disseminating values is enculturation. And the authority of values derives from our pre-reflective, pre-rational identification with our culture and way of life.

Because values are disclosed through practice, not theory, their claim upon us is pre-rational. Therefore, the attempt to use reason to reflect upon, criticize, and perhaps give a foundation for our values, serves instead only to alienate us from them by weakening our pre-rational commitments to them.

In his 1846 work, The Present Age, Kierkegaard described how reason and reflection had undermined all authoritative institutions and practices of Western culture, thereby undermining commitment to its core values, leading to the collapse of moral distinctions, the flattening out of moral hierarchies, and the subjectivization of values. He prophesied the coming of a nihilistic age.

Kierkegaard’s question was how to regain a meaningful existence, how to save values from withering away from a sickly and effeminate rationalism, how to claw our way out of the quicksand of passive nihilism. Kierkegaard’s answer was simple: Each individual must make a conscious and absolute commitment to some form of life and its constitutive values. Once we make such a commitment, the world is no longer a matter of indifference to us; things again show up as good or bad, right or wrong—so long as we maintain our commitment unwaveringly. In short, for Kierkegaard the cure for passive nihilism is active nihilism—and the fact that Kierkegaard’s own commitment was to Christianity makes that commitment no less nihilistic.

Jünger on Technology and the Death of Values.

Ernst-Jünger-1954-1.jpgErnst Jünger is in essential agreement with Nietzsche on the origin and nature of values and with Kierkegaard on the nature and cure for nihilism, but he adds a significant new dimension to our understanding of the means by which nihilism comes to reign. It is an account that profoundly influenced Heidegger, and with which Heidegger was in essential agreement.

The central concept of Jünger’s account of nihilism is technology. If values are fictions posited by life to sustain itself, and if values are encoded in and transmitted through concrete cultural institutions and practices, then one can see culture as a protective wall that we erect against the enervating terrors of a chaotic reality. For Jünger, modern technology is the Trojan Horse that leads us to open the gates of culture to the overwhelming forces of chaos.

Modern technological civilization is a form of culture. But it is a form of culture that undermines all other forms of culture—and also undermines itself as a culture—for the modern technological worldview is premised on the use of reason, science, and technology to progressively liberate mankind from all external and irrational impediments to the satisfaction of his desires.

While the ancients experienced nature as a fixed an eternal order founding and bounding the realm of human action, moderns experience nature as simply a pile of resources that are, in principle, infinitely transparent to human knowledge and infinitely malleable to human ends. From the technological point of view, there are no fixed boundaries to human action; there are only temporary impediments that will eventually yield, in time, to better science and better technology.

Unfortunately, however, the technological mentality regards values and their concrete cultural and institutional embodiments in religion, myth, and practice as such impediments. Values, after all, arise out of pre-rational or irrational sources. They are by necessity falsifications of reality. And they impose limitations on the technological satisfaction of our desires.

How many of us sigh and shake our heads bitterly when we hear of people refusing their children blood transfusions and vaccinations “merely” on religious grounds, merely in the name of something sacred? Technological civilization must, therefore, set itself at war with myth, religion, tradition, custom, values, and the kind of pre-rational attachments that, for instance, make us want to help our own children even though other people’s children might need our help more.

However, as we progressively bargain away more and more of the sacred and the moral for the benefits of technological culture, we also bargain away the sanctity and dignity of our own humanity; we find ourselves slowly transformed from sovereign subjects employing technology to satisfy our desires, into passive objects of technology.

For instance, we find that more and more of our desires are supplied by the imperatives of the very technological system that was designed to satisfy them. Once our activities are determined not by ideals and values, but by bodily desires—by our pre-cultural, naturalistic selves—the body, not the soul, becomes the subject, the driving agent, of the technological system.

But the body’s agency is illusory, for the body is—and always has been—primarily the object, not the subject, of technological manipulation. From makeup and fashion to piercing and tattooing, from diet and exercise regimens to plastic surgery to genetic engineering, the body is the object of technological manipulation, largely in response to imperatives generated by the technological system itself.

In our pursuit of freedom through the mastery of our environment, we soon discover that each one of us is an object in somebody else’s environment, and that the other side of mastery is domination. But it is a form of domination in which everybody is an object and nobody is a subject, i.e., it is domination without a dominator, domination by an impersonal technological machine that grew as an unintended consequence of individual actions, that was not consciously designed by anyone, and that cannot be consciously controlled by anyone.

Domination without a dominator is another way of speaking of will without a willer; it is another way of speaking of the Will to Power. The Will to Power is the very chaos that culture was supposed to protect us from. But technological culture, by undermining the pre-rational origins, necessary falsehoods, and constitutive values of culture, has brought the Will to Power into the heart of human world and installed it as our master.

The most chilling image of the triumph of the technological Will to Power are the “Borg” in Star Trek—The Next Generation. The Borg are humanoid creatures whose lives became so intertwined with technology—including technological implants in their own bodies—that they lost all individual consciousness and became almost literally mere cogs in their own machines They became objects, not subjects, of an autonomous technological system. And although this system had attained a collective consciousness of its own, which drowned out the individual consciousnesses of its humanoid components, the Borg collective mind is driven by a single imperative: to assimilate all other technologies and all other living beings into its technological system. Why? There is no ultimate end beyond the simple continuation of the process itself. The Borg assimilate only in order to continue to assimilate. The Will to Power wills only one thing: the continuation of its willing.

What is Jünger’s solution to technological nihilism? Jünger believed that the technological Will to Power is unstoppable, that it will subjugate the entire Earth and the entire universe, that nothing can stand in its way. Jünger’s experiences in the trenches of the First World War led him to believe that the war was an autonomous technological system, a human creation that quickly escaped the control of its creators and subjected them to the technological imperatives of its own continued existence. All moral and political motivations, all policy objectives, all means-ends rationality became moot, but the war went on; it carried itself on, simply for the sake of carrying on. Jünger became convinced that the only way to understand the phenomenon of total and autonomous war is to view it as an expression of the Will to Power, as its unstoppable volcanic eruption into the human world.

And, if you can’t beat it, join it. Jünger was convinced that the only way to salvage some meaning from the unfolding of technological nihilism was to submit oneself to it, to will the inevitable, and thus to internalize it and make it one’s own. In Battle as Inner Experience, he writes:

All goals are past, only movement is eternal, and it brings forth unceasingly magnificent and merciless spectacles. To sink into their lofty goallessness as into an artwork or as into the starry sky, that is granted only to the few. But he who experiences in this war only negation, only inherent suffering and not affirmation, [not] a higher movement, experiences it like a slave. He has no inner, but only an external experience.

Like Kierkegaard, Jünger holds that the solution to passive nihilism is active nihilism, which still leaves us within the realm of nihilism.

Heidegger

heidegger-1.jpgIs there a fundamental alternative to nihilism? Is there an alternative to strong wills positing or negating values? Is there an alternative to weak wills receiving or losing the values imposed or negated by others? Is there an alternative to all this willing? For the root of nihilism is the will—specifically, the inflation of the will to the point that it becomes the defining trait of Being itself. Martin Heidegger’s philosophical project can be understood as an attempt to overcome nihilism at its root, the inflation of the will into the meaning of Being.

Heidegger’s account of nihilism agrees with Nietzsche’s account of the origins and the nature of values, with Kierkegaard’s account of the cultural embodiment and transmission of values, with Kierkegaard’s account of the role of reason in the undermining of commitment, and with Jünger’s account of technology as the Trojan Horse that allows the Will to Power to invade and conquer the human world. But Heidegger does not agree with their solutions, which all boil down to replacing passive nihilism with active nihilism. For active nihilism is still nihilism.

Overcoming nihilism, however, is no simple task. For Heidegger traces the metaphysics of the will back to the origins of Western metaphysics. Thus to overcome nihilism, we must overcome metaphysics. But Heidegger does not see the metaphysical tradition as merely a record of human errors, but as the product of Being’s self-concealment. Thus trying to overcome nihilism, or trying to overcome metaphysics—as if they are merely human errors that can be corrected by human means—is itself essentially nihilistic. We may only be done with nihilism when we accept the possibility that nihilism may not yet be done with us.

 

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lundi, 16 février 2015

Ernst Jünger e ‘La battaglia come esperienza interiore’

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Ernst Jünger e ‘La battaglia come esperienza interiore’

Jünger sconquassa l'anima del lettore, lo cattura con la sua scrittura; lo tiene inchiodato al libro pagina dopo pagina, in una stretta mortale dalla quale non potrà districarsi facilmente. Questo è un libro per anime in tempesta, per cuori d'acciaio, scritto con il sangue degli eroi.
 

di Valerio Alberto Menga

Ex: http://www.lintellettualedissidente.it

“Meglio morire come una meteora effervescente che spegnersi tremolando”.

E. Jünger

In occasione del centenario della Prima guerra mondiale tante sono state le pubblicazioni in memoria del grande e catastrofico evento. Si segnalano, di passata, per la saggistica Mondadori e Laterza, i saggi dello storico Emilio Gentile L’Apocalisse della Modernità e Due colpi di pistola, dieci milioni di morti, la fine di un mondo. Due titoli straordinari per l’efficacia che ha avuto l’autore nell’interpretare il primo confilitto mondale e la sproporzione delle conseguenze seguite all’attentato di Sarajevo del 1914. A distanza di 92 anni dalla sua originaria apparizione, e per la prima volta in italiano, è stato pubblicato per le edizioni Piano B (e magistralmente tradotto da Simone Butazzi, che si ringrazia) quella che era stata, a torto, considerata un’opera minore nella bibliografia di Enrst Jünger: La battaglia come esperienza interiore.

Fu un’innovazione quella che portò Jünger alla letteratura di guerra. Embelatici erano, e rimangono tutt’ora, Il fuoco di Barbusse e Niente di nuovo sul fronte occientale di Remarque. Questi due autori furono le due principali voci di un atteggiamento di sconforto, di orrore, di paura, di delusione, e di disfattismo davanti alla guerra.  Lo stesso atteggiamento che portò Louis-Ferdinand Céline, volontario nell’esercito francese, a riflessioni come quelle che compaiono nel suo Viaggio al termine della notte: “Per quanto lontano cercassi nella memoria, gli avevo fatto niente io, ai tedeschi. Ero sempre stato molto gentile ed educato con loro. Li conoscevo un po’ i tedeschi, ero persino stato a scuola da loro, quando ero piccolo, dalle parti di Hannover. Avevo parlato la loro lingua. Allora erano una massa di cretinetti caciaroni con occhi pallidi e furtivi come quelli dei lupi […] ma da lì adesso a tirarci nella colombarda, senza neanche venire a parlarci prima e nel bel mezzo della strada, ce ne correva parecchio, un abisso. Troppa differenza. La guerra insomma era tutto quello che non si capiva”. Jünger invece – come giustamente sottolinea Rodolfo Sideri nel suo Inquieto Novecento- è interprete di un atteggiamento “volto a lasciare che la guerra tempri l’uomo nella sua dimensione interiore”.

Ma che cosa è stato esattamente Ernst Jünger? Qual è la sua maggiore peculiarità? E’ stato uno scrittore? Un soldato? Un filosofo? Nacque in Germania, ad Heidelberg, nel 1895. E morì nel 1998 a Riedlingen, avendo sorpassato la soglia dei cento anni, dopo aver visto morire il fratello, i figli e la prima moglie. Per la lunga durata della sua vita fu indubbiamente il prezioso testimone di un’epoca. È stato anche un entomologo. Non deve certo stupire se un grande carattere del Novecento come lui si sia interessato allo studio e alla collezione di scarafaggi e scarabei. Ai suoi occhi guerrieri, essi apparivano un po’ come animali con una corazza naturale che, talvolta, riflettono i colori della guerra: il rosso e il grigio. Piccoli soldati di Madre Natura.

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Il rosso e il grigio, quindi. Ecco i colori che attraverso lo sguardo del grande scrittore tedesco hanno determinato la Grande Guerra. E Le rouge et le gris –in onore a Stendhal- doveva essere il titolo originale del grande diario di guerra Nelle tempeste d’acciaio che gli valse, di diritto, un posto nel pantheon dei grandi scrittori europei del Novecento. Tuttavia optò per il secondo titolo, ispirato ad una poesia islandese, che meglio definiva “l’eternità tombale” della vita in trincea durante la guerra. Rosso come il sangue; grigio come le divise dei soldati, come l’acciaio delle armi e dei proiettili, come l’umore in trincea, come la terra devastata dai colpi, come il cielo oscurato dalla battaglia.

Incuriosisce il fatto che La battaglia come esperienza interiore era stato concepito dall’autore come un’opera che avrebbe dovuto fare da pendant al precedente Nelle tempeste d’acciaio, il cui punto di vista si riferiva agli avvenimenti puri e semplici. In quest’opera, invece, si può trovare tutto ciò che nelle “Tempeste” si era cercato invano.
Nelle tempeste d’acciaio ha il merito di descrivere nel titolo, e in due parole, la guerra di trincea.  Interpreta il primo conflitto mondiale in chiave nichilistica (come “lotta dei materiali”), osservando la realtà con sguardo oggettivo. Il difetto maggiore che però la caratterizza è la mancanza dello spazio concesso alle emozioni e al sentimento. La battaglia come esperienza interiore colma questo vuoto. E può annoverarsi senza dubbio tra le grandi opere di Jünger, grazie alla sua prosa alta e inarrivabile.Prima di aprire questo libro bisogna preparare il lettore ad entrare psicologicamente in trincea. Bisogna essere pronti a ricevere lo schizzo del sangue nemico dritto in faccia. Se invece siete tra coloro che non sopportano di guardare la realtà negli occhi, allora lasciate in pace questo libro.

Stosstruppen_rappresentazione.jpg“La battaglia rientra nelle grandi passioni. [...] E’ un canto antico e tremendo, che risale all’alba dell’uomo: nessuno avrebbe mai pensato che fosse ancora così vivo in noi”.  In questo scritto di guerra non manca nulla: il sangue, l’orrore, la trincea, l’eros, il coraggio, il fuoco, la paura… Questo per dare un’idea di ciò che aspetta il lettore che abbia il coraggio e la maturità di affrontare quest’opera rovente, che di certo non poteva non piacere ad un giovane nazional-socialista dei tempi. Perché Jünger è stato considerato, e forse è considerato ancora, un nazista. E’ vero che Hitler disse “Jünger non si tocca!” e lo protesse per ben due volte dalle grinfie di Göring che voleva la sua testa. Ma furono il rispetto per il soldato e lo scrittore di guerra che, con tutta probabilità, spinsero il Führer a perdonare a Jünger il suo comportamento. Ci si riferisce al suo antinazismo allegorico, aleggiante nel romanzo Sulle scogliere di marmo, e alla sua parte nella congiura capitanata da Stauffenberg che sfumò nel fallito attentato a Hitler, ben narrato nel film di Bryan Singer Operazione Valchiria. Scrisse un romanzo antinazista e partecipò all’attentato a Hitler, che mirava ad ucciderlo. Anche se in lui l’idea dell’uccisione del tiranno era indicice di mentalità rozza. Queste due cose stanno ben a sottolineare il fantomatico nazismo di cui fu accusato. Ma agli occhi stanchi e superficiali dei molti faciloni, è apparso così per molto tempo. È vero invece che i nazisti trassero, a piene mani, buona parte della loro cultura da alcuni scritti del grande soldato tedesco. Solo in seguito al premio Goethe, ottenuto nell’82, venne riabilitato ufficialmente come scrittore.

Davanti ad un uomo come lui è difficile dire se sia l’opera a superare la grandezza della vita dell’autore o viceversa. Jünger visse più di cento anni, giovanissimo si arruolò nella Legione Straniera per andare a combattere, per poi essere ripescato e rimpatriato dal padre. Fu un eroe decorato con la medaglia Pour le mérite dopo esser stato ferito quattordici volte nella Grande Guerra; vide due volte la cometa Halley (cha ha un ciclo di 76 anni); fu amico di Martin Heidegger e Carl Schmitt, e con essi scrisse alcune opere. Ha incontrato molti grandi del suo tempo, e in tutta la sua opera ha analizzato e affrontato il nichilismo, che è il tratto peculiare del suo e del nostro tempo. Da entomologo ha scoperto due nuove specie di coleotteri che oggi portano il suo nome: il Carabus saphyrinus juengeri e la Cicindera juengeri juengerorum. Da scrittore, invece, ha incantato il mondo e continua ad incantare, ad accendere le passioni e il pensiero.

La battaglia come esperienza interiore è un’opera scritta da un giovane inquieto che vuole conciliare il pensiero con l’azione. Qui vi si ritrova uno Jünger intriso di letture nietzscheane che, con la sua prosa alta e viscerale, scava nel profondo dei più indicibili sentimenti che hanno portato l’uomo moderno a scontrarsi, a riversare la propria Volontà di potenza nel campo di battaglia. Per il lettore che ama sottolineare i tratti più salienti, quest’opera, strage di carne e materia, sarà anche una strage di grafite. E si spera che, quindi, chi leggerà queste righe, perdonerà a chi scrive se si è fatto ampio uso di doverose citazioni. Lo stile dello scrittore-soldato porta lo spirito del lettore a vette così alte che il ritorno alla terra scavata dalle trincee è un vero e proprio schianto del cuore. Sconquassa l’anima del lettore, lo cattura con la sua scrittura; lo tiene inchiodato al libro pagina dopo pagina, in una stretta mortale dalla quale non potrà districarsi facilmente. Questo è un libro per anime in tempesta, per cuori d’acciaio, scritto con il sangue degli eroi.

Solitario tra i solitari, Jünger mostra il volto del gelido vento della morte, riscaldato dall’alito di fuoco di quella fornace che è la guerra. La figura romantica del soldato Jünger che legge l’Orlando furioso piegato sulle ginocchia, in trincea, rende bene l’idea del sentimento che lo portò ad arruolarsi volontario in guerra. L’odio per la comoda vita borghese è ben descritto in queste righe: “Ogni senso di reputazione borghese era rimasto indietro, a distanze siderali. Cos’era la buona salute? Utile, semmai, a persone che contano di vivere a lungo”. Nota è ormai la massima jungeriana per cui è meglio essere un delinquente che essere un borghese. Un giovane inquieto come lui, in Italia, in seguito dirà che “Borghese è colui che sta bene ed è vile” (Benito Mussolini).  Questo libro breve ma intenso potrebbe essere preso a ragione come il Manifesto degli interventisti o dei militaristi. Per l’autore è la guerra a fare gli uomini, essa è “madre di tutte le cose”, siamo noi a modellare il mondo, non il contrario. La guerra, aggiunge, non è solo nostra madre, ma anche nostra figlia. L’abbiamo cresciuta così come ha fatto con noi. “Noi siamo fabbri e acciaio sfavillante allo stesso tempo, martiri di noi stessi spinti da intime pulsioni[...] La guerra è umana quanto l’istinto sessuale: è legge di natura, perciò non ci sottrarremo mal al suo fascino. Non possiamo negarla, altrimenti finiremo divorati.”

Qui di seguito ecco alcuni passaggi che meglio sottolineano le ragioni e le passioni che portarono Jünger, come altri uomini, a provare loro stessi sul campo di battaglia, in quel particolare frangente della Storia. Molte erano le aspettative di coloro che si arruolarono volontari negli eserciti delle grandi nazioni europee: “La guerra è una grande scuola, e l’uomo nuovo apparterrà alla nostra schiatta”. E poi, scriverà: “Il punto di cristallizzazione pareva raggiunto, il superuomo in procinto di arrivare[...] Tutto questo sembrò chiaro quando la guerra lacerò la compagine europea”. Queste le parole dello Jünger soldato, filosofo e scrittore. Egli incarna le pulsioni e i turbamenti dell’uomo del Novecento che si affaccia con volto risoluto alla Modernità. E si scontra. Se il Novecento è stato il grande secolo delle ideologie e della politica, così come dei grandi conflitti, vale allora la formula di Clausewitz per cui la guerra è la semplice continuazione della politica con altri mezzi, che nasce in seguito alla “frizione”. Arriva, cioè, laddove la diplomazia non è riuscita. E per gli appassionati della polemologia questa è una lettura consigliata. Molte le passioni e i sentimenti che scaturiscono in queste pagine, ma vi è anche spazio per la riflessione. Un giusto equilibrio tra ragione e sentimento.

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“Ognuno può rapportarsi alla guerra come vuole, ma non la può negare. Quindi io m’impegno, in questo libro nel quale mi voglio rassegnare alla guerra, a osservarla come qualcosa che è stato ed è ancora in noi, a privarla di ogni preconcetto e a descriverla per quello che è.” E poi ancora: “La guerra è il più potente incontro tra i popoli. Mentre nel commercio e per le trattative, nelle gare sportive e ai congressi si muovono solo le personalità di punta, in guerra l’intera squadra conosce un solo obiettivo: il nemico”. Non è possibile la guerra senza l’uomo. Né l’uomo senza la guerra. Questa assumerà di volta in volta il volto e il nome che l’occasione le suggerirà: battaglia, lotta, lo scontro, frizione, incidente diplomatico…


Il coraggio è un sentimento, fulcro della guerra per Jünger: “Un soldato senza coraggio è come un Cristo senza fede. Ecco perché in un esercito il coraggio deve essere quanto di più sacro”. Nelle “Tempeste d’acciaio” si leggono parole di riconoscimento del valore e del rispetto del nemico: “Durante la guerra mi sforzai sempre di considerare l’avversario senza odio, di apprezzarlo secondo la misura del suo coraggio. In battaglia cercai di individuarlo per ucciderlo, senza attendere da lui cosa diversa”. Nessun odio verso i nemici. I Francesi? “Sono dei gran viveurs, loro. Gente gradevole, davvero. Io non li odio mica.” E poi: “Chi saremmo noi senza questi vicini audaci e senza scrupoli che ogni cinquant’anni ci puliscono la ruggine dalle lame?”.

Al nemico viene riconosciuto il valore del suo coraggio. E ne La battaglia come esperienza interiore scrive: “I cuori coraggiosi riconoscono istintivamente la vera grandezza. Il coraggio riconosce il coraggio”. Ecco una delle sue massime maggiori: “Il mondo potrà anche ribaltarsi, ma un cuore coraggioso sarà sempre saldo”. L’uomo di Heidelberg è figlio della guerra, figlio ed interprete acuto del suo tempo. Lui è l’uomo nato dalla guerra, nella guerra e per la guerra. Lui, cuore coraggioso, anima in tempesta. Come egli stesso sottolinea, lo spirito di un’epoca si concentra sempre in pochi individui solitari. In questo libro si può carpire lo spirito guerriero che forgiò l’Uomo nuovo della Grande Guerra. E lui è uno di quegli individui solitari, voce di un’epoca in radicale mutamento. Importante è anche il rapporto con la Donna, nelle opere di guerra di Jünger. In un altro scritto dello stesso genere, intitolato Il tenente Sturm, la donna viene definita dall’autore come “ministra del grande mistero”. E la donna non ama la guerra, ma ama i guerrieri. Curzio Malaparte disse: “Amo la guerra perché sono un uomo”. E Jünger coerentemente afferma: ” Esiste un solo punto di vista per contemplare il fulcro della guerra, ed è quello mascolino”. In uno dei capitoli più belli della Battaglia viene affrontato il rapporto uomo/donna guerra, ed in merito a ciò sottolinea: “Bisognava che anche le donne fossero d’acciaio, per non finire schiacciate nel tumulto”. Il racconto che invece viene accennato, con infinita poesia, nel capitolo Eros, riporta alla memoria l’immagine di uno studente tedesco (in cui possiamo facilmente riconoscere il giovane Ernst) e una contadina piccarda che fanno l’amore nel bel mezzo della guerra, nell’imperversare della tempesta, essi, “centrifugati su una scogliera bellica”, sono “due cuori accesi in un mondo ghiacciato”. E con queste immagini e magnifiche parole conclude il capitolo: “Due labbra accarezzavano l’orecchio dell’uomo, impegnate più che mai a versarvi tutta la melodia di una lingua straniera[...] Poi finivi sotto la grandine dei proiettili con i baci ancora tra i capelli. La morte ti veniva incontro come un’amica. Tu, chicco di grano maturo che cadi sotto la falce”. Questo è Jünger.

Per il grande scrittore di Heidelberg sembra valere il precetto di Julius Evola per cui “la patria è là dove si combatte”. E la guerra è una donna da possedere, almeno finché infuria la battaglia. L’uomo, la guerra e la donna: fili intrecciati di un inestricabile destino, di un ciclo infinito: Vita Amore e Morte. Oggi gli animi dei molti pacifisti che popolano il mondo postmoderno irriderebbero il romanticismo di cui talvolta sono impregnati gli scritti di guerra. Non potrebbero però evitare di rimanere colpiti e affascinati dallo stile di uno scrittore immenso come quello che oggi si è voluto ricordare.

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Si vuol concludere ora con due stralci tratti, rispettivamente, dalle opere Il tenente Sturm e con la conclusione de La battaglia come esperienza interiore che spiegano bene la complessità della guerra nel pensiero di Enrst Jünger: “Laggiù una stirpe nuova dava vita a una nuova interpretazione del mondo, passando attraverso un’esperienza antichissima. La guerra era una nebbia originaria di possibilità psichiche, carica di sviluppi; chi tra i suoi effetti riconosceva solo l’elemento rozzo, barbarico coglieva, di un complesso gigantesco, un solo attributo, con l’identico arbitrio ideologico di chi vedeva soltanto il carattere eroico e patriottico”.

“Ma chi in questa guerra vede solo negazione e sofferenza e non l’affermazione, il massimo dinamismo, allora avrà vissuto da schiavo. Costui avrà avuto solo un’esperienza esteriore, non un’esperienza interiore.”

dimanche, 25 janvier 2015

Ernst Jünger: vivre par les armes et les mots

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Ernst Jünger: vivre par les armes et les mots

La guerre est synonyme de souffrance et de désolation et les hommes de 14 sont les victimes de la barbarie moderne. Cent ans ont passé depuis le début de la Grande Guerre et cette opinion est aujourd’hui largement partagée ; elle anime l’esprit des discours et les cérémonies de commémoration. En Allemagne comme en France, Ernst Jünger incarne tout ce que notre Europe moderne et pacifiée ne souhaite plus voir et rejette, tout ce qu’elle a en horreur : un soldat, incarnation de cette culture martiale européenne aujourd’hui disparue, un guerrier devenu écrivain dont une grande partie de l’œuvre puise son inspiration dans les quatre années passées dans la boue et la fureur des tranchées du nord de la France.

L’œuvre de Jünger est vaste ; elle parcourt le XXème siècle, ses tourments et ses drames. Elle interroge sur les forces nihilistes à l’œuvre chez l’homme et dont l’écrivain ressentit le caractère destructeur au plus profond de sa chair, lui le guerrier blessé quatorze fois au front. Après quatre années de guerre, il est l’officier le plus décoré de l’armée allemande. Dans son premier livre, Orages d’acier, écrit dès son retour à la vie civile, il relate cette expérience inouïe de l’homme plongé au cœur de masses destructrices. À sa lecture, on s’immerge dans ce quotidien des tranchées, où alternent morne routine et actes de guerre effarants. La description des combats est précise, sans état d’âme, dépassionnée et parfois, presque esthétisante. Loin du pacifisme d’Erich Maria Remarque dans À l’ouest, rien de nouveau, l’auteur semble vivre cette guerre comme une opportunité unique de vivre ses rêves de gloire et d’aventure, forgé par une enfance bercée de héros mythologiques grecs et germaniques. Face à la fureur du feu, Jünger pour ne pas subir son destin, livré aux hasards de la guerre moderne, décide d’en devenir le maître. Par instinct de survie, pour ne pas être tué, il décide de devenir, lui même, un tueur, mais cette mort, il la veut sans haine, dans le respect de l’adversaire.

À l’heure du pacifisme béat contemporain, les soldats de la Grande Guerre sont aujourd’hui considérés comme les tristes victimes de l’histoire et du nationalisme ; des pantins craintifs envoyés à l’abattoir par des généraux ivres de sang et par des nations avides de guerre. L’expérience militaire de Jünger nous offre une vision en miroir contraire. Il y apparaît maître de son destin, attaché à la noblesse du soldat, fier du combat qu’il mène avec un cœur irrigué par un patriotisme ardent. Malgré ses horreurs, la guerre devient à ses yeux l’aventure épique au sein de laquelle l’homme peut découvrir une voie vers l’élévation, et non pas seulement une mort abjecte dénuée de sens. La guerre devient alors une expérience intérieure presque mystique, et ce, malgré l’effondrement de la conscience qu’elle engendre au cœur des combats : « La grande bataille marqua aussi un tournant dans ma vie intérieure, et non pas seulement parce que désormais je tins notre défaite pour possible. La formidable concentration des forces, à l’heure du destin où s’engageait la lutte pour un lointain avenir, et le déchaînement qui la suivait de façon si surprenante, si écrasante, m’avaient conduit pour la première fois jusqu’aux abîmes de forces étrangères, supérieures à l’individu. C’était autre chose que mes expériences précédentes ; c’était une initiation, qui n’ouvrait pas seulement les repaires brûlants de l’épouvante. »

Jünger est à la fois horrifié et fasciné par cette guerre sans nulle autre pareille alors, mais son abjection lui apparaît comme un des reflets de l’âme humaine. Il prend conscience d’être à la charnière de deux mondes, de vivre un point de non-retour. « On ressentait (…) l’inéluctable engloutissement d’une civilisation, et l’on prenait conscience en frissonnant d’être entraîné dans le maelstrom. » Le monde bourgeois qu’il a connu jusqu’alors vole en éclats et son tempérament l’amène à vouloir œuvrer à l’élaboration du nouveau monde qui va le remplacer. Cette guerre devient la matrice de ce siècle encore neuf où, malgré le chaos ambiant, l’avenir est à conquérir et une nouvelle société à construire.

D’une guerre à l’autre

Il sort de cette guerre en héros, couvert de gloire dans une Allemagne affligée par la honte d’une défaite incomprise. Le jeune officier, qu’il est alors, devient alors une des nombreuses figures de la révolution conservatrice ; ce mouvement intellectuel né dans le foisonnement culturel de la République de Weimar axé sur une critique de la modernité, un rejet du système démocratique assorti d’une franche hostilité à la société capitaliste et à certaines de ses manifestations comme l’urbanisation, l’industrialisation, le matérialisme et la perte de spiritualité. On peut voir dans ce mouvement un terreau intellectuel au fascisme, qui en partage certaines valeurs, même si la plupart de ses figures éminentes se démarqueront du mouvement nazi.

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 Ainsi, la submersion hitlérienne ne suscite pas l’adhésion de ce patriote réfractaire à toutes formes d’idéologie. Il exècre en effet l’amoralité, la vulgarité et l’antisémitisme du régime nazi et entre alors dans une opposition passive : cette émigration intérieure théorisée par Franck Thiess. Hitler développe pourtant quant à lui une fascination pour Jünger, incarnation superbe du guerrier germanique fantasmé par la plupart des hiérarques du nouveau régime.

Fort de cette admiration qui le protège face à la Gestapo et la censure, il se permet l’audace de publier en 1939 Sur les falaises de marbre, un roman allégorique mettant en scène un monde imaginaire paisible et raffiné, submergé par le Grand Forestier, incarnation du mal brisant un monde d’harmonie. On y perçoit alors une condamnation du totalitarisme hitlérien. L’ouvrage devient alors un pamphlet antinazi pour de nombreux Européens même si ce livre présente une dimension intemporelle comme le souligne Julien Gracq : « Livre de tous les temps de catastrophe possible et passée. »

La guerre n’en a cependant pas fini avec lui. L’Europe s’embrase à nouveau et le contraint à revêtir l’uniforme pour une nouvelle guerre et pour un homme auquel il ne croit pas. Il est incorporé au sein des troupes d’occupation basées à Paris où il fréquente l’élite intellectuelle française. Le héros des tranchées exècre ce nouveau conflit et pense même à la désertion ou au suicide. Cette guerre ne lui apparaît plus comme source de gloire mais comme une tache qui ternit l’uniforme allemand d’une teinte de honte. Entre le jeune soldat avide de gloire de la Grande Guerre et l’officier mûr et assagi, stationné à Paris en 1940, le temps a modifié le regard. Il écrit alors : « le même uniforme, le même grade, mais un homme différent. »

La guerre comme élément naturel

Après 1945, son œuvre devient sinueuse et prolifique. Il théorise alors des concepts développés déjà avant-guerre. Il devient ainsi le théoricien d’une forme d’anarchisme propre à sa vision du monde. Jünger se passionne également pour l’entomologie et développe une pensée écologiste d’avant-garde mais loin d’entrer en contradiction avec sa pensée belliciste, celle-ci au contraire l’y conforte. Pour lui, la guerre s’inscrit entièrement dans l’ordre naturel, elle est gravée dans les gènes de l’humanité. C’est une utopie de s’y opposer car elle s’inscrit dans l’équilibre du monde : « La guerre n’est pas instituée par l’homme, pas plus que l’instinct sexuel ; elle est la loi de la nature. C’est pourquoi nous ne pourrons jamais nous soustraire à son empire. Nous ne saurions la nier sous peine d’être englouti par elle. »

Jünger traverse ce XXème siècle et atteint l’âge canonique de 102 ans pour s’éteindre après la réunification des deux Allemagne en 1998. Peu avant sa mort, l’homme suscite la polémique dans cette Allemagne entièrement pacifiste vouée à expier ce militarisme germanique, source pour de nombreux Européens de toutes les catastrophes du siècle. Pour ces raisons, il subit tout au long de ses ultimes années, l’attaque de la gauche et des verts allemands qui ne lui pardonnent pas son œuvre conservatrice et belliciste. En effet, dans une Europe en paix et démocratique, dont le poids sur les affaires internationales et la place dans l’histoire du monde s’atténuent toujours un peu plus, Jünger et son œuvre apparaissent comme vestiges d’un temps disparu et oublié, un temps où la guerre était acceptée comme inhérente aux affaires humaines et à la vie des nations.

samedi, 03 janvier 2015

Ernst Jünger's The Glass Bees

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Ernst Jünger's The Glass Bees

Matthew Gordon

(From Synthesis)

& http://www.wermodandwermod.com

Ernst Jünger
Louise Bogan & Elizabeth Mayer (transl.)
The Glass Bees
New York Review Books, 2000

THE Glass Bees is an introspective novel about a quiet but dignified cavalry officer called Richard. Unable to adjust to life after war and needing money, he applies for a security job at the headquarters of the mysterious oligarch Zapparoni. Confronted with mechanical and psychological trials, the dream becomes a nightmare, and Richard is forced to contemplate his place in the modern world and the nature of reality itself.

Although philosophical and lyrical, this book is nonetheless a tense page-turner with all the qualities of great sci-fi drama. The poetic imagery is highly expressive, but there are times when the sentences are clumsy and over-long, the meaning of a passage can be lost over a seemingly unnecessary paragraph break. Whether this is down to Jünger's original German or the fault of translation I couldn't possibly say. Nonetheless Ernst Jünger stands among the most lucid and skilful of continental modern writers.

Jünger's vision of the future isn't the ultra-Jacobin "boot stamping on a human face" of Nineteen-Eighty-Four - it is a subtler, more Western dystopia. Jünger is amazingly prescient in this, although he is rarely given credit for it; he predicts that the media and entertainment will rule the psyches of men, that miniaturisation and hyperreal gratification will become our new Faustian obsession and that for all the wonders and benefits of technology it is ultimately dehumanising and alienating. The new world won't be ruled by crude and brutal tyrants like Hitler, Stalin or Kim Jong Ill, but by benevolent and private businessmen, like Rupert Murdoch. We won’t be dominated by the authoritarian father-ego of Freud, but by the hedonistic-pervert of Lacan. Jünger anticipates the theory of hyperreality formulated by Baudrillard, and it is interesting that this book was published before theories on post-modernism and deconstruction became vogue.

Faced with this less than perfect future, Jünger's doesn't try to incite revolution or political struggle – his message remains the same throughout his work – but to inspire individual autonomy. Despite all outward constraints, uprightedness and self-reliance is real freedom. Jünger depicts a superficial and spiritually bankrupt future, but if he is to be believed, the potential for man to be his true self is always the same.

jeudi, 27 novembre 2014

De groote oorlog als strijd tussen iconophilia en iconoclasme: Ernst Jünger en Louis-Ferdinand Céline

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De groote oorlog als strijd tussen iconophilia en iconoclasme: Ernst Jünger en Louis-Ferdinand Céline

lfctéléchargement-2.pngdoor Vincent Blok,

Paper presentation 'de groote oorlog in ons hoofd. wereldoorlog I en de denkende enkeling, Antwerpen (Belgium)

Om ernaar te luisteren:

https://player.fm/series/deburen-podcast-23080/344-lezing-vincent-blok-de-groote-oorlog-als-strijd-tussen-iconophilia-en-iconoclasme

 

 

 

jeudi, 06 novembre 2014

ERNST JÜNGER: DE HÉROES, TITANES Y DIOSES

ELEMENTOS Nº 78.

ERNST JÜNGER: DE HÉROES, TITANES Y DIOSES

 

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Sumario
Ernst Jünger: la revuelta del anarca, por José Luis Ontiveros
 
Un guerrero contra la vulgaridad. El joven Jünger, por Manuel Domingo

 

Ernst Jünger y el emboscado real, por Ángel Sobreviela

 

 

El Trabajador de Ernst Jünger, por Julius Evola

 

Ernst Jünger: Tempestades de Acero o la entrada en escena de los Titanes, por Adolfo Vásquez Rocca

 

Ernst Jünger: el tercer héroe, por Alexander Dugin

 

Ernst Jünger: radiaciones de un escritor revolucionario, por Eduardo Mórlan

 

Ernst Jünger, un pensador contracorriente, por Antonio Escohotado,

 

El meridiano cero: la disputa de Heidegger con Jünger, por Diego Tatián

 

Guerra, técnica y modernidad. Sobre la muerte en la obra de Ernst Jünger, por Vicente Raga Rosaleny

 

Contraposición entre imagen y naturaleza a través del mundo del Trabajador y el mundo del Burgués en Ernst Jünger, por Guillermo Aguirre
 
La sombra del mal en Ernst Jünger y Miguel Delibes, por Vintila Horia
 
Teoria de la rebeldia a partir de Ernst Jünger y Albert Camus, por Jesús Nava Ranero
 
Ernst Jünger y Ortega y Gasset. El lugar de la libertad en las sociedades nihilistas, por David Porcel Dieste

 

vendredi, 24 octobre 2014

In geübten Zügen: Jünger daheim

In geübten Zügen: Jünger daheim

von Till Röcke

Ex: http://www.blauenarzisse.de

Ein Leckerbissen für die andere Seite. Die Aufzeichnungen von Wilhelm Rosenkranz sind sensationell belanglos – aber auch kurzweilig. Ernst-​Jünger-​Freunde aufgepasst!

Die von Thomas Baumert herausgegebenen Erinnerungen des Herrn Rosenkranz haben in der Reihe der „Bibliotope“ (Band 5) einen liebenswürdigen Rahmen der Publikation gefunden. Wer sonst, wenn nicht Tobias Wimbauer, ist überhaupt befugt, derartige Marginalien unters Volk zu streuen?

Herausgekommen ist demnach ein exklusives Büchlein mit wenigen, behutsam ausgewählten Fotografien. Sie zeigen nicht nur Ernst Jünger beim Käferfangen, sondern auch das „nüchterne Haus“ (E. J. über seine backsteinige Heimstatt) in Kirchhorst.

Daneben besteht das Bändchen aus Berichten einiger der wenigen Zusammenkünfte von Rosenkranz und Jünger. Ersterer lebte ganz in der Nähe und kam – so mancher kriegsbedingten Einwirkung zum Trotz – des Öfteren mit dem verehrten Dichter zusammen.rosenkranz juenger

Die im Ton der sympathischen, an keiner Stelle albernen Bewunderung gegenüber dem schreibenden Klausner getragenen Aufzeichnungen dürften die entsprechende Klientel angemessen bedienen. Jüngers Frau ist herzlich und stört nicht, die Natur um Kirchhorst herum geizt nicht mit Reizen und wer mit Jünger anbandelt, der fängt irgendwann das Träumen an. Es erwischt Wilhelm Rosenkranz auf dem Fahrrad.

Ein Leben lang im Bann

Im zweiten Teil finden sich einige Briefe von Rosenkranz an Jünger, leider fehlt der Jüngersche Part vollends. Wie dem auch sei, Wilhelm Rosenkranz zeigt sich dem Leser als ein vom Werk des bewunderten Dichters vollends in den Bann gezogener. Noch Jahre nach dem Krieg hängt er den Eindrücken an jene Kirchhorster Jahre nach, und als er schließlich 1975 stirbt, erinnert man sich sogar in Wilflingen noch an jenen „Leser namens Rosenkranz“.

Kaufempfehlung für die Anhänger Ernst Jüngers und für alle, die bei Klett Cotta nichts mehr finden.

Thomas Baumert (Hrsg.): Wilhelm Rosenkranz: Die andere Seite. Begegnungen mit Ernst Jünger in Kirchhorst. 110 Seiten, Eisenhut Verlag 2014. 12,90 Euro.

samedi, 11 octobre 2014

Ernst Jünger – verdichtet

Ernst Jünger – verdichtet

von Benjamin Jahn Zschocke

Ex: http://www.blauenarzisse.de  

Ernst Jünger – verdichtet

Der Literaturwissenschaftler Matthias Schöning hat zusammen mit zahlreichen Jünger-​Kennern ein ambitioniertes Handbuch zum Gesamtwerk des Meisters herausgegeben, von A wie „Arbeiter“ bis Z wie „Zwille“.

Zunächst zu den Daten: 56 Autoren, darunter zehn Frauen, stellen auf rund 450 Seiten Exposés zu allen Werken Ernst Jüngers (18951998) zusammen. Unter den Autoren finden sich Namen wie Ulrich Fröschle, Helmuth Kiesel, Steffen Martus und Ingo Stöckmann, die typischerweise für eine literaturwissenschaftliche und eben keine vordergründig politisch-​moralische Auseinandersetzung mit dem Werk Ernst Jüngers bekannt sind.

Jünger in der BRD

Auf den Herausgeber Matthias Schöning sei ein kurzes Schlaglicht geworfen: Sein Themenspektrum reicht von Aufsätzen über die Literatur in der Romantik, im Ersten Weltkrieg, in der Weimarer Republik bis hin zur DDR, aber auch zu Betrachtungen herausgehobener Autoren wie Louis-​Ferdinand Céline, Gottfried Benn und Thomas Mann.

Seine umfangreichste Arbeit leistete Schöning aber bislang zu Ernst Jünger. Bereits 2001 gab er zusammen mit Ingo Stöckmann das Werk Ernst Jünger und die Bundesrepublik: Ästhetik, Politik, Zeitgeschichte heraus und versuchte so, den zumeist einseitigen Schriften zu Jüngers politischen Werken vor 1945 ein juenger brdernstzunehmendes Gegengewicht entgegenzustellen, nicht zuletzt in der unübersehbaren Hoffnung, den Fokus der fortwährenden Debatte um Jünger auf einen bislang stiefmütterlich behandelten Schaffensabschnitt des Autors zu lenken.

Jüngers fortwährende Metamorphosen

Zwei Verwerfungslinien im Werk Jüngers werden bei der Lektüre des Handbuches offengelegt: Einerseits sein zeitlebens betriebenes Umdichten, Umdeuten und Relativieren seiner politisch gefärbten Frühwerke, das ihm von seinem Sekretär Armin Mohler kompromißlos und unnachgiebig vorgeworfen wurde und letztlich zum Bruch zwischen den Denkern führte.

Andererseits, und das ist deutlich interessanter, die Veränderungen in Jüngers Werk nach 1945. Hier sind Schöning und Stöckmann wieder in ihrem Element, denn dort beginnt die „Debatte“ um Jünger. Für beide liegt der Gedanke nahe, daß die Debatte vor allem als Symbolbildungsort für die Prozesse sozialer Integration diente und heute noch dient. Anhand der Person Jünger wird diskutiert, was man sagen darf und was nicht, was und wie erinnert werden soll, wem man die Frage nach der „deutschen Schuld“ stellt und welche Aufgabe der Intellektuelle in der BRD haben soll.

Zäsur 1945

Die Zeitenwende nach dem Ende des Zweiten Weltkrieges ist auch in Ernst Jüngers Werken überdeutlich abzulesen. Diese Zäsur besteht jedoch nicht darin, daß er auf einmal vom Tagebuch oder Essay zum erzählenden Text findet. Das hat er schon 1939 mit den Marmorklippen getan.

In den zwanziger und dreißiger Jahren stehen Jüngers Texte in einem unmittelbar zeitdiagnostischen Zusammenhang. Der Autor ist in alle wesentlichen Ereignisse dieser Zeit denkend involviert. Mit dem Ende des Krieges ändert sich das: Jünger geht zum Zeitgeschehen und zu den Hauptdiskursen der BRD auf Distanz.

Das äußert sich darin, daß er zu keinem der Gründungsmythen, die für die BRD etabliert wurden, einen Beitrag leistete. Er bedient sich weder der Auffassung der „Stunde Null“, noch jener der „Restauration“. Er blieb bis ans Ende seines Lebens auf elitärstem Niveau außen vor.

Dem heutigen Leser, dem diese Debatten vielleicht nicht einmal mehr dem Namen nach bekannt sind, ist mit dem Handbuch ein grundsolides Werk in die Hand gegeben, das zum ersten Entdecken ebenso einlädt wie zum Vertiefen der Erkenntnisse des Fortgeschrittenen.

Matthias Schöning (Hrsg.): Ernst Jünger-​Handbuch. Leben – Werk – Wirkung. 439 Seiten, J. B. Metzler Verlag 2014. 69,95 Euro.

jeudi, 09 octobre 2014

Montmédy: Orages d'acier

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Insérer une imageMONTMEDY & MARVILLE & plus... :
Orages d'acier - commémoration théatrale 14-18
 
  FRANCE Début : Samedi 11 Octobre 2014, 16:00
Fin : Dimanche 12 Octobre 2014, 16:00

 

L'association Transversales vous donne rendez-vous le samedi 11 octobre à 16h00 à la citadelle de Montmédy, ainsi que le dimanche 12 octobre à 16h00 dans les caves de Marville. Vous assisterez alors à un témoignage des plus saisissants de la 1ère guerre mondiale:
TRANSVERSALES propose de faire entendre les mots d'Ernst Jünger dans des lieux réels de la Première Guerre mondiale, afin que la langue de Jünger y rencontre l’épaisseur de ces pierres.


Ernst Jünger, soldat allemand, se retrouve après quelques semaines de formation dans le chaos et la folie de cette guerre si meurtrière. Pour garder conscience, il écrit un journal.
Il y décrit jour après jour le quotidien du soldat mais également la violence et l’absurdité des tranchées. Il reprendra ce journal après l’armistice. Il regroupera ces notes afin de les synthétiser et surtout afin d’en faire littérature, d’en faire « de l’art ». Seul l’Art peut faire comprendre et ressentir l’expérience des tranchées…

Un siècle après le début de cette guerre, nous nous proposons de faire entendre les mots de Jünger. Dans des caves, des forts, des lieux réels de la première guerre mondiale. Afin que la langue de Jünger y rencontre l’épaisseur de ces pierres.
Office de tourisme transfrontalier du Pays de Montmédy
Citadelle - Ville haute / 2, rue de l'hôtel de ville
F-55600 MONTMÉDY
Tél. +33 (0)3 29 80 19 52
/Lucienne0210

 

dimanche, 05 octobre 2014

Ernst Jünger, contemplatore in uniforme e maestro di libertà

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Ernst Jünger, contemplatore in uniforme e maestro di libertà

Ernst Jünger fu maestro insuperabile della contemplazione, esempio memorabile di azione, teologo della nuova epoca, platonico moroso, entomologo competente, pedagogo della libertà. Infine amante dell’Italia, dalla Dalmazia irredenta all’assolata Sicilia, da quel di Napoli fino alla più amata di tutte, quella Sardegna dalla terra «rossa, amara, virile, intessuta in un tappeto di stelle, da tempi immemorabili fiorita d'intatta fioritura ogni primavera, culla primordiale».
 

L’anno è il 1895. Röntgen era vicino alla scoperta dei raggi X; in Francia esplodeva l’affaire Dreyfus. Amava ricordare questi due avvenimenti, Ernst Jünger. Essi attraversarono tacitamente la sua vita e le sue riflessioni, le quali non sono altro che lo specchio di un secolo: quel Novecento veloce e potente come il fulmine di Eraclito, fulmine che «governa ogni cosa», come era scritto sopra la soglia della baita di Heidegger nella Selva Nera. La scoperta di Röntgen aprì il secolo della tecnica, dando la possibilità all’uomo di “vedere l’invisibile”, di osservare ciò che al microscopio era precluso, di sviluppare la ricerca sull’atomo e sulla fissione nucleare. Cinquanta anni separarono la tanto casuale quanto fortunata scoperta del 1895 da Little Boy, dolce artificio statunitense, che Hiroshima ricorda come fuoco celeste: meno modesto del giottesco bagherino luminoso di san Francesco, più furioso dell’infuocato carro del Libro dei Re, dipinto da Roerich sulle calde tonalità del rosso. L’atomica non lasciò niente; non rimase a terra il mantello che a Elia cadde durante l’ascesa. Chi ha vissuto il Novecento ha timore dell’uomo più che di Dio, le cui distruzioni narrate nell’Antico Testamento sembrano delle grazie in confronto ai massacri di due guerre mondiali. Il caso Dreyfus inaugurò invece l’arma migliore delle democrazie occidentali: l’opinione pubblica, lama dotata della più affilata critica, aumentò il grado di incertezza politica, incassando una vittoria sulle baffute e polverose forze conservatrici. Il secolo passato è stato mutevole come l’acqua, oltre che terribile come il fulmine. Ernst Jünger è nato così: con l’invito a riflettere sulla tecnica e sulla politica, ma senza cadere nella spirale della sola contemplazione. Il tempo dell’uomo è limitato, l’educazione costosa. Alla contemplazione riunì l’azione, ma lo fece in modo più armonico e costante del giapponese Mishima, altro equilibrista a metà tra la luce notturna del pensiero e quella diurna dell’atto senza scopo. La bellezza, ne siamo suggestionati, è un tramonto: il momento in cui le forze lunari e solari si dividono il campo, e contemplazione e azione diventano Uno, nell’ascesa di un pilota verso la stella più vicina, su un affilata lama dei cieli. Mishima in Sole e acciaio insegna che «corpo e spirito non si fondono mai».

Jünger lottò con l’acciaio, quello dell’artiglieria inglese e francese, sul fronte occidentale. E, checché ne dica un beffardo adagio militare, non bastò la colazione a tenere insieme anima e corpo: ci volle ben altro. Già nel 1913, appena maggiorenne e fuggito dall’ambiente borghese della casa familiare, si arruolò nella Légion étrangère, covo di avventurieri e delinquenti più che di disciplinati soldatini. L’esperienza algerina a Sidi-bel-Abbès, a suo dire «avvenimento bizzarro come la fantasia», fu pubblicata in forma di confessione romanzata nel 1936, con il titolo di Afrikanische Spiele (Ludi africani). Ma Jünger allora era già noto per le sue imprese nella Prima guerra mondiale. Rimpatriato dall’Africa per l’intercessione del padre Ernst Georg Jünger, farmacista confidente più con la vetreria da laboratorio che con le pallottole, accolse con gioia l’invito del 1914, arruolandosi come volontario nell’esercito del Kaiser Guglielmo II. Aveva da poco incontrato su carta ciò che stava per vedere sul fronte. Le letture di Friedrich Nietzsche lo gettarono tra le braccia della guerra come un vitello che, spinto al mattatoio, si sente nel suo palazzo reale. Ma la carne di Jünger non fu tenera come quella di un vitello, e sopravvisse con estremo ardimento a ben quattordici ferite, di cui l’ultima molto grave, passando da semplice fante a Strosstruppfüher (capo di commando d’assalto), fino all’onore di portare al petto due Croci di Ferro, una Croce di cavaliere dell’Ordine di Hohenzollern e una Pour le Mérite, riconoscimento di una volontà dura come il ferro della medaglia, privilegio che ebbero solo dodici ufficiali subalterni dell’esercito imperiale.

In una caserma della Reichswehr (madre della Wehrmacht), tra il 1918 e il 1923, scrisse i suoi primi libri, tra cui un titolo imprescindibile per chi subì (e subisce) il fascino della Grande guerra: In Stehlgewittern (Nelle tempeste d’acciaio), frutto della rielaborazione di appunti dalla trincea sotto forma di memorie belliche, pubblicato nel 1920. Il destino dell’opera fu diverso da quello di altri racconti di guerra. Non è Il fuoco di Barbusse, apparso in pieno conflitto, ma nemmeno il celebre Niente di nuovo sul fronte occidentale di Remarque. Se il successo di questi fu lesto e universale, In Stehlgewittern – pubblicato tardi in traduzione italiana (1961) – circolò in ambienti di destra, tra circoli militari, associazioni di reduci, gruppi nazionalisti e conservatori, i quali ne compresero solo in parte lo spirito. L’esperienza bellica – descritta poi in altre memorie quali La battaglia come esperienza interiore (recentemente pubblicato per i tipi di Piano B), Il tenente Sturm, Boschetto 125, Fuoco e sangue – non solo aveva catturato la gioventù «come un’ubriacatura» ed emancipato le nuove generazioni di tedeschi dal «minimo dubbio che la guerra ci avrebbe offerto grandezza, forza, dignità», ma aveva il sapore dell’«iniziazione che non apriva soltanto le incandescenti camere del terrore, ma anche le attraversava». Le incessanti esplosioni degli shrapnels, angeli del cielo che più che nuove portano palle di piombo a lacerare la carne, furono soltanto uno degli aspetti più terribili di quella guerra tecnica, di materiali. Non è la Francia dipinta dagli impressionisti, quella di macchie e pennellate giustapposte, ma è terreno di mutilazioni, di corpi insanguinati e ricoperti di fanghiglia, di un cielo di pallottole. È la guerra di trincea. È il soldato «che canta spensierato sotto una volta ininterrotta di shrapnels», come immaginato con futuristica eccitazione da Marinetti. E il giovane Jünger coglie tutto ciò con un nichilismo estetizzante, cristallizzato in una prosa magistrale. Il soldato e l’artista qui celebrano la loro intima parentela, giacché la guerra è un’arte e viceversa. Valgono le parole riferite ad Aschenbach, protagonista de La morte a Venezia di Thomas Mann: «Anche lui era stato soldato e uomo di guerra come alcuni dei suoi maggiori; poiché l’arte è una guerra, è logorante battaglia». In Stehlgewittern è una splendida glossa a Novalis, spirito europeo e cristiano, nella sua esaltazione del dinamismo poetico della guerra. La notorietà procuratagli dal libro permise a Jünger un’attiva partecipazione a movimenti nazionalistici e antidemocratici e la collaborazione a giornali come «Arminius», «Der Vormarsch» e «Widerstand», rivista dell’amico nazionalbolscevico Ernst Niekisch. Fu nel primo dopoguerra che cominciò la sua produzione saggistica, incisa ne La mobilitazione totale, Il dolore, L’operaio. Hans Blumenberg non aveva torto quando affermava che Jünger è l’unico autore tedesco ad aver lasciato testimonianze di un confronto pluridecennale con il nichilismo.

Nella sua opera sono forti l’inevitabilità del suddetto confronto e la sfida a tale problema. Egli ha cercato il nulla, l’annientamento del vecchio mondo di borghesi, scienziati e parrucconi; lo ha inseguito, infaticabile, nel deserto (Ludi africani), nello sprezzo della vita di fronte alla guerra (Nelle tempeste d’acciaio), nell’ebbrezza (Avvicinamenti. Droghe ed ebbrezza), nel dolore (Sul dolore), «equivalente metafisico del mondo illuminato-igienico del benessere» (Blumenberg, L’uomo della luna). L’annientamento dell’uomo passa per il suo innalzamento, per la pianificazione totale della società “mobilizzata” nel lavoro e nello studio, per la riduzione finale della persona nella monade tecnico-biologica prospettata nella metafisica de L’operaio, libro fondamentale nelle tappe dell’evoluzione intellettuale del pensatore tedesco, testo oggetto di studio per due grandi filosofi come Martin Heidegger, che negli anni Trenta organizzò sul tema dei seminari privati, e Julius Evola, che ne fece un commento (L’operaio nel pensiero di Ernst Jünger).

Ma c’è un evento nel mezzo della vita del nostro, luminoso come quella cometa di Halley che Jünger contemplò due volte (Due volte la cometa). Mentre lo Stato totale del lavoro da lui immaginato andava realizzandosi, ecco una «svolta imprevista, che va annoverata tra gli eventi più importanti della storia spirituale tedesca» (ancora Blumenberg): Sulle scogliere di marmo, il diamante prezioso tra i piccoli vetrini luccicanti nell’asfalto. Soffermarvisi è d’obbligo. I precedenti biografici del libro chiariscono meglio la svolta. Come ebbe a dire Goebbels, Ministro della Propaganda del Terzo Reich, «abbiamo offerto a Jünger ponti d’oro, ma lui non li volle attraversare». L’insofferenza dello scrittore per i modi pacchiani e volgari del Partito Nazionalsocialista gli procurò antipatie tra i gerarchi: la stampa smise di parlare dei suoi libri e la Gestapo gli perquisì la casa. Nel romanzo decisivo per sua vita, egli descrive un Paese – la Marina, in cui ogni elemento sociale e politico è in armonia – minacciato da un pericoloso popolo di confine, barbaro, portatore di violenza e distruzione, dallo stile terribile e plebeo, guidato dal Forestaro (figura che molti identificarono con Hitler, altri con Stalin). La canaglia del bosco si muove contro la civiltà, l’anarchia nichilistica contro le forze della Tradizione. I due protagonisti, due fratelli (allusione all’autore stesso e a suo fratello, Friedrich Georg), sono supportati da quattro personaggi: Padre Lampro, dietro cui si può scorgere la Chiesa, o almeno la forza spirituale della religione; Belovar, vecchio e coraggioso barbuto a rappresentanza del vecchio mondo rurale; di nobile stirpe, invece, il principe Sunmyra, la cui testa mozzata dopo un’eroica impresa è recuperata dal protagonista e diventa oggetto di rituali; infine Braquemart, bellicoso sodale del principe ed effigie del nobile intellettuale nichilista, che interpreta la vita come meccanismo le cui ruote motrici sono la violenza e il terrore, uomo di «fredda intelligenza, sradicata e incline all’utopia». Chiunque abbia confidenza con la letteratura jüngeriana ricorderà le parole che aprono Sulle scogliere di marmo: «Voi tutti conoscete la selvaggia tristezza che suscita il rammemorare il tempo felice: esso è irrimediabilmente trascorso, e ne siamo divisi in modo spietato più che da quale si sia lontananza di luoghi». La ricerca della bella morte in guerra fa spazio alla «vita nelle nostre piccole comunità, in una casa ove la pace regni, fra buoni conversari, accolti da un saluto affettuoso a mattina e a sera». A chi vive l’esistente come poesia non resta altro che chiedere asilo ai manieri della propria interiorità, confidando nella resistenza dei nobili contro il nulla, nella sublimazione di tutto nel fuoco catartico dello specchio di Nigromontanus.

Fu Hitler a salvare Jünger da morte certa. Il Forestaro apprezzava la penna che lo tratteggiò. Lo salvò anche dopo il 20 luglio del 1944, data del celebre attentato al Führer. Se è vero che non furono trovate prove della collaborazione tra gli attentatori e Jünger (che durante la Seconda guerra mondiale si occupava dell’ufficio di censura a Parigi, come ufficiale dello Stato Maggiore), lo è altrettanto il fatto che i sospetti su di lui erano più che forti, tanto da fargli recapitare un’espulsione dall’esercito per Wehrunwürdigkeit (indegnità militare). Era definitivamente finito il tempo dell’eroe di guerra, cominciava quello del contemplatore solitario. Sottoposto a censura durante l’occupazione alleata, sorte condivisa con gli amici Martin Heidegger e Carl Schmitt (il quale era, tra le altre cose, padrino del secondo figlio di Ernst, Alexander Jünger), si ritirò nel paesino di Wilflingen, prima nel castello degli Stauffenberg (famiglia da cui proveniva Claus Schenk von Stauffenberg, organizzatore del fallito attentato a Hitler), poi nella foresteria del conservatore delle acque e delle foreste della stessa famiglia, edificio che fu sua abitazione fino alla morte. Vasta è l’opera di questo grande scrittore tedesco. Fu il diarista del Novecento, interprete del suo spirito. La costanza con cui annotò fatti e riflessioni sui suoi diari è nota. Anche nella scrittura, Ernst Jünger mostrò coraggio: il diario è più di altre la forma stilistica attraverso la quale un pensatore o un letterato si mostra nella sua intima debolezza di uomo, sottoponendosi a una dilapidazione di credibilità; l’estrema rinuncia alla plasticità dell’artista in cambio dell’autenticità dell’origine dei propri pensieri. I diari completano gli altri scritti, dimostrando che Jünger non offrì prodotti, ma indicò vie. Lo fece in tutta la letteratura successiva a Sulle scogliere di marmo, da Heliopolis a Eumeswil, da Il libro dell’orologio a polvere a Al muro del tempo, da Il nodo di Gordio (dialogo a due voci con Carl Schmitt) a Oltre la linea (con Martin Heidegger). Proprio in quest’ultimo testo, composto da due scritti che omaggiano il sessantesimo giorno genetliaco del rispettivo interlocutore, avviene il confronto sul tema del nichilismo tra due dioscuri simbolici del tramonto vivo di un’epoca, un duello a colpi diretti nel quale ognuno, ça va sans dire, si compiace della maestria dell’altro. Interrogarsi sul nichilismo è, nel secondo dopoguerra, cercare una risposta alla domanda: quale poesia dopo Auschwitz?

Non condividiamo il giudizio di Evola sul secondo Jünger. Non fu un pluridecorato «normalizzato e rieducato», come ebbe a mugugnare il filosofo romano durante un colloquio con Gianfranco de Turris, ma un pensatore capace di profonde riflessioni, di analisi e previsioni rivelatesi tanto esatte quanto inquietanti. Fu uno dei pochi che riuscì a disvelare, con tormentata quiete, la patina ideologica che copre la realtà. Ecco, le ideologie. Egli non le amava, perché «un errore diviene colpa soltanto quando si persevera» (Sulle scogliere di marmo); rifuggì tutti gli ismi, ma si arrogò il diritto di vivere la vita come un esperimento, non come un processo soggetto a logiche limitative. «Il suffisso ismo ha un significato restrittivo: accresce la volontà a spese della sostanza» (Eumeswil). La sua scrittura è «espressione di ciò che è problematico, del qui e del là, del sì e del no», come si espresse Thomas Mann pensando a se stesso nelle Considerazioni di un impolitico. Ernst Jünger fu maestro insuperabile della contemplazione, esempio memorabile di azione, teologo della nuova epoca, platonico moroso, entomologo competente, pedagogo della libertà. Infine amante dell’Italia, dalla Dalmazia irredenta all’assolata Sicilia, da quel di Napoli fino alla più amata di tutte, quella Sardegna dalla terra «rossa, amara, virile, intessuta in un tappeto di stelle, da tempi immemorabili fiorita d’intatta fioritura ogni primavera, culla primordiale». «Le isole – insegna – sono patria nel senso più profondo, ultime sedi terrestri prima che abbia inizio il volo nel cosmo. A esse si addice non il linguaggio, ma piuttosto un canto del destino echeggiante sul mare. Allora il navigante lascia cadere la mano dal timone; si approda volentieri a caso su queste spiagge» (Terra sarda). E la sua opera fu un’isola di luce lontana dalla baruffa letteraria del Novecento, oasi per gli spiriti assetati di libertà.

samedi, 20 septembre 2014

Hoffmann e Jünger: La natura perturbante della tecnologia

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Hoffmann e Jünger: La natura perturbante della tecnologia

di Marco Zonetti
Fonte: Arianna Editrice [scheda fonte]  

Leggendo il racconto “L’Uomo della Sabbia” di Ernst Theodor Hoffmann e il breve romanzo distopico “Le api di vetro” di Ernst Jünger, potremmo scoprire che i due autori non condividono soltanto il nome di battesimo e la nazionalità, bensì una peculiare e chiaroveggente diffidenza nei confronti della tecnologia, o perlomeno del suo potere manipolatore e disumanizzante.

Nel racconto di Hoffmann, scritto nel 1815, il giovane Nathanael è ossessionato dalla figura di un uomo misterioso, Coppelius, che fin dall’infanzia egli apparenta iconograficamente all’Uomo della Sabbia (o Mago Sabbiolino), una sorta di uomo nero delle tradizioni popolari che getta la sabbia negli occhi dei bambini, strappandoli e portandoli nel suo rifugio sulla “falce di luna” per darli da mangiare ai suoi “piccolini dai becchi ricurvi”.

Coppelius viene introdotto nel racconto in veste di vecchio avvocato amico del padre di Nathanael, per poi rivelarsi una specie di folle scienziato/alchimista nonché complice di un fabbricante di automi italiano, Lazzaro Spalanzani, che si spaccia per un innocuo professore di Fisica. Nathanael conosce la figlia di quest’ultimo, Olimpia, in realtà un automa costruito da Spalanzani con l’aiuto di Coppelius, e se ne innamora perdutamente finendo in un vortice di follia. Dopo una breve parentesi di serenità, accudito dalle amorevoli cure della fidanzata Clara e dell’amico Lothar, che rappresentano il focolare domestico e gli affetti sinceri non contaminati dall’unheimlich costituito dalle “diavolerie” della tecnica incarnate invece da Coppelius e Spalanzani, Nathanael sembrerà aver ritrovato brevemente la ragione, salvo poi risprofondare nelle antiche ossessioni – ridestate da un cannocchiale fabbricato da Coppelius – che lo condurranno al suicidio.

Lo stesso approccio alla scienza e alla tecnologia viste come “perturbanti” traspare dal breve romanzo di Ernst Jünger, “Le api di vetro” del 1957. Api di vetro, ovvero minuscoli automi intelligenti che popolano i giardini dell’industriale Zapparoni (un altro italiano) ove il protagonista Richard – reduce di guerra e di un mondo semplice fatto di tradizioni d’onore e di valori ormai perduti – è capitato in cerca di un impiego. Nei giardini di Zapparoni, arricchitosi grazie all'ideazione e costruzione di macchine tecnologicamente avanzate che dominano ormai il mondo, Richard osserva la “spaventosa simmetria”, per citare William Blake, delle api di vetro e della loro fisiologia ipertecnologica che, lungi dal migliorare o perfezionare la natura (imperfettibile in sé come fa notare Jünger in molte sue opere, ricordandoci che più la tecnologia progredisce più l’umanità subisce un’involuzione e viceversa), la impoveriscono, devastandola in ultima analisi – i fiori toccati dalle “api di vetro” sono infatti destinati a perire poiché deprivati dell’impollinazione incrociata..

Seppur concepite in due epoche diverse, Olimpia e le api di vetro rappresentano l’elemento perturbante di un mondo ossessionato dalla scienza, e in corsa dissennata verso un futuro ultratecnologico in cui uomini e macchine divengono intercambiabili sempre più a discapito dei primi. In cui la poesia dell’ideale romantico e dell’amore sincero, come quello di Nathanael per Clara, viene guastato dall’ossessione per la fredda e innaturale Olimpia, meccanismo perfetto ma inumano come quello degli “automi di Neuchatel” che devono aver ispirato Hoffmann per la sua protagonista. In cui uomini e animali vengono via via sostituiti distopicamente dalle macchine e dagli automi, e dove la stessa nascita, lo stesso atto d’amore che porta al concepimento dell’essere umano viene sostituito da un alambicco, da una provetta, da una miscela in laboratorio, in una sorta di “catena di montaggio” della riproduzione, di “fordismo” applicato alle nascite come nel “brave new world” di Aldous Huxley, “eccellente mondo nuovo” in cui sia Olimpia sia le api di vetro sarebbero cittadini onorari e abitanti privilegiati.

arman110.jpgAltra peculiare affinità fra le due opere è quella data dalla ricorrenza dell’elemento degli “occhi” e del “vetro”. Nel racconto di Hoffmann, troviamo per esempio il leitmotiv dei cannocchiali (“occhi” fatti di vetro come le api) costruiti dal solito Coppelius nelle vesti dell’italiano Coppola. Cannocchiali che ci riportano immediatamente a Galileo Galilei, sommo esponente dell’ambizione scientifica dell’uomo, ambizione che nel racconto di Hoffmann è tuttavia distorta dagli ambigui scopi di Coppelius, intenzionato a deprivare Nathanael degli occhi, per renderlo un cieco automa come la stessa Olimpia. Paradossalmente, anziché donargli una visione amplificata della realtà rendendolo più “lungimirante”, il cannocchiale che Nathanael acquista da Coppelius lo fa sprofondare in una follia primordiale che non riconosce affetti, amore, amicizia, né tantomeno connotati umani, portandolo infine all’annullamento di sé, ovvero al suicidio.

Come lo stesso Richard protagonista de “Le api di vetro”, Nathanael perde a poco a poco la propria umanità e l’attaccamento alle proprie tradizioni e ai propri valori, travolto dalla tecnologia malvagia di due esseri votati alla creazione di marionette e pagliacci destinati a divertire le folle, fenomeni da baraccone come Olimpia, o come gli automi di Zapparoni finiti a sostituire gli attori in carne e ossa nei film, quali li descrive Jünger nel suo romanzo.

Per tornare al tema degli occhi, il protagonista de “Le api di vetro” capirà a poco a poco che, per l’incarico che intende assumere, occorrono occhi disumanizzati, asettici, (occhi di vetro?) che devono vedere senza guardare, senza discernere, così da passar sopra alle atrocità perpetrate nel giardino (e nella società) degli orrori tecnologici di Zapparoni. Per poter sopravvivere nel mondo ipertecnicizzato e inumano insediatosi grazie alla perdita dei valori e della tradizione, Richard si renderà dunque conto che è necessario lasciarsi cavare metaforicamente gli occhi dall’Uomo della Sabbia rappresentato dall’ambizione e della protervia dell’uomo.

Con le derive della tecnologia, con il sacrificio dell’etica sull’altare della Hýbris, con la corsa dissennata a voler piegare la natura al nostro volere, sembrano quindi preconizzarci Hoffmann e Jünger, l’essere umano diventa simulacro di se stesso, automa (fintamente) perfetto, “ape di vetro” senz’anima, senza cuore, senza sesso. Transgender e ultragender costruito in serie come una marionetta, al punto che – nella nostra realtà più vicina – i genitori risultano tanto spersonalizzati da abdicare perfino al nome di padre e di madre per diventare “genitore 1” e “genitore 2”, espressioni che tanto piacerebbero all’ambiguo Zapparoni – che deve il suo successo al tramonto dell’etica e della tradizione – ma anche all’infido Coppelius, sorta di “tormento del capofamiglia” kafkiano, non meno inquietante del “rocchetto di filo” Odradek, protagonista del celebre racconto dello scrittore praghese. Ma soprattutto al mostruoso Uomo della Sabbia che, dal suo antro nella “falce di Luna”, non potrebbe che compiacersi oltremodo della nostra cieca ambizione, che ci impedisce di vedere la realtà distopica nella quale, superbi e protervi, ci stiamo gettando a capofitto inseguendo le derive della tecnologia e dell’ingegneria genetica.

La Hýbris demiurgica della tecnica rappresentata da Coppelius e Zapparoni, ovvero l’aspirazione a replicare la potenza creatrice divina, racchiude necessariamente l’annullamento di sé e dell’umanità, per questo il Nathanael di Hoffmann non può che suicidarsi e il Richard di Jünger tradire i propri princìpi per assoggettarsi al nuovo status quo e al nuovo regime di spersonalizzazione dell’uomo.

Privi degli occhi dell’etica, dei valori e del sacro rispetto della natura, accecati dalla nostra arroganza, siamo solo bambini sprovveduti destinati a diventare cibo della progenie di occulti “uomini della sabbia” o schiavi di scaltri e spietati “Zapparoni”.


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lundi, 15 septembre 2014

Ernst Jünger, un autore da rileggere oltre la gabbia destra/sinistra

Ernst Jünger, un autore da rileggere oltre la gabbia destra/sinistra

di Luciano Lanna

Fonte: Segnavia

 
junger1xx.jpgUn’operazione analoga a quella che ha riguardato sul Garantista Céline dovrebbe a nostro avviso coinvolgere anche Ernst Jünger, il decano novecentesco della letteratura tedesca, nato nel 1895 e scomparso nel 1998 alla veneranda età di 103 anni. Al di là della sua militanza adolescenziale tra i nazionalisti, infatti, della sua partecipazione da volontario alla Grande Guerra e la stessa strumentalizzazione che il regime hitleriano fece della sua opera L’operaio, dedicata alla società della mobilitazione di massa, lo scrittore – nonostante i suoi scritti giovanili militaristi – non solo arrivò ben presto a esporsi esplicitamente contro la dittatura nazista e a partecipare addirittura al complotto del 1944 per far fuori Hitler ma, sin dagli anni ’30, produsse tutta una serie di opere inequivocabilmente di natura libertaria. Sarà lui, e non Brecht, ad esempio a scrivere: “L’obbligo scolastico è, essenzialmente, un mezzo di castrazione della forza naturale, e di sfruttamento. Lo stesso vale per il servizio militare obbligatorio. Respingo come una scemenza l’obbligo scolastico, come ogni vincolo e ogni limitazione alla libertà”. Non solo: Jünger negli anni ’60 del Novecento descriverà con benevolenza e simpatia “i figli dei fiori della California, i provos di Amsterdam, gli hippies multicolori accoccolati sulla scalinata di piazza di Spagna, o sui bordi della Barcaccia, gli indefinibili che emergono dappertutto e che parlano un nuovo gergo. Compagni simili esplorano il sottosuolo: è una buona cosa poi se sono anche colti”.  Del resto, lui stesso negli anni ’20 aveva aderito ai Wandervögel, il movimento giovanile tedesco che per la passione ecologista, la ricerca di una nuova spiritualità anticonformista e la sensibilità comunitaria anticipava i beatnik e il libertarismo della generazione “on the road”. Si pensi anche alla sua vicinanza senile ai Verdi che manifestavano in Germania per il neutralismo e contro il nucleare, al suo libro sul fenomeno degli stupefacenti e alla sua teorizzazione della figura dell’anarca nel suo romanzo Eumeswil
 
Insomma, la più profonda vocazione di Jünger fu eminentemente libertaria, ed è stata così esplicitata negli anni ’90 da studiosi come Antonio Gnoli e il compianto Franco Volpi. Una conferma significativa di ciò è stata poi, più recentemente, fornita dalla pubblicazione, anche in Italia, del suo libro La capanna nella vigna (Guanda, pp. 279, € 20,00), un diario che raccoglie le impressioni quotidiane di Jünger dall’11 aprile del ’45 al 20 novembre del ’48. Sono gli anni della disfatta della Germania, della capitolazione, dei suicidi dei gerarchi hitleriani, dell’occupazione da parte delle potenze straniere...
 
«L’importante per me resta il Singolo», spiegherà lo scrittore tedesco già ultracentenario intervistato da Gnoli e Volpi ne I prossimi titani (Adelphi). E proprio in nome del Singolo e contro il dilagare di burocrazie autoritarie spersonalizzanti si era espressa quasi tutta la sua produzione a partire dall’apologo anti-totalitario Sulle scogliere di marmo del 1939. Ma già nel mezzo della seconda guerra mondiale, il libertarismo di Jünger diventava via via più esplicito. E anche nel diario ’45-48 emergono pagine fortissime di attacco al totalitarismo. Lo scrittore ricorda, ad esempio, l’accozzaglia di “luoghi comuni” che scandiva i raduni di massa: “Era la stessa voce dei pubblicitari, delle macchine per vendere, che arrivano per decantare assicurazioni complicate, le cui visite si concludono in genere lasciandoci invischiati in contratti di pagamento interminabili”. La libertà, aggiunge, appartiene invece alla singola persona: “Solo la vista del singolo può dischiudere il dolore del mondo, perché un singolo può farsi carico del dolore di milioni di altri, può compensarlo, trasformarlo, dargli un senso. Rappresenta una barriera, una segreta inaccessibile, nel mondo di un mondo statistico, privo di qualità, plebiscitario, propagandistico, piattamente moralistico”.
 
L’attacco jüngeriano al cuore del totalitarismo non si nasconde – e siamo nella prima metà del 1945 – alla necessità di dover condannare l’antisemitismo e l’Olocausto. Lo scrittore incontra alcuni sopravvissuti ai lager: “L’impressione è di uno sconforto paralizzante, un sentimento che i loro discorsi trasmisero anche a me. Il carattere razionale, progredito della tecnica adottata nelle procedure getta sui processi una luce particolarmente cruda, in quanto emerge l’ininterrotta componente consapevole, meditata, scientifica che li ha determinati. Il segno dell’intenzione si imprime fin nei minimi dettagli, costituisce l’essenza del delitto”. Jünger parla esplicitamente di scene degne di Caino e il suo giudizio è assai vicino a quello successivo di Hannah Arendt sulla “banalità del male”. Parlando di Himmler commenta: “Ciò che mi ha colpito di questo individuo era il suo essere profondamente borghese. Vorremmo credere che chi mette in opera la morte di molte migliaia di uomini si distingua vistosamente da tutti gli altri, che lo avvolga un’aura spaventosa, un bagliore luciferino. E invece queste facce sono le stesse che ritrovi in tutte le metropoli quando cerchi una stanza ammobiliata e ti apre un ispettore in prepensionamento. Tutto questo mette in evidenza quanto ampiamente il male sia dilagato nelle nostre istituzioni. È il progresso dell’astrazione. A uno sportello qualsiasi può affacciarsi il tuo carnefice. Oggi ti recapita una lettera raccomandata, domani una sentenza di morte. Oggi ti fora il biglietto, domani la nuca. Ed esegue entrambe le cose con la stessa pedanteria e lo stesso senso del dovere”.
 
Si tratta di riflessioni che Jünger continuerà negli anni ’50 e oltre. E non a caso un suo scritto – La ritirata nella foresta – apparirà, prima ancora di svilupparsi in un vero e proprio manuale di resistenza libertaria (tradotto in italiano come Il trattato del ribelle), sulla rivista Confluence nell’ambito di un seminario internazionale sulla minaccia totalitaria. Pubblicata in Italia nel ’57 dalle Edizioni di Comunità di Adriano Olivetti, l’antologia di quegli scritti vedrà, accanto a quello di Jünger, i nomi e le firme della stessa Arendt, di James Burnham e di Giorgio de Santillana. Un’ottima compagnia per uno scrittore di cui purtroppo si è sempre teso invece a sottolinearne solo gli aspetti estetizzanti. Il fatto, purtroppo, è che in Italia si è sempre avuto difficoltà a concepire una via postliberale e immaginifica alla libertà. Fenomeno che viene confermato, d’altronde, dal fatto che in Italia si sia equivocato sulla figura jüngeriana del Waldgänger (alla lettera l’uomo-che-si-dà-alla-macchia, il libertario allo stato puro) traducendola con il termine di “ribelle” che evoca un atteggiamento diverso, non proprio quello che l’immagine di Jünger voleva suggerire.


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dimanche, 31 août 2014

Ernst Jünger, un anarchiste conservateur droit dans ses bottes

Ernst Jünger, un anarchiste conservateur droit dans ses bottes

Par

Ex: http://www.lexpress.fr

On croyait connaître l'écrivain inspiré, le soldat héroïque, le voyageur impénitent, l'entomologiste passionné... Sous la tenue et la retenue du seigneur des lettres allemandes, une belle biographie révèle les tourments d'un homme blessé.  

Ernst Jünger, un anarchiste conservateur droit dans ses bottes

Ernst Jünger, à la fin de la Première Guerre mondiale. Le conflit fit perdre ses illusions au jeune soldat qu'il était.

Deux photos peuvent résumer une vie. La première, prise à la fin de la Première Guerre mondiale, dévoile un officier arborant l'ordre Pour le mérite, la plus haute décoration militaire allemande, créée par Frédéric II. Le jeune homme, "pas très grand, mince, se tenant bien droit, visage étroit comme coupé au couteau", sera le dernier à la porter, puisqu'il meurt à près de 103 ans, en 1998. Son nom : Ernst Jünger, guerrier exceptionnel, grand écrivain, collectionneur d'insectes facétieux, voyageur au coeur aventureux.  

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Sur le second cliché, il est âgé de près de 90 ans, aux côtés d'un autre individu de taille modeste, François Mitterrand, président de la République française, et du chancelier allemand Helmut Kohl, "le géant noir du Palatinat". Les trois hommes célèbrent la réconciliation franco-allemande, à Verdun, le 22 septembre 1984.  

Quel homme incarne mieux le XXe siècle qu'Ernst Jünger, héros de Grande Guerre et symbole de l'Europe nouvelle et pacifiée ? Ernst Jünger. Dans les tempêtes du siècle, c'est précisément le titre de la biographie que lui consacre Julien Hervier, meilleur spécialiste français de l'auteur d'Orages d'acier. 

Quelque chose chez Jünger ne passe pas, en France : cette rigidité, cette maîtrise, qui fait prendre cet Allemand de tradition catholique (mais athée), aux origines paysannes et ouvrières, pour l'archétype de l'aristocrate prussien protestant, le junker. Sans doute y a-t-il méprise. 

"Une dure et froide sincérité, une sobre et sévère objectivité"

Selon Ernst Niekisch, instituteur marxiste et chef de file du "nationalbolchevisme" - l'un des multiples courants rouge-brun qui saperont la république de Weimar -, familier de l'appartement-salon berlinois de Jünger, où se côtoient artistes fauchés, demi-soldes aux abois et aventuriers en tout genre, "sa distinction ne repose pas sur un privilège social, mais directement sur le contenu intime de son être : il fait partie de ces rares hommes qui sont absolument incapables de bassesse. Celui qui pénètre dans la sphère où il vit entre en contact avec une dure et froide sincérité, une sobre et sévère objectivité, et surtout, un modèle d'intégrité humaine." 

Pour son biographe, Jünger est d'abord victime de sa monomanie : "l'obsession de la tenue", qu'il s'agisse de posture, maintien, aspect, fermeté, dignité, "surmoi", fruit d'une "anthropologie personnelle" élaborée pendant la Grande Guerre au contact du genre humain. Car le jeune soldat de 1914, nostalgique "de l'inhabituel, du grand péril", saisi par la guerre "comme [par] une ivresse", adoptant un flegme fataliste à l'épreuve du feu, vieillit d'un siècle en quatre ans et quatorze blessures, comme l'illustrent ses Carnets de guerre 1914-1918, qui viennent d'être traduits. Et y perd ses illusions.  

"Là où un homme est monté jusqu'à la marche presque divine de la perfection, celle du sacrifice désintéressé où l'on accepte de mourir pour un idéal, on en trouve un autre pour fouiller avec cupidité les poches d'un cadavre à peine refroidi." La vieille chevalerie est morte, la guerre moderne est menée par des techniciens et la transgression est au coin de la rue. Lors de son bref séjour sur le front, dans le Caucase, en 1942, apprenant par la rumeur les exactions de la Wehrmacht contre les civils, "la Shoah par balles", il est "pris de dégoût à la vue des uniformes, des épaulettes, des décorations, des armes, choses dont [il a] tant aimé l'éclat ". 

Le "junker", soldat héroïque d'un autre temps, était-il finalement modelé pour la guerre? "Lorsque je me place devant mes soldats [...] je constate que j'ai tendance à m'écarter de l'axe du groupe; c'est là un trait qui dénote l'observateur, la prédominance de dispositions contemplatives." L'aveu. Le guerrier se rêve hors de la ligne de mire et du champ de bataille. On le lui reprochera suffisamment.  

Pourquoi ne s'engage-t-il pas aux côtés des officiers instigateurs du complot du 20 juillet 1944 contre Hitler, alors qu'il est en plein accord avec eux ? Parce qu'il réprouve les actes terroristes. C'est au nom du même principe, que, militant nationaliste, il refuse, en 1922, de se joindre au corps franc qui assassine le ministre des Affaires étrangères, Walther Rathenau. Question de tenue. Jamais la fin ne justifie les moyens. Il le dira noir sur blanc aux nazis qui multiplient les appels du pied : "Ce n'est pas [...] une caractéristique majeure du nationaliste que d'avoir déjà dévoré trois juifs au petit déjeuner." 

Hitler et Brecht pour anges gardiens

Jünger est sans doute le seul homme à avoir été protégé à la fois par Adolf Hitler, lorsque les nazis veulent liquider cet "officier méprisant", et par Bertolt Brecht, quand ses camarades communistes veulent en finir avec ce "produit de la réaction". Qui peut bien être ce diable d'homme protégé par de tels anges gardiens? Un de ses biographes allemands l'a qualifié d'"anarchiste conservateur".  

Jünger est à fois un homme d'ordre et en rupture de ban. Lorsque, à peine âgé de 16 ans, il s'engage dans la Légion étrangère, c'est pour déserter à Sidi Bel Abbes et emboîter le pas de Rimbaud dans de nouveaux Jeux africains. Lorsque, après la guerre, il expérimente les drogues - auxquelles, blessé à la tête, il a goûté, dès 1918 - auprès d'Albert Hofmann, l'inventeur du LSD, c'est sous contrôle médical. 

Au fond, Jünger-le-corseté déteste la politique, les organisations et la technique. Il abhorre le nihilisme des nazis et celui de Céline, dont il dresse un portrait accablant dans ses Journaux parisiens. Pour venir à bout du Mal, il mise sur la liberté - celle du hors-la-loi scandinave du Traité du rebelle -, sur Eros (l'amour est l'adversaire du Léviathan) et la création artistique. 

Lors des terribles ébranlements politiques dont il est témoin, Jünger ressent "une grande sensibilité sismographique", mais il ne se départit pas de son rôle de spectateur. Depuis l'enfance, il se réfugie dans les livres et la nature. Le sentiment, alors éprouvé, que "la lecture est un délit, un vol commis contre la société" ne l'a jamais quitté.  

Il lit partout et par tous les temps. Sous les déluges d'obus, "alors qu'avec effroi tu penses que ton intelligence, tes capacités intellectuelles et physiques sont devenues quelque chose d'insignifiant et de risible", il avale les grands Russes, Gogol, Dostoïevski, Tolstoï, et les Aphorismes sur la sagesse dans la vie, de Schopenhauer.  

Sa passion pour les insectes, métamorphosée au fil du temps et des désillusions en entomologie, leur étude scientifique, nourrit ses Chasses subtiles. Les cicindèles, sous-groupe des coléoptères, ont sa préférence. L'une de ces créatures porte d'ailleurs son nom : Cicindela juengerella juengerorum. 

Ecologiste avant l'heure, il balance entre action et contemplation

A partir des années 1950, il parcourt la planète, attentif aux bonnes nouvelles - fécondité inépuisable du monde naturel, pertinence des techniques primitives - comme aux mauvaises : dégâts du tourisme de masse, suprématie du béton, règne bruyant des moteurs. Les réflexions de cet écologiste avant l'heure - les Verts allemands le détestent - alimentent les cinq tomes de Soixante-dix s'efface, son oeuvre ultime. 

Et si, finalement, la clef de cet homme balançant entre action et contemplation se logeait dans son combat contre la dépression - aux pires heures de l'Allemagne, à la mort, en uniforme, de son fils aîné, en 1944 à Carrare, et après guerre, à la suite du suicide du cadet - et contre une Sehnsucht insondable ? Son éditeur Michael Klett en émet l'hypothèse à l'enterrement de l'écrivain. "Lors de coups d'ailes plus légers de l'ange de la Mélancolie, ajoute-t-il, il se plongeait dans la contemplation d'une fleur, s'épuisait en d'interminables promenades ou s'imposait un emploi du temps rigide quasi digne d'un ordre mystique." Ainsi était Ernst Jünger. Mais il n'en a jamais rien dit. Question de tenue. 

Ernst Jünger. Dans les tempêtes du siècle, par Julien Hervier. Fayard, 540 p., 26 €. 

Carnets de guerre 1914-1918, par Ernst Jünger. Trad. de l'allemand par Julien Hervier. Bourgois, 576 p., 24 €. 

 
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Julien Hervier - Ernst Jünger, dans les tempêtes du siècle

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samedi, 30 août 2014

Ernst Jünger, vulnérable et reconnaissant

Ernst Jünger, vulnérable et reconnaissant

Ernst Jünger, vulnérable et reconnaissant

Ex: http://www.larepubliquedeslivres.com  

Un débat de haute volée a récemment agité certains intervenautes de la « République des livres » : était-il concevable qu’un homme tel que Ernst Jünger (1895-1998) ait pu ignorer en 1940 que le verre dans lequel il convenait de verser le champagne se nommait une « flûte », sonorité qui l’amusa ainsi que les officiers de son régiment alors qu’ils passaient par Laon ? On trouve cela dans ses carnets de guerre. La réponse à cette passionnante question ne figure pas dans la biographie, pourtant très complète, que Julien Hervier consacre à Ernst Jünger. Dans les tempêtes du siècle (538 pages, 26 euros, Fayard). On y découvrira en revanche un portrait d’une grande finesse de cet individualiste forcené, une analyse exhaustive de son œuvre, un examen attentif de sa correspondance, un panorama méticuleux de l’Allemagne de son temps, une étude éclairante de ses cercles d’amitié à ses différentes époques. Toutes choses qui rendent ce livre indispensable à tous ceux que cet écrivain singulier fascine ou intrigue quand il n’inquiète pas – du moins en France, où une véritable biographie manquait cruellement.9761372_109975988573

Pas évident d’écrire la vie d’un écrivain qui s’est déjà tant raconté tant dans ses romans que dans ses journaux intimes. Julien Hervier, son traducteur français et son éditeur dans la Pléiade, y parvient de manière convaincante en évitant l’écueil du démarquage. Il excelle à comparer les différents états des manuscrits, à confronter les préfaces successives d’un même livre. Sur les falaises de marbre, qui compta tant pour ceux qui choisirent l’exil intérieur, est bien mis en parallèle par l’auteur (dans le civil professeur de littérature comparée) avec Le Désert des Tartares de Buzatti et Le Rivage des Syrtes de Gracq, son grand admirateur. De même le dédoublement de la vision à l’œuvre dans Le Cœur aventureux, tant et si bien qu’on put parler alors de réalisme magique. Il entremêle parfaitement l’œuvre et la vie, rendant vaine toute tentative de les dissocier, comme s’y risquent certains biographes qui traitent de la vie à l’exclusion de l’œuvre, abandonnant son analyse aux universitaires. Comme s’il y avait une séparation entre les deux !

N’oubliant jamais sa qualité de traducteur, l’auteur nous éclaire sur des ambiguïtés qui ont souvent échappé au lecteur français notamment dans Le Travailleur (1932) : ainsi de Bürger qui signifie à la fois « citoyen » et « bourgeois » ; ou de Gestalt, à la fois « figure » et « forme » ; ou encore pour son Journal de guerre, de Strahlungen, à la fois « Rayonnements » et « Radiations » ; parfois, le traducteur reconnaît le « faute de mieux » s’agissant par exemple de son journal Siebzig verweht rendu en français par Soixante-dix s’efface, ce qui n’évoque pas, comme dans l’original, l’idée du sable qui s’écoule dans un verre et du vent qui emporte les jours à jamais. Passionnant, sonrécit est parfois un peu sec, à l’image de son héros, raide guerrier devenu pacifiste écologiste, doté d’une sensibilité sismographique aux grands ébranlements historiques, jamais dépris de sa fascination pour les vertus chevaleresques de l’armée prussienne, et plus encore depuis que les guerres étaient gouvernées par des techniciens.

Le récit de sa première guerre, celle qui lui valut de se voir décerner par Guillaume II à même pas 24 ans la plus haute distinction militaire allemande, l’ordre « Pour le Mérite », est bien documenté. Il montre bien le goût sportif du danger, l’autorité de fer exercée sur ses hommes, le courage à la tête des assauts, la capacité à maîtriser les situations de ce petit homme sec de 63 kgs, dont l’attitude n’est pas sans dandysme ni forfanterie. Sa stature de héros s’est façonnée là. Elle l’a longtemps protégé. Si Orages d’acier est l’un des grands livres (moins patriotique qu’on ne le croit) sur cette catastrophe, à ranger entre Le Feu de Barbusse, Ceux de 14 de Genevoix, Les Croix-de-bois de Dorgelès et La Comédie de Charleroi de Drieu la Rochelle, c’est parce que de tous les dangers qu’y a courus Jünger, celui qui le hanta le plus durablement, le plus angoissant de tous, n’est pas un corps à corps avec l’ennemi ou une course avec les obus, mais juste une errance dans les tranchées inconnues à la froide lumière du matin. Mais il y a en plus dans Orages d’acier quelque chose d’un roman d’éducation, où la guerre est considérée comme un grand jeu initiatique, sésame pour le passage à l’âge adulte, quitte à verser parfois dans ce que l’on a appelé « une esthétique de l’effroi ».

320px-Emil_Cioran_and_Ernst_JüngerOn l’a dit anarchiste conservateur, faute de mieux. Jünger était également fasciné par la politique et par la technique. Cette biographie éclaire l’influence sur sa pensée de la lecture du Déclin de l’Occident de Spengler, ou de l’amitié qui le liait au national-bolcheviste Ernst Niekisch ou au juriste Carl Schmitt, de même que la complicité intellectuelle qui le lia à son frère Friedrich Georg, ses relations avec les poètes Gottfried Benn et Paul Celan, son aversion pour Louis-Ferdinand Céline, qu’il rencontra sous l’Occupation à l’Institut allemand de Paris, et qui l’effrayait : il voyait en lui « la monstrueuse puissance du nihilisme contemporain, alliée à la mentalité d’un homme de l’âge de pierre »

N’en déplaise à ses irréductibles détracteurs (il y en a toujours eu en Allemagne comme en France, ils n’ont jamais désarmé, mais l’emphatique sérénité de cette biographie ne les calmera pas), on ne trouvera pas sous sa plume l’ombre d’un satisfecit accordé à Hitler ou au national-socialisme. Il ne l’a jamais rencontré ; mais, après avoir assisté à l’un de ses meetings, il en a retiré l’impression d’avoir affaire à un maître du Verbe « qui proposait moins des idées nouvelles qu’il ne déchaînait de nouvelles forces ». Non qu’il fut hostile par principe à un Führer, mais il estimait que celui-ci n’était « pas à la hauteur de la tâche à accomplir ». A partir de 1933, il a amendé ses écrits afin d’éviter leur instrumentalisation par les nazis, l’année même où il refusé la proposition de l’Académie allemande de poésie, passée sous la coupe des nazis, de la rejoindre. Tenir, se tenir, maintenir. Tant de lui s’explique là. Garder de la tenue, toujours.

L’un des plus violents articles qu’il ait écrits (dans Das Tagebuch, 21 septembre 1929) était clairement nihiliste, prônant la destruction de l’ordre bourgeois, ce qui lui valut d’être aussi pris à partie par le journal de Goebbels qui attribua sa conception du nationalisme à « son nouvel entourage kascher ». Quant à la question juive, il ne lui trouve aucun intérêt sur le plan politique. Il la règle d’ailleurs en une formule que Julien Hervier juge d’une détestable ambiguïté : « ou bien être Juif en Allemagne, ou bien ne pas être ». Ce qu’il explicita en associant « le Juif de civilisation » (entendez le Juif  soucieux de s’intégrer et de s’assimiler aux Allemands) au libéralisme honni. Ce qui ne l’empêche pas de démissionner, avec son frère, de l’association des anciens combattants de leur régiment lorsque les Juifs en sont exclusErnst-Jünger-1950-Wilflingen

Le 20 juillet 1944, malgré son hostilité fondamentale au régime, sa solidarité et son amicale sympathie pour les conjurés, il ne fut pas du complot avorté contre Hitler. Son biographe rappelle qu’il a toujours été hostile au principe de l’attentat, non seulement à cause des représailles mais parce que les hommes se remplacent même au plus haut niveau et qu’un attentat ne saurait amener un bouleversement de fond en comble. Il échappa « miraculeusement » à la répression. Il n’en demeura pas moins pour beaucoup un officier de la Wehrmacht, un ancien ultra du nationalisme qui s’était répandu dans maints journaux durant l’entre-deux-guerres, un théoricien de la mobilisation totale.

L’homme privé n’est pas négligé par ce biographe inspiré, doté d’admiration critique. Pas un homme religieux mais pieux au sens ancien du terme, désarmé face au caractère sacré du monde naturel. Les drogues, Jünger a commencé à y toucher en juin 1918, à l’hôpital de Hanovre : blessé au combat (il le fut quatorze fois), il en profita pour essayer l’éther, expérience qu’il poursuivra plus tard notamment aux côtés d’Albert Hofmann, l’inventeur du LSD ; mais il cessa lorsqu’il comprit que si les substances lui permettaient d’accéder à des intuitions inédites, elles étaient un obstacle majeur à la conscience lucide indispensable à la création artistique. Mais c’est sur la question de sa vulnérabilité que ce livre apporte une lumière nouvelle.

Il nous montre son héros en mélancolique miné par les effets délétères de la Sehnsucht, état qui se traduisait notamment par des périodes d’aboulie. Dans les derniers temps du contemplatif centenaire, écrivain accablé d’honneurs et de prix qui ne se plaisait que dans ses voyages aux îles, le mot qui le résume le mieux selon lui n’en est pas moins « gratitude ». Il ne cessait de payer sa dette aux hommes qui l’avaient fait, aux valeurs dans lesquelles il se reconnaissait, dans les institutions auxquelles il devait, convaincu qu’il n’était pas de plus haute vertu que la reconnaissance. Bien que d’origine catholique et paysanne, il passa pour l’incarnation de l’aristocrate prussien protestant. Beaucoup ont confondu Jünger et Junker. Question d’euphonie probablement. Sa fierté d’avoir un papillon à son nom (Pyralis jüngeri Amsel) et même un organisme monocellulaire à lui dédié (Gregarina jungeri), une vingtaine d’insectes en tout, que l’entomologiste amateur respecté des professionnels a la coquetterie de juger plus importante que sa notoriété littéraire.

 Alors oui, certes, sa capacité d’émerveillement face à la découverte de la flûte à champagne… Celle d’un homme qui avait mûri au milieu des tempêtes ainsi qu’en témoignait son ex-libris : « In tempestatibus maturesco ».

(« Ernst Jünger à différents âges – et avec Cioran » photos D.R.)

Cette entrée a été publiée dans Histoire Littéraire, Littérature étrangères.

mardi, 15 juillet 2014

Ernst Jünger’s The Forest Passage

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A Tribe Among the Trees:
Ernst Jünger’s The Forest Passage

By Jack Donovan

Ex: http://www.counter-currents.com

Ernst Jünger
The Forest Passage [2]
Translated by Thomas Friese
New York: Telos Press, 2013

We all live in deserts.

Urban deserts. Suburban deserts. Even in rural areas it is difficult to escape the commercially refined silicates of mechanized and meaningless modernity that blow over and bury the fossilized remains of dead gods and old ways. The desert — The Nothing [3] — grows and obscures and stifles all.

Describing the terrorized boredom of modern men, Ernst Jünger, quoting Nietzsche, warns: “woe to him in whom deserts hide.”

Jünger was writing in the aftermath of World War II about the chafing of his own individualism against the bureaucratic machine of Nazi Germany, and The Forest Passage makes mention of dictatorships. But, with uncanny foresight, he predicted our Twenty-First Century predicament, from the pointlessness of voting to near-constant surveillance and the neurotic need to know the news numerous times throughout the day. Jünger prophesied our states that make technicians into priests, while paving over institutions, like churches, which facilitate an inner spiritual life that the secular state is unable to control. That which cannot be counted, measured, or taxed cannot be permitted. This unquantifiable grain of existence that survives beyond the reach of the mechanized world is what Jünger identifies as freedom, and woe to him who knows only the desert, “woe to him who carries within not one cell of that primal substance that ensures fertility, again and again.”

Jünger’s forest is a spiritual oasis. It is not in the desert, but within it. The forest is everywhere — in the desert, in the bush, and in the enemy’s’ own backcountry — like an invisible layer of transcendent humanity and creative life energy that is seen only by those who choose to see it.

. . . it is essential to know that every man is immortal and that there is eternal life in him, an unexplored and yet inhabited land, which, though he himself may deny its existence, no timely power can take from him.

He doesn’t reference it directly, but one wonders if the forest is some kind of allusion to the Garden of Eden — some memory of pure, sinless and untainted man living in harmony with nature. Throughout the book, Jünger seems to be equating pure, primal human morality with Christ-like morality — which will seem an obvious error to everyone who is not a Christian, and a natural fact to anyone who is. The forest rebel — one who takes the forest passage — is so morally certain that, “he allows no superior power to dictate the law to him, neither through propaganda nor force.” This is somewhat problematic, because this kind of individualism-at-all-costs makes tribal life impossible, and therefore makes a new, better society impossible. Without hope for a better society and the ability to integrate into it and trust one’s peers, the forest rebel is just raging against the machine, and seems like a mere contrarian or malcontent.

The Christian morality of The Forest Passage is an integral part of it, but Jünger’s conception of it is so amorphous that it often seems Jungian or similar to the work of Joseph Campbell — it’s as if he’s superimposing Christian morality on all myths.

This brings me to my favorite line in the book, which opens up a point of entry for those of us who see a somewhat different forest: “Myth is not prehistory; it is timeless reality, which repeats itself in history.”

If we use the forest as a code for the timeless world of myth that exists in us, and choose to perceive it as being alive in something as cold and dead as shopping mall parking lot or a government building, we can experience life differently.

In a recent interview I did with Paul Waggener from the Wolves of Vinland [4], he said that Germanic mysticism was his life, and that the aim of ritual was to plant a seed that spreads out like the branches of a tree and affects every aspect of one’s life, until everything becomes ritual. One could say that a man who achieves this state of being is living in the forest, despite the desert.

The work of spiritual revolt in the desert, of keeping the forest alive and planting seeds of it in the sidewalk cracks of the mechanized world is what Jünger referred to as “the forest passage.”

In old Iceland, Jünger wrote, “A forest passage followed a banishment; through this action a man declared his will to self-affirmation from his own resources.” A man on the forest passage “‘takes the banishment in stride” and becomes his own warrior, physician, judge and priest.

Jünger warned forest rebels away from the controlled, predictable and pointless forms of rebellion, like voting “no,” and offered that a man scrawling “no” on a wall would have a greater impact on the minds of those around him. Spreading dissenting and destructive ideas and information can have a greater impact than making an official gesture that can be easily tracked, quantified and punished.

One can never know the true motives for the sniping of anonymous online characters today, and it is difficult to gauge their sincerity because they are ultimately accountable only to themselves and can easily change positions or be complete hypocrites. However, it is possible and likely that some are truly sincere and have chosen the forest passage because it allows them to do greater harm to the desert forces. Those who fund the operations of more public figures and organizations are also examples, as they must remain covert to continue to generate the income that they funnel into insurgent operations.

Jünger did understand that change would not come from ideas alone, and that action would also be necessary. In several passages, he predicted the necessity of service-disrupting fourth generation warfare tactics of the type outlined in John Robb’s Brave New War. The forest rebel,

. . . conducts his little war along the railway tracks and supply routes, he threatens bridges, communication lines, and depots. His presence wears on the enemy’s resources, forces them to multiply their posts. The forest rebel takes care of reconnaissance, sabotage, dissemination of information in the population.

However, Jünger wanted to be clear that while the forest rebel does not fight “according to martial law,” he does not fight like a bandit. He wasn’t clear what the difference is between a bandit and a rebel, and distinctions like this seem like little more than moral posturing. The controlled masses will see the actions of any forest rebel the way they see the acts of terrorists and criminals. After all, he saw how fragile our status as non-criminals was and would be, and wrote:

None of us can know today if tomorrow morning we will not be counted as part of a group considered outside the law. In that moment the civilized veneer of life changes, as the state props of well-being disappear and are transformed into omens of destruction. The luxury liner becomes a battleship, or the black jolly roger and the red executioner’s flag are hoisted on it.

This is one of the great strengths of The Forest Passage, and a good reason to read and contemplate it. Any of us could be forced into a position — such as prison — where solitary and spiritual revolt is the only form of revolt left available to us. Understanding the nature of power and the nature of the modern bureaucratic systems means understanding that you will receive no justice from the system, and that you may find yourself completely alone.

The resistance of the forest rebel is absolute: he knows no neutrality, no pardon, no fortress confinement. He does not expect the enemy to listen to arguments, let alone act chivalrously. He knows that the death penalty will not be waived for him. The forest rebel comes to learn a new solitude . . .

Like any prisoner of war who knows he will not be rescued, he is ultimately alone with his honor.

However useful, this focus on solitude and the absolute moral authority of the individual requires some sort of caveat. This kind of alienation and absolute individualism limits human connections and makes human relationships disposable. It is a product of and the way of the desert. It is the way of the inveterate consumer who chooses one identity today and another tomorrow, fearful of the risks associated with true commitment to other people.

The forest passage is a strategy for desperate and fearful times. It is a tool for the prisoner, whether behind bars, or behind a desk typing with a camera over his shoulder and some algorithmic authoritarian tagging and monitoring his keystrokes.

Any vision of a forest worth preserving must include a reconnection not only with myth, but with men. The end must be to find a tribe among the trees, or the forest itself, however magical, will forever be a lonely and fearful place, and it will offer little comfort from the encroaching desert.

 


Article printed from Counter-Currents Publishing: http://www.counter-currents.com

URL to article: http://www.counter-currents.com/2014/06/a-tribe-among-the-trees/

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[1] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2014/06/ForestPassage.jpg

[2] The Forest Passage: http://www.amazon.com/gp/product/0914386492/ref=as_li_tl?ie=UTF8&camp=1789&creative=390957&creativeASIN=0914386492&linkCode=as2&tag=countecurrenp-20&linkId=OFSI2UZ5WKZGALOV

[3] The Nothing: http://www.amren.com/features/2014/05/identity-defies-the-global-marketplace/

[4] In a recent interview I did with Paul Waggener from the Wolves of Vinland: http://www.jack-donovan.com/axis/2014/06/start-the-world-podcast-episode7-the-wolves-of-vinland/

mardi, 01 juillet 2014

Ernst Jünger: "Ich widerspreche mir nicht..." (1977)

 

Ernst Jünger:

"Ich widerspreche mir nicht..."

(1977)

lundi, 30 juin 2014

Julien Hervier:E. Jünger et l'écriture de la guerre

Julien Hervier:

Ernst JÜNGER et l'écriture de la guerre

dimanche, 08 juin 2014

Ernst Jünger: yo soy la acción

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por José Luis Ontiveros

Ex: http://culturatransversal.wordpress.com

En torno a la obra del escritor alemán Ernst Jünger se ha producido una polémica semejante a la que preocupó a los teólogos españoles en relación con la existencia del alma de los indios. De alguna manera, el hecho de que se le haya discutido en medios intelectuales mundiales con asiduidad, y el que una nueva política literaria tienda a revalorizarlo, le otorga, como lo hizo a los naturales el Papa Paulo III, la posibilidad de una lectura conversa; ya no traumatizada por su historia maldita, absolutoria de su derecho a la diferencia, y exoneradora de un pasado marcado por la gloria y la inmundicia.

La polémica sobre Jünger que en medio de lamentaciones previsorias sobre su “ceguera histórica” ha reconocido la posibilidad de que también poseía un alma personal, se ha mantenido, sin embargo, en los límites del conocimiento de su obra.

Pareciera que profundizar en Jünger puede indicar de alguna manera una proclividad secreta, una oscura complicidad con este peligroso ”junker”, intelectual orgánico de los desarraigados, al que se suele evocar como el cazador y animal de presa, que en la adolescencia se enrola en la Legión Extranjera francesa, testimonio que deja en Juegos Africanos; se le presenta como situado ”de pronto a la sombra de las espadas” (1), y esta exaltación hecha tipología se presenta como el truco con que se evade el contenido de su obra. Por ello debe partirse de un principio: Jünger sigue siendo el mismo, es un réprobo permanente y resuelto, una conciencia erguida y soberana: “yo siempre he tenido las mismas ideas, sólo que la perspectiva ha cambiado con los años” (2). En Jünger hay una sola línea ascendente, un impulso de creación unívoco que arranca en 1920 con Tempestades de Acero, se afirma en Juegos Africanos, obra intermedia, que precede a En los acantilados de mármol (1939), Heliópolis (1940), y Eumeswil (1977).

Resulta entonces necesario para llegar a Heliópolis y a un acercamiento a su comprensión, hacer referencia a un problema histórico. Jünger en la línea de Saint-Exupéry y de Henry de Montherlant ama la acción como el supremo valor de la vida: no existe una renuncia a las pompas del mal, a los frutos concretos de la acción. Hay, al contrario, a lo largo de su obra, un reflejo centelleante que nace de la negación deliberada de la bondad; un aliento nietzscheano de que ”no encontraremos nada grande que no lleve consigo un gran crimen”. Por ello es que debe ahorrarse la gratuidad de perdonarlo, de ver en Jünger al intelectual víctima de sus demonios. De esta forma si Jünger ha padecido un Núremberg simbólico, la actitud rectora de su creación ha permanecido firme sobre la marejada, sobre los prejuicios políticos y aún sobre la ”conmiseración” que nunca ha necesitado. No hay en su obra, como producto de la derrota de Alemania en la II Guerra Mundial, una disociación de un antes y un después; una versión suavizada del mal, que habría retrocedido de su estado agudo a su estado moderado.

Por ello, si su texto La Guerra, nuestra madre escrito en 1934 ha recorrido una suerte semejante a Bagatelas para una masacre de Louis Ferdinand Céline, en el sentido de que ambos son unánimemente ”condenados” y prácticamente inencontrables a excepción de fragmentos; el joven escritor alemán, que afirmaba que: ” la voluptuosidad de la sangre flota por encima de la guerra como una vela roja sobre una galera sombría” (3), es el mismo que canta el poder de la sangre, treinta y un años después de cieno, fuego y derrota: ”los gigantescos cristales tienen forma de lanzas y cuchillos, como espadas de colores grises y violetas, cuyos filos se han templado en el ardiente soplo de fuego de fraguas cósmicas” (4).

El nuevo intelectual

El viejo ”junker”, ha nacido como hijo de la burguesía industrial tradicional, en Heidelberg, el 29 de marzo de 1895, ha permanecido a sus 93 años de edad como un fiel artesano de sus sueños, un celoso guardián de sus obsesiones, un claro partidario de la acción. Por otra parte, se presenta el problema histórico. Jünger, herido siete veces en la I Guerra Mundial, portador de la Cruz de Hierro de primera clase y de la condecoración “Pour le Mérite” (la más alta del Ejército Alemán); miembro juvenil de los “cascos de acero” y de los ”bolcheviques nacionales”; y ayudante del gobernador militar de París durante la ocupación alemana, es un nuevo intelectual, que rompe con el molde tradicional que tiene de la función intelectual la Ilustración y la cultura burguesa. En cierta medida corresponde a los atributos que describe Gramsci del “nuevo” intelectual: “el modo de ser del nuevo intelectual ya no puede consistir en la elocuencia motora, exterior y momentánea, de los efectos y de las pasiones, sino que el intelectual aparece insertado activamente en la vida práctica, como constructor, organizador, persuasivo permanentemente” (5). En este sentido Jünger va más allá de la “elocuencia motora”, de la relación productiva y mecánica de una condición económica precisa.

Puede decirse entonces que si bien Jünger tiene atributos de “junker” prusiano, teniendo parentesco con la ”casta sacerdotal militar que tiene un monopolio casi total de las funciones directivas organizativas de la sociedad política” (6), esta relación funcional y productiva está rota en el caos, en el nihilismo y la decepción que acompañan a la derrota de Alemania en la I Guerra Mundial. Jünger, que quizá en la época guillermina del orgulloso II Reich, hubiera podido reproducir las características de su clase, se encuentra libre de todo orden social como un intelectual del desarraigo, de la tribu de los nómadas en el poderoso grupo disperso de los solitarios que han luchado en las trincheras.

Detengámonos en el análisis de este estado espiritual y de esta circunstancia histórica, cuya trascendencia se manifiesta en toda su narrativa, especialmente en el carácter unitario de su obra y en su posición ideológica, lo que a su vez nos permitirá comprender la clave de una de sus novelas más significativas del período de la última postguerra: Heliópolis, cuyos nervios se hallan ya entre el tumulto que sobrecoge al joven Jünger, como un brillante fruto de la acción interna que sujetará su espíritu.

Así podremos apreciar cabalmente a este autor central de la literatura alemana del siglo XX, para determinar cuál es el rostro que se ha cincelado, en la multiplicidad de espectros que lo reflejan con caras distintas. ¿Acaso es Jünger, como quiere Erich Kahler, al que “incumbe la mayor responsabilidad por haber preparado a la juventud alemana para el estado nazi, aunque él mismo nunca haya profesado el nazismo?” (7). ¿Se trata del escéptico autor de la ”dystopía” o utopía congelada que se expresa en su relato Eumeswil? ¿Quién es entonces este contardictorio anarquista autoritario?

La trilogía del desarraigo

Podemos intentar responder con un juego de conceptos en los que se articulase su radiografía espiritual, con su naturaleza compleja y una historia convulsionada y devoradora. Esta visión nos dará un Jünger revelado en una trilogía: se trata del demiurgo del mito de la sangre, del cantor del complejo de inferioridad nihilista de la cultura alemana, del emisario del dominio del hombre faústico y guerrero. Sólo así podremos entender cómo Jünger pudo dirigir desde “fuera de sí” un pelotón de fusilamiento, certificar la estética del dolor con una “segunda conciencia más fría” o experimentar los viajes místicos del LSD o de la mezcalina. Requerimos verlo en su dimensión auténtica: la del “condottiero” que huye hacia delante en un mundo ruinoso.

Memorias de un condottiero

Ernst%20Junger%202.jpgLa aventura de Jünger cobra el símbolo de una organicidad rotunda enla relación social del intelectual con la producción de una clase concreta; se trata fundamentalmente de una personalidad que de alguna manera expresa Drieu la Rochelle: ”(es) el hombre de mano comunista, el hombre de las ciudades, neurasténico, excitado por el ejemplo de los fascios italianos, así como por el de los mercenarios de las guerras chinas, de los soldados de la Legión Extranjera” (8). Se verdadera patria son las llamas, la tensión del combate, la experiencia de la guerra. Su conformación íntima se encuentra manifestada en otro de aquellos que vivieron ”la encarnación de una civilización en sus últimas etapas de decadencia y disolución”, así dice Ernst Von Salomon en Los proscritos: ”sufríamos al sentir que en medio del torbellino y pese a todos los acontecimientos, las fatalidades, la verdad y la realidad siempre estaban ausentes” (9). Es este el territorio en que Jünger preparará la red invisible de su obra, recogiendo las brasas, los escombros, las banderas rotas. Cuando todo en Alemania se tambalea: se cimbran los valores humanitarios y cristianos, la burguesía se declara en bancarrota y los espartaquistas establecen la efímera República de Münich, aparecen los elementos vitales de su escritura, que atesorará como una trinchera imbatible heredera del limo, con la llave precisa que abrirá las puertas de la putrefacción a la literatura.

Es la época en que Jünger, interpretando la crisis existencial de una generación que ha pretendido disolver todos sus vínculos con el mundo moribundo, toma conciencia de sí con un poder vital que no quiere tener nada que deber al exterior, que se exige como destino: ”nosotros no queremos lo útil, práctico y agradable sino lo que es necesario y que el destino nos obliga a desear”. Participa entonces en las violentas jornadas de los ”cascos de acero”. Sin embargo, pese a ser un colaborador radical del suplemento Die Standart, ógano de los ”Stahlhelm”, se mantendrá siempre con una altiva distancia del poder. Llegará a compartir páginas incendiarias en la revista Arminius con el por entonces joven doctor en letras y ”bolchevique nacional” Joseph Goebels y con el extraño arquitecto de la Estonia germana, Alfred Rosenberg.

Cuando Jünger escribe en 1939 En los acantilados de mármol (que se ha interpretado como una alegoría contra el orden nacionalsocialista), han pasado los días ácratas en que ”los que volvían de las trincheras, en las que por largos años habían vivido sometidos al fuego y a la muerte, no podían volver a las escuálidas vivencias del comprar y el vender de una sociedad mercantilista” (10). Ahora una parte considerable de los excombatientes se ha sumado a una revolución triunfante, en que la victoria es demasiado tangible. Jünger decide separarse en el momento del éxito. Hay un brillo superlativo, una atmósfera de saciedad, una escalera ideológica para arribar a la prosperidad de un nuevo orden.

En el momento en que Jünger ha decidido replegarse, abandonar el signo de los tiempos, batirse a contracorriente, encuentra, una vez más, la salida frente a la organización del poder en la permanente rebeldía y en la conciencia crítica. Mas esta fuga no es una deserción: hasta el crepúsculo wagneriano sigue vistiendo el uniforme alemán. Su revuelta se manifiesta en la creencia en las ”situaciones privilegiadas”, es decir, en los instantes en que la vida entera cobra sentido mediante un acto definitivo. Resuelve así, en la rápida decisión que impone la guerra, retornar a una selva negra personal con la desnudez irrenunciable de sus cicatrices, aislado del establecimiento y de la estructura del poder.

El color rojo, emblema del ”condottiero”, baño de fuego sobre la bandera de combate se ha vuelto, finalmente, equívoco: ”la sustancia de la revuelta y de los incendios se transformaba con facilidad en púrpura, se exaltaba en ella” (11); Jünger, mirando las olas de la historia restallar sobre los acantilados de mármol, asistiendo al naufragio de la historia alemana, desolado en el retiro de las letras, exalta en la acción la única emergencia que no se descompone, ”el juego soberbio y sangriento que deleita a los dioses”.

El tambor de hojalata

Hemos mencionado que una parte significativa del materail de sueños que forma su novela Heliópolis, se encuentra en el poderoso torrente de la aventura en que Jünger se desenvuelve desde sus años juveniles. En realidad, de sus dos grandes novelas de la última postguerra, quizá Heliópolis sea más profundamente Jüngeriana que Eumeswil en el sentido en que su universo estámás nítidamente plasmado, de que no existe el ”pathos” de una mala conciencia parasitaria, y de que, a diferencia del usufructo de la fácil politización en que la literatura se manipula como una parábola social o histórica , retine un poder metapolítico, esto es, un orbe estético que se explica a sí mismo, que se sustenta como un valor para sí.

No está de más subrayar que, independientemente de la opinión de una gran parte de la crítica sobre En los acantilados de mármol y sobre Eumeswil como un mensaje críptico antihitleriano, la primera, y como una denuncia contra el totalitarismo, la segunda, su interés real sobrepasa la circunstancia política, concediendo que ésta haya sido la intención del autor. Intencionalidad difícil de mantener en un análisis que busque la esencialidad de Jünger, por encima del escándalo y del criterio convencional.

Heliópolis reconquista la tensión narrativa, el libre empleo de una simbología anagógica, el espacio de expresión que se ha purificado de lo inmediato y de las presiones externas del quehacer literario. Ello quizá se explique por razones propiamente literarias y en este caso también históricas. Usamos la palabra ”reconquista” como aquella que designa un esfuerzo que surge de la derrota, que se elava sobre la postración, que recupera el valor existencial de la experiencia.

De alguna manera, y luego de un sordo y pertinaz silenciamiento, el universo de Jünger ha recobrado su sentido original, su autónomo impulso poético. Más allá de la tramposa equivalencia entre sus imágenes y una determinada concepción de la realidad. Si bien ha manifestado ya “que no existe ninguna fortaleza sobre la tierra en cuya piedra fundamental no esté grabada la aniquilación”, trátese de un mito, de un movimiento social o de una organización del poder. Heliópolis encarna la idea de que si los edificios se alzan sobre sus ruinas, ”también el espíritu se eleva por encima de todos los torbellinos, también por encima de la destrucción” (12).

Esta es, entonces, una de las características fundamentales de la novela: el tiempo histórico siguiendo su cauce se ha absorbido. Lo ocurrido (su propia participación en la historia alemana contemporánea) se ha filtrado entre las simas de los heleros como un agua nueva e incontaminada. Su escritura se ha librado del lastre y ha retomado un vuelo límpido, en el que narra la épica y eclipse de La ciudad del Sol, como la crónica del reino de Campanella, más distinta a la construcción intelectual de la utopía. Hallamos en Heliópolis nuevamente al Jünger de siempre, al artista independiente, que ha sepultado con el relámpago de su lenguaje, las bajas nubes sombrías del rapsoda de la eficacia militar y despiadada.

Notas y bibliografía

1.- Michael Tournier, Ernst Jünger Libreta Universitaria nº 58 UNAM, Acatlán, 1984.
2.- Nigel Jones, Una visita a Ernst Jünger, La Gaceta del FCE nº 165.
3.- Roger Caillois, La cuesta de la guerra, Tres fragmentos de la Guerra Nuestra Madre, Ed. FCE breviarios nº 277, México.
4.- Ernst Jünger, Heliópolis, Ed. Seix Barral, Barcelona.
5.- Antonio Gramsci, Los intelectuales y la organización de la cultura, Jaun pablos Edr. México.
6.- Antonio Gramsci. Obra cit.
7.- Erich Kahler, Los alemanes Ed. FCE breviarios nº 165, México.
8.- Pierre Drieu La Rochelle, Notas para comprender el siglo.
9.- Ernst Von Salomon, Los proscritos Ed. L. De Caralt, Barcelona.
10.- Carlos Caballero, Los Fascismos desconocidos, Ed. Huguin.
11.- Ernst Jünger. Obra cit.
12.- Idem.
(Texto publicado en la revista Fundamentos para una Nueva Cultura N° 11, Madrid, 1988.)

mercredi, 29 janvier 2014

Ernst Jünger, déchiffreur et mémorialiste

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Ernst Jünger, déchiffreur et mémorialiste
 
par Luc-Olivier d'Algange
 
Ex: http://anti-mythes.blogspot.com
 
L'œuvre d'Ernst Jünger s'étend sur une période exceptionnellement longue. Entre les premiers écrits tels qu’Orages d'Acier, ou Le Cœur aventureux, « version 1929 », jusqu'aux ultimes, ce sont plus de sept décennies d'écriture, de lectures, de voyages, de contemplations, de rêves qui s'offrent à notre regard panoramique. Par exception, la formule consacrée peut être utilisée à bon-escient: l'œuvre de Jünger « domine le siècle ». Elle le domine non seulement par sa hauteur, et les critiques ne manquèrent point de lui reprocher d'être hautaine, elle le domine aussi, et le plus simplement du monde par sa durée et par la profondeur que l'expérience du temps suscite dans l'entendement de l'auteur. Ernst Jünger fut, comme presque tous les grands écrivains du siècle, hanté par la question du temps.

L'expérience du temps retentit dans la profondeur du mythe. L'œuvre de Jünger poursuit, par ses propres voies, ce récitatif de l'expérience du temps. La réminiscence dans l’œuvre de Marcel Proust, la dilatation temporelle aux dimensions odysséennes d'une seule journée qu’opère James Joyce dans Ulysses, ou encore la récapitulation du monde à la fois joyeuse et apocalyptique des Cantos d’Ezra Pound ravivent dans la littérature moderne ce questionnement immémorial. Comme ceux-là, Jünger n'a cessé d'éprouver la nécessité d'aller au cœur de l'être et du temps et de trouver son propre lieu et sa propre formule pour déchiffrer le monde. Plus que d'autres, Jünger s'est tourné vers le monde pour en déchiffrer les énigmes intérieures.

Si Jünger fut dandy, comme certains persistent à l'en accuser, il faut bien reconnaître que son œuvre est la moins narcissique qui soit. Chaque page de Jünger nous apporte, comme les poèmes de Cendrars, des « nouvelles du monde ». Les paysages les plus grandioses et les aventures les plus extrêmes comme les détails les plus infimes et les circonstances en apparence les moins décisives sont portés à notre attention avec la même déférence, pour peu qu'ils soient les instruments d'une connaissance qualitative, sensible, propice aux aventures de la pensée.

Ruskin définit le véritable artiste à la fois comme « déchiffreur, chanteur et mémorialiste ». Si la part à proprement parler « lyrique » de l'œuvre de Jünger est plus sous-jacente qu'apparente (mais le lyrisme alors n'en touche que les cordes plus profondes, comme dans les dernières pages de Visite à Godenholm,) l'appellation de « déchiffreur » non moins que celle de « mémorialiste » donne immédiatement l'idée la plus juste du propos et du style de ses livres, qui paraissent, par ailleurs, échapper à tous les genres ainsi qu'à toutes les certitudes thématiques ou idéologiques.

Etre à fois déchiffreur et mémorialiste, c'est comprendre que l'œuvre saisit dans les nuances du devenir l'éclat de l'être. Le mémorialiste suit le cours du temps, la nuance du jour, la beauté et la tristesse passagère des instants livrés à l'oubli. Le mémorialiste, servant humble et déférent de Mnémosyme, recueille cette « matière première », au sens alchimique, dont le déchiffreur lui, se saisira avec cet esprit d'aventure qui caractérise les métaphysiciens et les hommes de cœur. Le mémorialiste investit le devenir de la puissance d'être de la mémoire, de la transmission, alors que le déchiffreur redonnera à la chose transmise, recueillie, sa chance de refleurir en d'autres contrées, plus subtiles et plus lumineuses. En d'autres termes, on pourrait dire que le mémorialiste construit un édifice de pensées, de réflexions, de savoirs qui permettront au déchiffreur de préfigurer le temple intérieur de la connaissance, que nous nommerons la « gnose poétique » et dont nous approchons par une connaissance de plus en plus précise, et précise jusqu'à l'éblouissement, de l'interdépendance universelle.

De livres en livres, Jünger poursuit cette œuvre de déchiffreur et de mémorialiste car loin de se soumettre à la lettre morte de ceux qui ne croient qu'au « travail du texte », sa pensée, toujours à la pointe de « l'esprit qui vivifie », cherche en toute chose, selon la formule de Nietzsche, « l'éternelle vivacité ». A celui qui voudra rendre justice à la pensée, toujours en mouvement, mais toujours exactement orientée, d'Ernst Jünger, l'occasion se présentera souvent de citer en une même phrase des auteurs, des théories, des méthodes que notre esprit compartimenteur, hérité d'une méconnaissance et d'une idolâtrie de la philosophie cartésienne, répugne à associer. Ainsi le Nouveau Testament et les « évangiles » subversifs du Solitaire d'Engadine, ou encore les références aux mondes bibliques ou païens, les méthodes scientifiques et les songeries hermétiques, la poésie et la guerre, l'aventure et l'immobilité contemplative.

Les historiographes de l'œuvre jüngérienne insistent, par exemple, sur les ruptures ou les revirements d'ordre idéologique ou politique. Certes, le nationalisme exacerbé et martial du jeune collaborateur d'Arminius cédera la place au Contemplateur solitaire, l'apologiste du Travailleur, accomplissant sa « Figure » par la technique, deviendra le critique avisé du monde moderne et l'inventeur de l'Anarque. Certes, l'intérêt pour les anciennes traditions païennes de l'Europe précède une méditation biblique. Mais aussitôt l'intelligence se dégage-t-elle de l'histoire proprement dite qu'elle voit dans ces diverses configurations se dessiner un paysage intérieur dont la cohérence et l'harmonie sont bien davantage la marque que le discord ou le chaos.

L'œuvre de Jünger, disions-nous, est l'une des moins narcissiques du vingtième siècle. Rarement tournée vers le « moi », elle est une invitation à découvrir le monde, « ce vaisseau cosmique » à bord duquel nous traversons le temps. L'aventure sociale ou psychologique tient une place infime dans cette œuvre qui est sans doute la première du vingtième siècle, au sens hiérarchique autant que chronologique, à s'être radicalement dégagée des méthodes et des théories du Naturalisme du dix-neuvième siècle, si abondamment relayé par la littérature des sciences humaines. Les groupes sociaux, la psychologie individuelle ou collective n'intéressent guère l'auteur des Falaises de Marbre ou d'Eumeswil. Bien davantage son attention est-elle requise par les rêves lorsque les rêves révèlent la nature héraldique et sacrée du monde.

Maintes fois mis en accusation, Jünger n'a jamais cherché aucune caution de « bonne moralité » politique, son œuvre se situant résolument, dans sa part la plus importante, du côté de l'intemporel. On risque fort de ne rien comprendre à son Journal si l'on ne voit pas que le temps, son temps, est toujours considéré du point de vue de l'intemporel. L'observation exacte prend place dans une vue-du-monde qui dénie au hasard et à la nécessité l'empire que la pensée moderne leur accorde.

« L'existence des choses, écrit Jünger, est donc préfigurée comme dans un sceau dont la figure imprimée dans la cire apparaît plus ou moins distinctement. » Il ne semble pas que, sur ce point, la pensée de Jünger ait varié. On songe irrésistiblement au début fameux des Disciples à Saïs de Novalis: « Les hommes marchent par des chemins divers. Qui les suit et les compare verra naître d'étranges figures; figures qui semblent appartenir à cette grande écriture chiffrée qu'on rencontre partout: sur les ailes, sur la coque des oeufs, dans les nuages, dans la neige, dans les cristaux, dans les formes des rocs, sur les eaux congelées, à l'intérieur et à l'extérieur des montagnes, des plantes, des animaux, des hommes, dans les clartés du ciel, sur les disques de verre et de poix lorsqu'on les frotte et lorsqu'on les attouche: dans les limailles qui entourent l'aimant, et dans les étranges conjonctures du hasard.. »

Les Figures, les Types, les Formes témoignent d'une pensée pour laquelle la création littéraire est un moyen de connaissance, une gnose. L'engagement héroïque des premiers temps n'est point contraire à l'engagement, plus radical encore, de l'Anarque et du Contemplateur, si l'on comprend, comme l'enseigne la Bhagavât-Gîta que la contemplation est une forme supérieure de l'action. La forme supérieure ne renie point la forme dépassée, elle la couronne, tout comme l'ontologie dont nous parle Heidegger couronne la métaphysique qu'elle dépasse. Bien plus que des ruptures, le lecteur qui entrevoit dans l'œuvre de Jünger un moyen de connaissance, sera enclin à voir des changements d'états, comme dans les « œuvres » des Alchimistes. Car si l'œuvre de Jünger est éloignée du Naturalisme de Zola, elle est, en revanche, fort proche des « philosophes de la nature » tels que Franz von Baader, qui eurent une influence non négligeable sur les Romantiques allemands d'Iéna.

Alchimistes et théosophes dans la lignée de Paracelse et de Jacob Böhme, les philosophes de la nature s'avancent dans la connaissance comme sur un chemin où se lèvent les intersignes, légers comme des cicindèles. A chaque signe, le voyageur est convié à un changement d'état de conscience qui renvoie à un changement d'état d'être. Les Figures du monde visible sont l'empreinte d'un sceau invisible et les circonstances de notre existence, en ce qu'elles ont de resplendissant, témoignent, elles aussi, de cette concordance entre les mondes qui justifie l'existence des symboles.

Dans un monde où les symboles accomplissent leur fonction pontificale, ni le hasard ni le déterminisme n'ont cours; le monde s'ordonne selon des principes qui, pour être hors d'atteinte de l'entendement humain, n'en sont pas moins à l'origine des plus pertinentes interprétations humaines. Alors que le déterministe explique l'homme et le monde comme des mécanismes, obéissant ainsi, plus ou moins à son insu, à une morale utilitaire, Jünger appartient à la tradition, largement menacée mais cependant persistante, du romantisme « roman » de Novalis qui s'adonne à l'interprétation infinie, au « buisson ardent » de l'herméneutique permanente. Dans la vue du monde esthétique et métaphysique de Jünger, le monde n'étant point soumis à l'utilité, sa valeur ne dépendant point de son usage, de même que selon une éthique chevaleresque, la fin ne justifie jamais les moyens, la finalité n'est jamais que dans le cœur secret des êtres et des choses, dans cette plus incandescente limpidité que nous laissent deviner les approches et les dialogues avec l'invisible.

La danse de la cicindèle est l'idéogramme clair de la pure présence de l'être à lui-même. Tel est le sacré, le numineux, pour reprendre le mot de Walter Otto, dont l'approche exige la plus grande délicatesse. La connaissance du monde, la gnose poétique, est avant tout une philocalie. Le sacré, le divin se révèlent dans la beauté car la beauté est l'approche du sens. Là où les choses prennent sens, la beauté transparaît. L'accusation d'esthétisme contre l'œuvre de Jünger traduit la courte vue de ceux qui la portent car la beauté est toujours, dans l'œuvre de Jünger, le signe d'une présence, d'une profondeur métaphysique, d'un autre monde, principe de profusion et de splendeur. Le monde des dieux, comme celui des fleurs et des papillons, est un monde dispendieux et imprévisible. L'homme de connaissance qui succède, dans la chronologie jüngérienne, à l'homme de puissance, s'avance dans l'assentiment à la beauté du monde comme « sceau héraldique » et dans le non moindre consentement à l'imprévisible. L'homme de connaissance est chasseur subtil. A l'affût sur l'orée, le chasseur subtil reçoit les signes qui, dans le visible, sont la marque de l'invisible, et ses rêves ont leur part, qui n'est rien moins que négligeable, dans la connaissance effective du monde.

La rupture inaugurale avec le monde bourgeois va d'emblée orienter l'œuvre de Jünger vers des régions extrêmes qui échappent à la fois à l'attention et au contrôle du monde moderne. L'exploration du monde intérieur n'est pas, chez Jünger, la complaisance narcissique de la subjectivité pour elle-même mais une traversée aussi exacte et impersonnelle qu'un voyage entomologique dans le monde extérieur. La psychologie jüngérienne ne relève pas de la « psyché » profane, larvaire, mais de la « psyché », en tant qu'âme, au sens néoplatonicien. Notre âme, dans la gnose jüngérienne, n'est pas disjointe de l'Ame du monde. L'Ame du monde et ses symboles augustes transparaissent dans l'âme humaine, sous la forme des songes, des visions, des pressentiments. Le poète est familier de l'augure qui surprend sa pensée dans l'exercice de la plus grande exactitude. La gnose jüngérienne s'exerce avec une virtuosité rare, aussi bien sur le mode de l'ampleur: les mythes, les légendes, les vastes herméneutiques de l'histoire humaine et des textes sacrés, que dans celui de l'intensité: la minuscule mais exaltante trouvaille du chasseur de papillons qui concentre dans l'infime toutes les énergies explosives de sa quête.

Dans le célèbre tableau de Caspar David Friedrich Les Falaises de Rügen, l'immensité du site, sa solennité, donnent au mode de l'ampleur l'une de ses représentations picturales les plus achevées, parce que devant la vastitude, le vide, l'espace qui s'encastrent avec violence dans le paysage, un personnage vu de dos paraît ignorer l'infini de l'ampleur qui s'offre à lui pour s'attacher à l'infini de l'intensité de sa recherche d'herboriste ou de chasseur d'insecte. L'ampleur du vaste prend sa mesure par l'intensité de l'infime. La science des lettres, la science naturaliste ou historique devient métaphysique aussitôt qu'elle parvient à unir en elle le mode d'intensité et le mode d'ampleur, la dimension horizontale et la dimension verticale, l'empreinte, dont les marques sont plus ou moins visibles, et le sceau.

La logique de la gnose est différente de la logique de la science profane, en ce qu'elle ignore la finalité effective, utile, quantifiable. La gnose est à elle-même sa propre finalité, et le monde dont elle traite est un monde de qualités. La gnose ne dénombre pas seulement le réel, elle s'avance dans le déchiffrement. Déchiffrer le monde, c'est traverser le temps dans le vaisseau cosmique, et c'est œuvrer à la révélation du sens à travers les apparitions successives du monde. Le déterminisme philosophique, autant que la théorie du hasard, détournent notre entendement de la beauté et du mystère, de telle sorte à faire de nous les dociles serviteurs du monde moderne, et de ses morales utilitaires et puritaines. La gnose poétique de Jünger est la reconquête de la puissance et de l'immortalité dont la société, placée sous le signe de l'uniformité, nous dépossède. La gnose suppose une « transvaluation de toutes les valeurs », pour reprendre la formule Nietzsche que l'on pourrait aussi caractériser comme une subversion de la subversion établie par le tiers-état, dans la mesure où la reconquête de la « vie magnifique », de la puissance est le propre de la Figure, telle que la conçoit Jünger.

Jünger distingue deux conceptions de l'individu, par les mots allemands, Einzelne et individuum. Le mot individuum désignant l'individu à la fois égocentrique et interchangeable des sociétés de masse, alors que le mot Einzelne se rapporte à l'individu en tant que singularité et originalité irréductible, en tant que Figure. A l'individu perdu dans la masse et, par cela même farouchement attaché à ce qu'il croit être ses « biens » correspond une science calculante (pour reprendre le mot de Heidegger), alors que pour l'individu en tant que Figure, la science est méditative, et, par cela, accroissement de puissance. Pour Jünger, la connaissance accroît la Figure dans sa distinction et son intensité. Les lignes deviennent plus précises et les couleurs plus rayonnantes. La gnose est poétique, au sens de l'étymologie grecque, du « faire » qui laisse l'empreinte la plus précise possible. Par la gnose jüngérienne, nous entrons dans une perspective hiérarchique, où la logique de cause et d'effet, et avec elle toutes les formes de progressisme, de déterminisme ou d'évolutionnisme sont dépassées: « L'ordre hiérarchique dans le domaine de la Figure ne résulte pas de la loi de cause à effet mais d'une loi tout à fait autre, celle du sceau et de l'empreinte ». Dans cette logique, nouvelle par rapport aux deux siècles précédents mais, nous y reviendrons, dans un sens plus profond, traditionnelle, ce qui importe n'est pas seulement ce qui nous précède et ce qui s'annonce mais, plus décisivement, ce qui nous surplombe, le sceau dont nous sommes l'empreinte.

Cette logique gnostique, et héraldique, pour célébratrice qu'elle soit de la splendeur du monde, pour approbatrice qu'elle soit de la puissance, et du rayonnement de la Figure, n'en témoigne pas moins d'une forme d'humilité essentielle. Le moderne, qui affiche partout sa modestie et son profil bas, tient pourtant farouchement à être le producteur de tout, et à cette fin, il renie Dieu et les dieux, les Muses et les messagers célestes, de sorte à n'être qu'à lui-même redevable de ses « travaux ». Cette étrange démesure, au sens exact outrecuidante, enferme l'individu en lui-même et laisse ses œuvres comme les objets aléatoires de son narcissisme navrant. Le nihilisme moderne n'est autre que la considération pathétique de cette impuissance vaniteuse à connaître le monde. Dans la perspective métaphysique propre à la théorie des signatures et des empreintes dont nous constatons la fécondité dans l'œuvre de Jünger, l'humilité consiste à reconnaître que nos idées et nos visions ne nous appartiennent pas en propre, qu'elles proviennent de l'intemporel, auquel nous donnent accès notre grandeur d'âme et notre acuité intellectuelle. La gnose poétique considère dans le singulier et dans le multiple les Figures d'éternité dont ils procèdent. Elle est dépassement du nihilisme car elle est recouvrance de la possibilité magnifique qui nous fut donnée in illo tempore, puis ôtée, d'atteindre poétiquement à la connaissance, non par projection ou reflet, mais par des actes de puissance et de beauté tels qu'ils adviennent dans Virgile, dans l'ivresse du songe de la « race d'or ». Dépasser le nihilisme, c'est aller, au pas qui ré-enchante les apparences, vers les contrées éclatantes où l'individu s'accorde à la Figure, où les pressentiments s'accomplissent, dans des œuvres qui seront la preuve de notre humilité.

Alors que le moderne se veut sans Dieu ni Maître, proclame la relativité du Vrai et du Beau non sans faire de sa médiocrité la mesure universelle, jugeant toute création superflue et toute connaissance impossible, la Figure trouve sa mesure par la création et sa connaissance par l'oubli de l'individualité, au sens quantitatif et profane. Aussitôt qu'il est question de connaissance et de poésie, il faut s'interroger sur la provenance et le destinataire de cette poésie et de cette connaissance. Tout ne s'adresse pas à n'importe qui. L'angle d'approche détermine la destination du message diplomatique, car toute métaphysique est diplomatie et les auteurs, au sens latin et étymologique, d'auctor qui se réfère à l'auctoritas, - la « vertu qui accroît », comme le rappelle Philippe Barthelet, - sont ambassadeurs entre les suavités immanentes des corolles et des parfums du jardin sous la pluie d'été au crépuscule et les contrées transcendantes où les dieux apparaissent.

Le grief le plus persistant que les modernes cultivent à l'égard de la gnose est d'être « élitiste », de ne s'adresser, selon la formule stendhalienne, qu'aux « rares heureux », de dédaigner les laborieuses et méritantes majorités. Grief inepte car il n'est rien de plus généreux, de plus disponible, de plus accueillant que le livre qui s'offre à chacun, sans jamais prétendre à contraindre le plus grand nombre. La gnose requiert des dispositions particulières, ou, disons, une orientation de l'Intellect, mais elle confère cette orientation autant qu'elle l'exige. Alors que la société, aussi « démocratique » qu'elle se veuille ne cesse de nous imposer des limites et des conditions auxquelles nous ne pouvons-nous soustraire, la gnose, et surtout la gnose dont l'humilité consiste à se traduire en œuvres, offre à qui le désire avec ardeur, l'aventure du Sans-Limite, c'est-à-dire la traversée odysséenne de la Figure à travers les ordres du monde jusqu'à sa perception la plus lumineuse, éclat d'éternité sur la surface des eaux.

La gnose, dans son exercice le plus accompli, est un privilège mais c'est un privilège offert à qui voudra bien s'en saisir, alors que nous vivons dans un monde constitué d'avantages qui sont la récompense de la cupidité et de la vilenie. Il n'est pas impossible, et nous y reviendrons, qu'il y eût aussi quelque rapport entre la gnose poétique et la philosophie politique. Les Figures du Travailleur, du Rebelle et de l'Anarque, qui se succèdent dans l'œuvre de Jünger, approfondissent, si l'on prend la peine de les considérer en perspective, une méditation sur le siècle mais aussi une méditation sur l'art de vivre, non plus de l'individu de l'ère bourgeoise mais de l'individu (Einzelne) qui cherche à conserver sa Figure au sein du monde de la technique qui, loin de s'affirmer comme l'expression de la puissance, au sens nietzschéen, comme on pouvait encore le croire au début du siècle, paraît au contraire avoir pour objectif le contrôle et l'annihilation de toute puissance libre.

Face à la technique d'une « mondialisation » dont chacun sait bien qu'elle n'est qu'une américanisation cybernétique, l'œuvre de Jünger, dans son exigence poétique et gnostique peut se lire comme un traité de résistance au nihilisme. Le Travailleur oeuvrait à vaincre le mal par le mal, selon le principe de Paracelse, et à porter contre le nihilisme les armes les mieux trempées du nihilisme lui-même. Il « travaillait » ainsi selon les périlleuses procédures de l'oeuvre-au-noir, à l'implosion d'une situation intenable, et à ouvrir la voie de la contemplation. Les sentes forestières qu'ouvrent les audaces du Rebelle et de l'Anarque seront, elles, l'initiation à d'autres couleurs. Au « noir et blanc » de l'intensité expressionniste des premières œuvres, si mal comprises, succédera le versicolore armorial des Songes et des Visions des Falaises de Marbre et de Visite à Godenholm. Le combat par le fer et le feu du guerrier cède la place aux guerres plus subtiles dont les conquêtes sont des états de conscience. L'intensité, et telle est bien la clef de voûte de la gnose poétique d'Ernst Jünger, s'accroît d'œuvre et œuvre comme une réalisation, au sens initiatique, d'une exactitude herméneutique qui perçoit, à l'apogée de la vitesse et du mouvement, le grand silence et la grande immobilité.
 
 
Luc-Olivier d’Algange
 
Extrait de Fin mars. Les hirondelles, éditions Arma Artis
 

vendredi, 03 janvier 2014

Martin Heidegger, Ernst Jünger, sur la ligne

Martin Heidegger, Ernst Jünger, sur la ligne

par Luc-Olivier d'Algange

ex: http://aucoeurdunationalisme.blogspot.com

Rien ne sera admis, reconnu, dépassé, redimé, des temps d'abominable servitude que nous vivons tant que nous n'aurons pas médité sur la ligne qui sépare le monde ancien du monde nouveau. Sur la ligne, c'est-à-dire, selon la réponse de Heidegger à Jünger, non seulement par-delà la ligne, au-dessus de la ligne, mais aussi, plus immédiatement à propos de la ligne. Faire de la ligne même le site de notre pensée et de son déploiement, c'est déjà s'assurer de ne point céder à quelque illusoire franchissement. Il s'en faut de beaucoup que l'au-delà soit déjà ici-même. L'ici-même où nous nous retrouvons, en ce partage des millénaires, a ceci de particulier qu'il n'est plus même un espace, une temporalité mais une pure démarcation. Là où nous sommes, l'être s'est évanouit et jamais peut-être dans toute l'histoire humaine nous ne fûmes aussi dépossédés des prérogatives normales de l'être et ne fûmes aussi radicalement requis par la toute-possibilité.

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Cette situation est à la fois extrêmement périlleuse et chanceuse. Le pari qui nous incombe n'est plus seulement de l'ordre de la Foi, - selon l'interprétation habituellement quelque peu limitative que l'on donne du pari pascalien, mais d'ordre onto-théologique. Certes, il existe un monde ancien et un monde nouveau. « Le domaine du nihilisme accompli, écrit Heidegger, trace la frontière entre deux âges du monde ». Le monde ancien fut un monde où la puissance n'étant point encore entièrement dévouée à la destruction et au contrôle, s'épanouissait en œuvres de beauté et de vérité. Le monde nouveau est un monde où la « splendeur du vrai », étant jugée inane, la morale, strictement utilitaire, soumise à une rationalisation outrancière, c'est-à-dire devenue folle, s'accomplit en œuvres de destruction.

La radicalité même de la différence entre ces deux âges du monde nous interdit généralement d'en percevoir la nature. Le plus grand nombre de nos contemporains, lorsqu'ils ne cultivent plus le mythe d'une modernité libératrice, en viennent à croire que le cours du temps n'a pas affecté considérablement les données fondamentales de l'existence humaine. Ils se trouvent si bien imprégnés par la vulgarité et les préjugés de leur temps qu'ils n'en perçoivent plus le caractère odieux ou dérisoire ou s'imaginent que ce caractère fut également répandu dans le cours des siècles. La simple raison s'avère ici insuffisante. Une autre expérience est requise qui appartient en propre au domaine de la beauté et de la poésie. L'accusation d'esthétisme régulièrement proférée à l'encontre de l'œuvre de Jünger provient de cette approche plus subtile des phénomènes propres au nihilisme. Certes, un esthétisme qui n'aurait aucun souci du vrai et du bien serait lui-même une forme de nihilisme accompli. Mais ce qui est à l'œuvre dans le cheminement de Jünger est d'une autre nature. Loin de substituer la considération du Beau à toute autre, il l'ajoute, comme un instrument de détection plus subtil aux considérations issues de l'approche rationnelle. La vertu de l'approche esthétique jüngérienne se révèle ainsi dans la confrontation avec le nihilisme. Pour distinguer les caractères propres aux deux âges du monde dont il est question, encore faut-il rendre son entendement sensible aussi bien à la beauté familière qu'à l'étrangeté.

Sur la ligne, les soufis diraient « sur le fil du rasoir », le moindre risque est bien d'être coupé en deux, ou d'être comme Janus, une créature à deux faces, contemplant à la fois le monde révolu et le monde futur. Que l'on veuille alors aveugler l'une ou l'autre face, en tenir pour la nostalgie pure du passé ou pour la croyance éperdue en l'avenir meilleur, cela ne change rien à l'emprise sur nous du nihilisme. Penser le nihilisme trans lineam exige ce préalable: penser le nihilisme de linea. Le réactionnaire et le progressiste succombent à la même erreur: ils sont également tranchés en deux. La fuite en avant comme la fuite en arrière interdit de penser la ligne elle-même. Toute l'attention du penseur-poète, c'est-à-dire du Cœur aventureux consistera à se tenir sur le méridien zéro afin d'interroger l'essence même du nihilisme, au lieu de se précipiter dans quelque échappatoire. En l'occurrence, Jünger, comme Heidegger nous dit que toute échappatoire, aussi pompeuse qu'elle soit (et comment ne pas voir que notre XXème siècle fut saturé jusqu'à l'écœurement par la pomposité progressiste et réactionnaire ?) n'est jamais qu'une impardonnable futilité.


Sur la ligne, nous dit Jünger, « c'est le tout qui est en jeu ». Sur la ligne, nous le sommes au moment où le nihilisme passif et le nihilisme actif ont laissé place au nihilisme accompli. Le site du nihilisme accompli est celui à partir duquel nous pouvons interroger l'essence du nihilisme. Après la destruction des formes, les temps ne sont plus à séparer le bon grain de l'ivraie. Le nihilisme, écrit Nietzsche est « l'hôte le plus étrange », et Heidegger précise, « « le plus étrange parce que ce qu'il veut, en tant que volonté inconditionnée de vouloir, c'est l'étrangeté, l'apatridité comme telle. C'est pourquoi il est vain de vouloir le mettre à la porte, puisqu'il est déjà partout depuis longtemps, invisible et hantant la maison. »


L'illusion du réactionnaire est de croire pouvoir « assainir », alors que l'illusion du progressiste est de croire pouvoir fonder cette étrangeté en une nouvelle et heureuse familiarité planétaire. Or, précise Heidegger: « L'essence du nihilisme n'est ni ce qu'on pourrait assainir, ni ce qu'on pourrait ne pas assainir. Elle est l'in-sane, mais en tant que telle elle est une indication vers l'in-demne. La pensée doit-elle se rapprocher du domaine de l'essence du nihilisme, alors elle se risque nécessairement en précurseur, et donc elle change. »


La destruction, qui est le signe du nihilisme moderne, serait donc à la fois l'instauration généralisée de l'insane et une indication vers l'indemne. Si le poète et le penseur doivent parier sur l'esprit qui vivifie contre la lettre morte, il n'est pas exclu que par l'accomplissement du nihilisme, c'est-à- dire la destruction de la lettre morte, une chance ne nous soit pas offerte de ressaisir dans son resplendissement essentiel l'esprit qui vivifie. Le précurseur sera ainsi celui qui ose et qui change et dont la pensée, à ceux qui se tiennent encore dans le nihilisme passif ou le nihilisme actif, paraîtra réactionnaire ou subversive alors qu'elle est déjà au-delà, ou plus exactement au-dessus.


Comment ne point aveugler l'un des visages de Janus, comment tenir en soi, en une même exigence et une même attention, la crainte, l'espérance, la déréliction et la sérénité ? Il n'est pas vain de recourir à la raison, sous condition que l'on en vienne à s'interroger ensuite sur la raison même de la raison. Que nous dit cette raison agissante et audacieuse ? Elle nous révèle pour commencer qu'il ne suffit pas de reconnaître dans tel ou tel aspect du monde moderne l'essence du nihilisme. La définition et la description du nihilisme, pour satisfaisantes qu’elles paraissent au premier regard, nous entraînent pourtant dans le cercle vicieux du nihilisme lui-même, avec son cortège de remèdes pires que les maux et de solutions fallacieuses. Vouloir localiser le nihilisme serait ainsi lui succomber à notre insu. Cependant l'intelligence humaine répugne à renoncer à définir, à discriminer: elle garde en elle cette arme mais dépourvue de Maître d'arme et d'une légitimité conséquente, elle en use à mauvais escient. Telle est exactement la raison moderne, détachée de sa pertinence onto-théologique. Etre sur la ligne, penser l'essence du nihilisme accompli, c'est ainsi reconnaître le moment de la défaillance de la raison. Cette reconnaissance, pour autant qu'elle pense l'essence du nihilisme accompli ne sera pas davantage une concession l'irrationalité. « Le renoncement à toute définition qui s'exprime ici, écrit Heidegger, semble faire bon marché de la rigueur de la pensée. Mais il pourrait se faire aussi que seule cette renonciation mette la pensée sur le chemin d'une certaine astreinte, qui lui permette d'éprouver de quelle nature est la rigueur requise d'elle par la chose même ».


felix-h-man-bildarchiv-preussischer-kulturbesitz.1263977561.thumbnail.jpgLe Cœur aventureux jüngérien est appelé à se faire précurseur et à suivre « le chemin d'une certaine astreinte ». La raison n'est pas congédiée mais interrogée; elle n'est point récusée, en faveur de son en-deçà mais requise à une astreinte nouvelle qui rend caduque les définitions, les descriptions, les discriminations dont elle se contentait jusqu'alors. « Que l'hégémonie de la raison s'établisse comme la rationalisation de tous les ordres, comme la normalisation, comme le nivellement, et cela dans le sillage du nihilisme européen, c'est là quelque chose qui donne autant à penser que la tentative de fuite vers l'irrationnel qui lui correspond. » A celui qui se tient sur la ligne, en précurseur et soumis à une astreinte nouvelle, il est donné de voir le rationnel et l'irrationnel comme deux formes concomitantes de superstition.


Qu'est-ce qu'une superstition? Rien d'autre qu'un signe qui survit à la disparition du sens. La superstition rationaliste emprisonne la raison dans l'ignorance de sa provenance et de sa destination, et dans sa propre folie planificatrice, de même que la superstition religieuse emprisonne la Théologie dans l'ignorance de la vertu d'intercession de ses propres symboles. L'insane au comble de sa puissance généralise cette idolâtrie de la lettre morte, de la fonction détachée de l'essence qui la manifeste. Aux temps du nihilisme accompli le dire ayant perdu toute vertu d'intercession se réduit à son seul pouvoir de fascination, comme en témoignent les mots d'ordre des idéologies et les slogans de la publicité. Dans sa nouvelle astreinte, le précurseur ne doit pas être davantage enclin à céder à la superstition de l'irrationnel qu'à la superstition de la raison. En effet, souligne Heidegger, « le plus inquiétant c'est encore le processus selon lequel le rationalisme et l'irrationalisme s'empêtrent identiquement dans une convertibilité réciproque, dont non seulement ils ne trouvent pas l'issue, mais dont ils ne veulent plus l'issue. C'est pourquoi l'on dénie à la pensée toute possibilité de parvenir à une vocation qui se tiennent en dehors du ou bien ou bien du rationnel et de l'irrationnel. »


La nouvelle astreinte du précurseur consistera précisément à rassembler en soi les signes et les intersignes infimes qui échappent à la fois au rationalisme planificateur et à l'irrationalisme. La difficulté féconde surgit au moment où l'exigence la plus haute de la pensée, sa requête la plus radicale devient un refus de l'alternative en même temps qu'un refus du compromis. Ne point choisir entre le rationnel et l'irrationnel, et encore moins mélanger ce qu'il y aurait « de mieux » dans l'un et dans l'autre, telle est l'astreinte nouvelle de celui qui consent héroïquement à se tenir sur le méridien zéro du nihilisme accompli. Conscient de l'installation planétaire de l'insane, son attention vers l'indemne doit le porter non vers une logique thérapeutique, qui traiterait les symptômes ou les causes, mais au cœur même de cette attention et de cette attente pour lesquels nous n'avons pas trouvé jusqu'à présent d'autre mots que ceux de méditation et de prière, quand bien même il faudrait désormais charger ces mots d'une signification nouvelle et inattendue.


L'entretien sur la ligne d’Ernst Jünger et de Martin Heidegger ouvre ainsi à la raison qui s'interroge sur ses propres ressources des perspectives qui n'ont rien de passéistes et dont on est même en droit de penser désormais qu'elles seules n'apparaissent pas comme touchées dans leur être même par le passéisme, étant entendu que le passéisme progressiste est peut-être, par son refus de retour critique sur lui-même, et par la méconnaissance de sa propre généalogie, plus réactionnaire encore dans son essence que le passéisme nostalgique ou néoromantique.


L'attention du précurseur, sa théorie, au sens retrouvé de contemplation, sera d'abord un art de ne pas refuser de voir. Quant à l'astreinte nouvelle, elle éveillera la possibilité d'une autre hiérarchie des importances où le vol de l'infime cicindèle n'aura pas moins de sens que les désastres colossaux du monde moderne. " De même, écrit Jünger, les dangers et la sécurité changent de sens". Comment ne pas voir que les modernes doivent précisément à leur goût de la sécurité les pires dangers auxquels ils se trouvent exposés ? Et qu'à l'inverse l'audace, voire la témérité de quelques uns furent toujours les prémisses d'un établissement dans ces grandes et sereines sécurités que sont les civilisations dignes de ce nom ?


L'homme moderne, ne croyant qu'à son individualité et à son corps, désirant d'abord la sécurité de son corps, ne désirant, en vérité, rien d'autre, est l'inventeur du monde où la vie humaine est si dévaluée qu'il n'y a presque plus aucune différence entre les vivants et les morts. C'est bien pourquoi le massacre de millions d'êtres humains dans son siècle "rationnel, démocratique et progressiste" le choque moins que la violence d'un combat antique ou d'une échauffourée médiévale, pour autant que sa sécurité, son individualité ou, dans une plus faible mesure, celles des siens, ont été épargnées. Le nihilisme de sa propre sécurité s'établit dans le refus de voir le nihilisme du péril auquel il n'a cessé de consentir que d'autre que lui fussent livrés, et se livrant ainsi lui-même à leur vindicte. Les Empereurs chinois savaient ce que nous avons oublié, eux qui considéraient leurs armes défensives comme les pires dangers pour eux-mêmes. Les Cœurs aventureux, ou selon la terminologie heideggérienne, les précurseurs, trouveront la plus grande sécurité dans leur consentement même à se reconnaître dans le site du plus grand danger. De même qu'au cœur de l'insane est l'incitation vers l'indemne, au cœur du danger se trouve le site de la plus grande sécurité possible. Comment sortir indemne de l'insane péril (qui prétend par surcroît avoir inventé la sécurité comme Monsieur Jourdain la prose !) où nous a précipité le nihilisme ? Quelle est la ligne de risque ?


Certes, le méridien zéro n'est nullement ce « compteur remis à zéro » dont rêve la sentimentalité révolutionnaire. Ce méridien, s'il faut préciser, n'est point une métaphore de la table rase, ou le site d'un oubli redimant. Le méridien zéro est exactement le lieu où rien ne peut être oublié, où toute sollicitation extérieure répond d'une réminiscence, comme le son répond à la corde que l'on touche, où l'empreinte ne prétend point à sa précellence sur le sceau. Ce qui advient, pas davantage que ce qui fut, ne peut prétendre à un autre titre que celui d'empreinte, le sceau étant l'hors-d'atteinte lui-même: l'indemne qui gît au secret du cœur du plus grand danger. La ligne de risque de la vie et de l'œuvre jüngériennes répond de cette certitude acquise sur la ligne.


Toute interrogation fondamentale concernant la liberté est liée à la Forme. Si le supra-formel, en langage métaphysique, bien l'absolu de la liberté, le propre de ceux que l'hindouisme nomme les libérés vivants, l'informe, quant à lui, est le comble de la soumission. La question de la Forme se tient sur cette ligne critique, sur ce méridien zéro qui ouvre à la fois sur le comble de l'esclavage et sur la souveraineté la plus libre qui se puisse imaginer. Dès Le Travailleur, et ensuite à travers toute son œuvre, Jünger poursuivit, comme nous l'avons vu, une méditation sur la Forme. Or, cette méditation, platonicienne à maints égards, est aussi inaugurale si l'on ose la situer non plus dans l'histoire de la philosophie, comme un moment révolu de celle-ci mais sur la ligne, comme une promesse de franchissement de la ligne. Ce qu'il importe désormais de savoir, c'est en quoi la Forme contient en elle à la fois la possibilité du déclin dans le nihilisme (dont l'étape d'accomplissement serait la confusion de toutes les formes: l'uniformité) et la possibilité d'une recréation de la Forme, voire d'un dépassement de la Forme dans une souveraineté jusqu'ici encore impressentie. Par les figures successivement interrogées du Travailleur, du Rebelle et de l'Anarque, Jünger s'achemine vers cette souveraineté. Pour qu'il y eût une Forme, au sens grec d'Idéa, et non seulement au sens moderne de « représentation », il importe que la réalité du sceau ne soit pas oubliée.


Une lecture extrêmement sommaire des œuvres de Jünger et de Heidegger donnerait à penser que lorsque Heidegger tenterait un dépassement, voire un renversement ou une « déconstruction » du platonisme, Jünger, lui s'en tiendrait à une philosophie strictement néo-platonicienne. Le dépassement heideggérien de la métaphysique, qui tant séduisit ses disciples français « déconstructivistes » (et surtout acharnés, sous l'influence de Marx, à détacher toute philosophie de ses origines théologiques) laissa, et laisse encore, d'immenses carrières à l'erreur. Les modernes qui instrumentalisent l'œuvre de Heidegger en vue d'un renversement du platonisme et de la métaphysique méconnaissent que, pour Heidegger, dépassement de la métaphysique signifie non point destruction de la métaphysique mais bien couronnement de la métaphysique. Il s'agit moins, en l'occurrence, de se libérer de la métaphysique que de libérer la métaphysique.


Il n'est pas question de déconstruire la métaphysique, pour en faire table rase, mais d'en établir la souveraineté en la dépassant par le haut, c'est à dire par la question de l'être. Pour un grand nombre d'exégètes français la différence essentielle entre une antimétaphysique et une métaphysique couronnée demeure obscure. Heidegger ne reproche point à la métaphysique de s'interroger sur l'essence, il lui impose au contraire, comme une astreinte nouvelle, de s'interroger plus essentiellement encore sur l'essence de son propre déploiement dans le Logos. A la métaphysique déclinante des théologies exotériques, des sciences humaines, de la didactique, de la Technique et du matérialisme, Heidegger oppose une interrogation essentielle sur le déclin lui-même.


En établissant clairement son dépassement de la métaphysique comme un couronnement de la métaphysique, Heidegger suggère qu'il y a bien deux façons de dépasser, l'une par le bas (qui serait le matérialisme) l'autre par le haut, et qui est de l'ordre du couronnement. Loin de vouloir « en finir », au sens vulgaire, avec la métaphysique, Heidegger entend en rétablir sa royauté. Par l'interrogation incessante sur les fins et sur la finalité de la métaphysique, Heidegger œuvre à la recouvrance de la métaphysique et non à sa solidification. Qu'est-ce qu'une métaphysique couronnée ? De quelle nature est ce dépassement par le haut ? Que le déclin de la métaphysique eût conduit celle-ci de la didactique à la superstition de la technique, du nihilisme passif jusqu'au nihilisme accompli, en témoignent les théories modernes du langage et l'humanisme qui ne voit en l'homme qu'un animal « amélioré » par le langage. Ce que Heidegger reproche à ces théories du langage et de l'homme est d'ignorer la question de l'essence de l'homme et de l'essence du langage, et d'être en somme, des métaphysiques oublieuses de leurs propres ressources.


Le dialogue entre Jünger et Heidegger, que le bon lecteur ne doit pas circonscrire à l'échange hommagial et épistolaire sur le passage de la ligne mais étendre aussi aux autres œuvres, prend tout son sens à partir des méditations jüngériennes sur le langage et l'herméneutique. En effet, loin de rompre avec la source théologique, Heidegger en fut le revivificateur éminent par l'art herméneutique qu'il ne cessa d'exercer au contact des œuvres anciennes, les présocratiques, Aristote, ou modernes, Hölderlin, Trakl, ou Stephan George. De même Jünger, en amont des gloses, des analyses et des explications poursuivit le dessein de retrouver, dans les signes et les intersignes, la trace des dieux enfuis. Entre les noms des dieux et leurs puissances, entre l'empreinte et le sceau, entre le langage et la langue, entre ce que doit être dit et ce qui est dit, l'Auteur s'établit avec une inquiétude créatrice. Ce serait se méprendre grandement sur la méditation sur la Forme qui est à l'œuvre dans les essais de Jünger que de n'y voir qu'une reproduction d'un néoplatonisme acquis et défini une fois pour toute, et réduit, pour ainsi dire à des schémas purement scolaires ou didactiques. Se tenir sur la ligne, c'est déjà refuser d'être dans la pure représentation. Entre la présence et son miroitement se joue toute véritable et féconde inquiétude spéculative.


Luc-Olivier d’Algange

dimanche, 13 octobre 2013

Jünger und Mohler

Jünger und Mohler

Karlheinz Weißmann 

Ex: http://www.sezession.de

mohlereinband.jpgDie Beziehung zwischen Ernst Jünger und Armin Mohler hat sich über mehr als fünf Jahrzehnte erstreckt. Sie wird – wenn in der Literatur erwähnt – als Teil der Biographie Jüngers behandelt. Man hebt auf Mohlers Arbeit als Jüngers Sekretär ab und gelegentlich auf das Zerwürfnis zwischen beiden. Mit den Wilflinger Jahren hatte dieser Streit nichts zu tun. Seine Ursache waren Meinungsverschiedenheiten über die erste Ausgabe der Werke Jüngers. Der Konflikt beendete für lange das Gespräch der beiden, das mit einer Korrespondenz begonnen hatte, im direkten Austausch und dann wieder im – manchmal täglichen – Briefwechsel zwischen der Oberförsterei und dem neuen französischen Domizil Mohlers in Bourg-la-Reine fortgesetzt wurde. Von 1949, als Mohler seinen Posten in Ravensburg antrat, bis 1955, als Jünger seinen 60. Geburtstag feierte, war ihre Verbindung am intensivsten, aber es gab auch eine Vor- und eine Nachgeschichte von Bedeutung.

Die Vorgeschichte hängt zusammen mit Mohlers abenteuerlichem Grenzübertritt vom Februar 1942. Er selbst hat für den Entschluß, aus der Schweizer Heimat ins Reich zu gehen und sich freiwillig zur Waffen-SS zu melden, zwei Motive angegeben: die Nachrichten von der Ostfront, damit verknüpft das Empfinden, hier gehe es um das Schicksal Deutschlands, und die Lektüre von Jüngers Arbeiter. Die Verknüpfung mag heute irritieren, der Eindruck würde sich aber bei genauerer Untersuchung der Wirkungsgeschichte Jüngers verlieren. Denn, was er im Schlußkapitel des Arbeiters über den „Eintritt in den imperialen Raum“ gesagt hatte, war mit einem Imperativ verknüpft gewesen: „Nicht anders als mit Ergriffenheit kann man den Menschen betrachten, wie er inmitten chaotischer Zonen an der Stählung der Waffen und Herzen beschäftigt ist, und wie er auf den Ausweg des Glückes zu verzichten weiß. Hier Anteil und Dienst zu nehmen: das ist die Aufgabe, die von uns erwartet wird.“


Mohlers Absicht war eben: „Anteil und Dienst zu nehmen“. Es ging ihm nicht um „deutsche Spiele“, nicht um eine Wiederholung von Jüngers Abenteuer in der Fremdenlegion, sondern darum, in einer für ihn bezeichnenden Weise, Ernst zu machen. Daß daraus nichts wurde, hatte dann – auch in einer für ihn bezeichnenden Weise – mit romantischen Impulsen zu tun: der Sehnsucht nach intensiver Erfahrung, nach großen Gefühlen, dem „Bedürfnis nach Monumentalität“, ein Diktum des Architekturtheoretikers Sigfried Giedion, das Mohler häufig zitierte. Daß der nationalsozialistische „Kommissarstaat“ kein Interesse hatte, solches Bedürfnis abzusättigen, mußte Mohler rasch erkennen. Er zog sein Gesuch zurück und ging bis Dezember 1942 zum Studium nach Berlin. Dort saß er im Seminar von Wilhelm Pinder und hörte Kunstgeschichte. Vor allem aber verbrachte er Stunde um Stunde in der Staatsbibliothek, wo er seltene Schriften der „Konservativen Revolution“ exzerpierte oder abschrieb, darunter die von ihm als „Manifeste“ bezeichneten Aufsätze Jüngers aus den nationalrevolutionären Blättern. Dieser Textkorpus bildete neben dem Arbeiter, der ersten Fassung des Abenteuerlichen Herzens sowie Blätter und Steine die Grundlage für Mohlers Faszination an Jünger.

Zehn Jahre später schrieb er über die Wirkung des Autors Jünger auf den Leser Mohler: „Sein Stil könnte mit seiner Oberfläche auf mathematische Genauigkeit schließen lassen. Aber diese Gestanztheit ist Notwehr. Durch sie hindurch spiegelt sich im Ineinander von Begriff und Bild eine Vieldeutigkeit, welche den verwirrt, der nur die Eingleisigkeit einer universalistisch verankerten Welt kennt. In Jüngers Werk … ist die Welt nominalistisch wieder zum Wunder geworden.“ Wer das Denken Mohlers etwas genauer kennt, weiß, welche Bedeutung das Stichwort „Nominalismus“ für ihn hatte, wie er sich bis zum Schluß auf immer neuen Wegen eine eigenartige, den Phänomenen zugewandte Weltsicht, zu erschließen suchte. Er hatte dafür als „Augenmensch“ bei dem „Augenmenschen“ Jünger eine Anregung gefunden, wie sonst nur in der Kunst.


Es wäre deshalb ein Mißverständnis, anzunehmen, daß Mohler Jünger auf Grund der besonderen Bedeutung, die er den Arbeiten zwischen den Kriegsbüchern und der zweiten Fassung des Abenteuerlichen Herzens beimaß, keine Weiterentwicklung zugestanden hätte. Ihm war durchaus bewußt, daß Gärten und Straßen das Alterswerk einleitete und zu einer deutlichen – und aus seiner Sicht legitimen – Veränderung des Stils geführt hatte. Es ging ihm auch nicht darum, Jünger auf die Weltanschauung der zwanziger Jahre festzulegen, wenngleich das Politische für seine Zuwendung eine entscheidende Rolle gespielt und zum Bruch mit der Linken geführte hatte. Sein Freund Werner Schmalenbach schilderte die Verblüffung des Basler Milieus aus Intellektuellen und Emigranten, in dem sich Mohler bis dahin bewegte, als dessen Begeisterung für Deutschland und für Jünger klarer erkennbar wurde. Nach seiner Rückkehr in die Schweiz und dem Bekanntwerden seines Abenteuers wurde er in diesen Kreisen selbstverständlich als „Nazi“ gemieden. Beirrt hat Mohler das aber nicht, weder in seinem Interesse an der Konservativen Revolution, noch in seiner Verehrung für Jünger.
Die persönliche Begegnung zwischen beiden wurde dadurch angebahnt, daß Mohler 1946 in der Zeitung Weltwoche einen Aufsatz über Jünger veröffentlichte, der weit von den üblichen Verurteilungen entfernt war. Es folgte ein Briefwechsel und dann die Aufforderung Jüngers, Mohler solle nach Abschluß seiner Dissertation eine Stelle als Sekretär bei ihm antreten. Als Mohler dann nach Ravensburg kam, wo Jünger vorläufig Quartier genommen hatte, war die Atmosphäre noch ganz vom Nachkrieg geprägt. Man bewegte sich wie in der Waffenstillstandszeit von 1918/19 in einer Art Traumland – zwischen Zusammenbruch und Währungsreform –, und alle möglichen politischen Kombinationen schienen denkbar. Der Korrespondenz zwischen Mohler und seinem engsten Freund Hans Fleig kann man entnehmen, daß damals beide die Wiederbelebung der „Konservativen Revolution“ erwarteten: die „antikapitalistische Sehnsucht“ des deutschen Volkes, von der Gregor Strasser 1932 gesprochen hatte, war in der neuen Not ungestillt, ein „heroischer Realismus“ konnte angesichts der verzweifelten Lage als Forderung des Tages erscheinen, auch die intellektuelle Linke glaubte, daß die „Frontgeneration“ ein besonderes Recht auf Mitsprache besitze, und das Ausreizen der geopolitischen Situation mochte als Chance gelten, die Teilung Deutschlands zwischen den Blöcken zu verhindern. Wie man Mohlers Ravensburger Tagebuch, aber auch anderen Dokumenten entnehmen kann, waren Jünger solche Gedanken nicht fremd, wenngleich die Erwägungen – bis hin zu nationalbolschewistischen Projekten – eher spielerischen Charakter hatten.

Differenzen zwischen beiden ergaben sich auf literarischem Feld. Mohler hatte Schwierigkeiten mit den letzten Veröffentlichungen Jüngers. Ihn irritierten die Friedensschrift (1945) und der große Essay Über die Linie (1951), und den Roman Heliopolis (1949) hielt er für mißlungen. Die Sorge, daß Jünger sich untreu werden könnte, schwand erst nach dem Erscheinen von Der Waldgang (1951). Mohler begrüßte das Buch enthusiastisch und als Bestätigung seiner Auffassung, daß man angesichts der Lage den Einzelgänger stärken müsse. Was sonst zu sagen sei, sollte getarnt werden, wegen der „ausgesprochenen Bürgerkriegssituation“, in der man schreibe. Er erwartete zwar, daß der „Antifa-Komplex“ bald erledigt sei, aber noch wirkte die Gefährdung erheblich und der „Waldgänger“ war eine geeignetere Leitfigur als „Soldat“ oder „Arbeiter“.


71043472.jpgMohler betrachtete den Waldgang vor allem als erste politische Stellungnahme Jüngers nach dem Zusammenbruch, eine notwendige Stellungnahme auch deshalb, weil die Strahlungen und die darin enthaltene Auseinandersetzung mit den Verbrechen der NS-Zeit viele Leser Jüngers befremdet hatte. In der aufgeheizten Atmosphäre der Schulddebatten fürchteten sie, Jünger habe die Seiten gewechselt und wolle sich den Siegern andienen; Mohler vermerkte, daß in Wilflingen kartonweise Briefe standen, deren Absender Unverständnis und Ablehnung zum Ausdruck brachten.


Mohler schloß sich dieser Kritik ausdrücklich nicht an und hielt ihr entgegen, daß sie am Kern der Sache vorbeigehe. „Der deutsche ‚Nationalismus‘ oder das ‚nationale Lager‘ oder die ‚Rechte‘ … wirkt heute oft erschreckend verstaubt und antiquiert – und dies gerade in einem Augenblick, wo [ein] bestes nationales Lager nötiger denn je wäre. Die Verstaubtheit scheint mir daher zu kommen, daß man glaubt, man könne einfach wieder da anknüpfen, wo 1933 oder 1945 der Faden abgerissen war.“ Einige arbeiteten an einer neuen „Dolchstoß-Legende“, andere suchten die Schlachten des Krieges noch einmal zu führen und nun zu gewinnen, wieder andere setzten auf einen „positiven Nationalsozialismus“ oder auf eine Wiederbelebung sonstiger Formen, die längst überholt und abgestorben waren. In der Überzeugung, daß eine Restauration nicht möglich und auch nicht wünschenswert sei, trafen sich Mohler und Jünger.


Die Stellung Mohlers als „Zerberus“ des „Chefs“ war nie auf Dauer gedacht. Mohler plante eine akademische Karriere und betrachtete seine Tätigkeit als Zeitungskorrespondent, die er 1953 aufnahm, auch nur als Vorbereitung. Der Kontakt zu Jünger riß trotz der Entfernung nie ab. interessanterweise bemühten sich in dieser Phase beide um eine Neufassung des Begriffs „konservativ“, die ausdrücklich dem Ziel dienen sollte, einen weltanschaulichen Bezugspunkt zu schaffen.


Wie optimistisch Jünger diesbezüglich war, ist einer Bemerkung in einem Brief an Carl Schmitt zu entnehmen, dem er am 8. Januar 1954 schrieb, er beobachte „an der gesamten Elite“ eine „entschiedene Wendung zu konservativen Gedanken“, und im Vorwort zu seinem Rivarol – ein Text, der in der neueren Jünger-Literatur regelmäßig übergangen wird – geht es an zentraler Stelle um die „Schwierigkeit, ein neues, glaubwürdiges Wort für ‚konservativ‘ zu finden“. Jünger hatte ursprünglich vor, gegen ältere Versuche eines Ersatzes zu polemisieren, verzichtete aber darauf, weil er dann auch den Terminus „Konservative Revolution“ hätte einbeziehen müssen, was er aus Rücksicht auf Mohler nicht tat. Daß ihn seine intensive Beschäftigung mit den Maximen des französischen Gegenrevolutionärs „stark in die politische Materie“ führte, war Jünger klar. Wenn dagegen so wenig Vorbehalte zu erkennen sind, dann hing das auch mit dem Erfolg und der wachsenden Anerkennung zusammen, die er in der ersten Hälfte der fünfziger Jahre erfuhr. Zeitgenössische Beobachter glaubten, daß er zum wichtigsten Autor der deutschen Nachkriegszeit werde.

Dieser „Boom“ erreichte einen Höhepunkt mit Jüngers sechzigstem Geburtstag. Es gab zwar auch heftige Kritik am „Militaristen“ und „Antidemokraten“, aber die positiven Stimmen überwogen. Mohler hatte für diesen Anlaß nicht nur eine Festschrift vorbereitet, sondern auch eine Anthologie zusammengestellt, die unter dem Titel Die Schleife erschien. Der notwendige Aufwand an Zeit und Energie war sehr groß gewesen, die prominentesten Beiträger für die Festschrift, Martin Heidegger, Gottfried Benn, Carl Schmitt, bei Laune zu halten, ein schwieriges Unterfangen – Heidegger zog seinen Beitrag aus nichtigen Gründen zweimal zurück. Ganz zufrieden war der Jubilar aber nicht; Jünger mißfiel die geringe Zahl ausländischer Autoren, und bei der Schleife hatte er den Verdacht, daß hier suggeriert werde, es handele sich um ein Buch aus seiner Feder. Die Ursache dieser Verstimmung war eine kleine Manipulation des schweizerischen Arche-Verlags, in dem Die Schleife erschienen war, und der auf den Umschlag eine Titelei gesetzt hatte, die einen solchen Irrtum möglich machte.
Im Hintergrund spielte außerdem der Wettbewerb verschiedener Häuser um das Werk Jüngers mit, dessen Bücher in der Nachkriegszeit zuerst im Furche-, den man ihm zu Ehren in Heliopolis-Verlag umbenannt hatte, dann bei Neske und bei Klostermann erschienen waren. Außerdem versuchte ihn Ernst Klett für sich zu gewinnen. Wenn Klostermann die Festschrift herausbrachte, obwohl er davon kaum finanziellen Gewinn erwarten durfte, hatte das mit der Absicht zu tun, die Bindung Jüngers zu festigen. Deshalb korrespondierte der Verleger mit Mohler nicht nur wegen der Ehrengabe, sondern gleichzeitig auch wegen einer Edition des Gesamtwerks, die Jünger dringend wünschte.


Klostermann und Mohler waren einig, daß eine solche Sammlung nach „Wachstumsringen“ geordnet werden müsse, jedenfalls der Chronologie zu folgen und die ursprünglichen Fassungen zu bringen beziehungsweise Änderungen kenntlich zu machen habe. Bekanntermaßen ist dieser Plan nicht in die Tat umgesetzt worden. Rivarol war das letzte Buch, das Jünger bei Klostermann veröffentlichte, danach wechselte er zu Klett, dem er gleichzeitig die Verantwortung für die „Werke“ übertrug. In einem Brief vom 15. Dezember 1960 schrieb Klostermann voller Bitterkeit an Mohler, daß er die Ausgabe im Grunde für unbenutzbar halte und mit Bedauern feststelle, daß Jünger gegen Kritik immer unduldsamer werde. Zwei Wochen später veröffentlichte Mohler einen Artikel über die Werkausgabe in der Züricher Tat. Jüngers „Übergang in das Lager der ‚Universalisten‘“ wurde nur konstatiert, aber die Eingriffe in die früheren Texte scharf getadelt.


Noch grundsätzlicher faßte Mohler seine Kritik für einen großen Aufsatz zusammen, der im Dezember 1961 in der konservativen Wochenzeitung Christ und Welt erschien und von vielen als Absage an Jünger gelesen wurde. Mohler verurteilte hier nicht nur die Änderung der Texte, er mutmaßte auch, sie folgten dem Prinzip der Anbiederung, man habe „ad usum democratorum frisiert“, es gebe außerdem ein immer deutlicher werdendes „Gefälle“ im Hinblick auf die Qualität der Diagnostik, was bei den letzten Veröffentlichungen Jüngers wie An der Zeitmauer (1959) und Der Weltstaat (1960) zu einer Beliebigkeit geführt habe, die wieder zusammenpasse mit anderen Konzessionen Jüngers, um „sich mit der bis dahin gemiedenen Öffentlichkeit auszugleichen“. Mohler deutete diese Tendenz nicht einfach als Schwäche oder Verrat, sondern als negativen Aspekt jener„osmotischen“ Verfassung, die Jünger früher so sensibel für kommende Veränderungen gemacht habe.

Jünger brach nach Erscheinen des Textes den Kontakt ab. Daß Mohler das beabsichtigte, ist unwahrscheinlich. Noch im Juni 1960 hatte Jünger ihn in Paris besucht, kurz bevor Mohler nach Deutschland zurückkehrte, und im Gästebuch stand der Eintrag: „Wenige sind wert, daß man ihnen widerspricht. Bei Armin Mohler mache ich eine Ausnahme. Ihm widerspreche ich gerne.“ Jetzt warf Jünger Mohler vor, ihn ideologisch mißzuverstehen und äußerte in einem Brief an Curt Hohoff: „Das Politische hat mich nur an den Säumen beschäftigt und mir nicht gerade die beste Klientel zugeführt. Würden Mohlers Bemühungen dazu beitragen, daß ich diese Gesellschaft gründlich loswürde, so wäre immerhin ein Gutes dabei. Aber solche Geister haben ein starkes Beharrungsvermögen; sie verwandeln sich von lästigen Anhängern in unverschämte Gläubiger.“


Sollte Jünger Mohlers Text tatsächlich nicht gelesen haben, wie er hier behauptete, wäre ihm auch der Schlußpassus entgangen, in dem Mohler zwar nicht zurücknahm, was er gesagt hatte, aber festhielt, daß ein einziges der großen Bücher Jüngers genügt hätte, um diesen „für immer in den Himmel der Schriftsteller“ eingehen zu lassen: „An dessen Scheiben wir Kritiker uns die Nase plattdrücken.“ Die Ursache für Mohlers Schärfe war Enttäuschung, eine Enttäuschung trotz bleibender Bewunderung. Mohler warf Jünger mit gutem Grund vor, daß dieser in der zweiten Hälfte der fünfziger Jahre ohne Erklärung den Kurs geändert hatte und sich in einer Weise stilisierte, die ihn nicht mehr als „großen Beunruhiger“ erkennen ließ. Man konnte das wahlweise auf Jüngers „Platonismus“ oder sein Bemühen um Klassizität zurückführen. Tendenzen, mit denen Mohler schon aus Temperamentsgründen wenig anzufangen wußte.


Die Wiederannäherung kam deshalb erst nach langer Zeit und angesichts der Wahrnehmung zustande, daß Jünger eine weitere Kehre vollzog. Das Interview, das der Schriftsteller am 22. Februar 1973 Le Monde gab, wirkte auf Mohler elektrisierend, was vor allem mit jenen Schlüsselzitaten zusammenhing, die von der deutschen Presse regelmäßig unterschlagen wurden: Zwar hatte man mit einer gewissen Irritation Jüngers Äußerung gemeldet, er könne weder Wilhelm II. noch Hitler verzeihen, „ein so wundervolles Instrument wie unsere Armee vergeudet zu haben“, aber niemand wagte sein Diktum hinzuzufügen: „Wie hat der deutsche Soldat zweimal hintereinander unter einer unfähigen politischen Führung gegen die ganze wider ihn verbündete Welt sich halten können? Das ist die einzige Frage, die man meiner Ansicht nach in 100 Jahren stellen wird.“ Und nirgends zu finden war die Prophetie über das Schicksal, das den Deutschen im Geistigen bevorstand: „Alles, was sie heute von sich weisen, wird eines schönen Tages zur Hintertüre wieder hereinkommen.“


Mohler stellte die Rückkehr zum Konkret-Politischen mit der Wirkung von Jüngers Roman Die Zwille zusammen, ein „erzreaktionäres Buch“, so sein Urteil, das in seinen besten Passagen jene Fähigkeit zum „stereoskopischen“ Blick zeigte, die von Mohler bewunderte Fähigkeit, das Besondere und das Typische – nicht das Allgemeine! – gleichzeitig zu erkennen. Obwohl Mohler an seiner Auffassung vom „Bruch“ im Werk festhielt, hat der Aufsatz Ernst Jüngers Wiederkehr wesentlich dazu beigetragen, den alten Streit zu beenden. Die Verbindung gewann allmählich ihre alte Herzlichkeit zurück, und seinen Beitrag in der Festschrift zu Mohlers 75. Geburtstag versah Jünger mit der Zeile „Für Armin Mohler in alter Freundschaft“; beide telefonierten häufig und ausführlich miteinander, und wenige Monate vor dem Tod Jüngers, im Herbst 1997, kam es zu einer letzten persönlichen Begegnung in Wilflingen.


Nachdem Jünger gestorben war, gab ihm Mohler, obwohl selbst betagt und krank, das letzte Geleit. Er empfand das mit besonderer Genugtuung, weil es ihm nicht möglich gewesen war, Carl Schmitt diese letzte Ehre zu erweisen. Jünger und Schmitt hatten nach Mohlers Meinung den größten Einfluß auf sein Denken, mit beiden war er enge Verbindungen eingegangen, die von Schwankungen, Mißverständnissen und intellektuellen Eitelkeiten nicht frei waren, zuletzt aber Bestand hatten. Den Unterschied zwischen ihnen hat Mohler auf die Begriffe „Idol“ und „Lehrer“ gebracht: Schmitt war der „Lehrer“, Jünger das „Idol“. Wenn man „Idol“ zum Nennwert nimmt, dann war Mohlers Verehrung eine besondere – von manchen Heiden sagt man, daß sie ihre Götter züchtigen, wenn sie nicht tun, was erwartet wird.


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